Chapitre 6: ma très chère mère, la pute.

69 6 0
                                    

Le ciel s'ouvrait à travers la jalousie. Et les rideaux réverbéraient la silhouette des persiennes contre la paroi verte.

Elle était assise, indubitablement pensive. Ses mains empêchaient la couette de lui tomber du torse, et sa langue n'arrêtait pas de silloner sa bouche. Sous son regard attentif, Ryan commença à s'étirer dans le lit.

- Ne me dis pas que je suis mignon quand je dors.

- Comment tu as fait?... Comment tu as fait pour passer la nuit ici?

- Toi, pourquoi tu m'as laissé rester?

Raphaëlle lui planta son regard tel un couteau. Elle éclata de rire, traîna les pas jusqu'au lit sous le regard interrogateur de Ryan et échoua dans les rebondissements du matelas. Son visage se rapprocha lentement de celui de son gigolo.

- Embrasse-moi, lui ordonna-t-elle.

Alors qu'ils se fixaient dans le blanc des yeux, il laissa tomber un sourire idiot. Ce qu'il pouvait être craquant lorsqu'il souriait. Non en fait, il était craquant tout court. Son sourire ne s'effaça que pour exécuter les desiderata de sa patronne. Puis elle finit à califourchon sur lui.

- Si un jour on me l'avait dit, je l'aurais pas cru, reprit-elle en traînant ses doigts dans la coiffure de Rayan.

- Quoi ça?

- Avoir un gigolo gratos, t'imagines?

- Pardon?

- Tu n'es qu'un abruti Rayan. Tu n'as quand même pas cru qu'en débarquant comme ça, j'allais t'offrir mon cœur sur un plateau d'or. Hum?

- Tu vas me le payer Raphaëlle.

- Fiche le camp.

- Très bien.

Il relâcha l'édredon et balança inopinément Raphaëlle dans les draps. Même si l'aterrissage sur son dos fut amorti par les coussins, elle lui lança un regard noir. Mais le même rire sardonique qu'elle n'avait pas arrêté de lui offrir depuis son réveil avait tôt fait de réapparaître. La porte de la salle de bains claqua! Et Raphaëlle tressauta. Aussitôt, elle se redressa pour s'asseoir.

Elle se retenait à peine de balancer toute la literie au sol. Son souffle accélérait alors que sa confusion montait. Mais son télephone la ramena à l'ordre.

- Allô?... Super et toi?... Ow, déjà? J'ai... j'avais pas vu le temps passer c'est... c'est pour quand exactement?... Hm, je vois... Je ne sais pas je... Pfff... Oui oui t'inquiète pas je suis là je vais... je vais te rappeler plus tard pour ça... Oui, je sais... Ça aussi, je le sais... Merci Auriane. Excellente journée à toi aussi.

Ses jambes se replièrent et son front échoua sur ses genoux. Dans un soupir profond, elle se rappelait combien elle pouvait être minable. Elle jeta un coup d'œil en direction de la salle de bains. L'un de ses plus grands regrets y prenait une douche. Mais elle se demandait si elle aurait pu éviter tout ceci. Les choses étaient allées tellement vite avec Rayan.

***

Dans ce restaurant, elle s'était embrouillée avec Rayan alors qu'ils se connaissaient à peine tous les deux. Ce dernier lui avait alors promis qu'elle ressortirait de cet endroit, mais seulement «les pieds devant». À dire vrai, elle avait fini par oublier cette menace. Elle ignorait que le jeune homme n'avait pas arrêté de la zyeuter toute la soirée durant. Et au moment de partir, elle n'avait pas remarqué qu'il était sorti juste derrière elle.

- Coucou... Vielle folle.

- Mais qu'est-ce que... Descends de cette voiture!

- Ah mais calme-toi ma vielle, j'ai une promesse à tenir, il me semble.

- Descends de là j'ai dit.

- D'accord. Mais d'abord, je m'occupe de toi.

- Je vais appeler la sécurité. Les petits rigolos comme toi, je connais. Alors pour la dernière fois, descends - de ma - voiture!

Face à la morgue du jeune homme, Raphaëlle tenta d'ouvrir sa portière mais il la retient fermement pas le bras.

- Tu me fais mal!

- Non, sans rire? Alors on fait moins la maligne maintenant.

- Lâche-moi!

- Ou sinon quoi? Tu vas appeler la sécurité? J'aimerais bien t'y voir. Vas-y, appelle-la!

- Arrête, supplia-t-elle d'un air désespéré. S'il te plaît...

- Tu as insinué que ma mère est une te-pu.

- Je suis désolée mais s'il te plaît, arrête... Tu me fais vraiment mal.

Rayan la libéra.

- Merci, souffla-t-elle.

Il la lorgna sans lui adresser le moindre mot.

- J'aurais pas dû... pour ta mère mais... c'est toi qui as commencé.

- C'est interdit d'aborder une belle femme maintenant?

- Tu m'as insultée.

- Non, sans blague.

Elle le fixa quelques secondes; ce qu'il pouvait être con.

- Écoute, je n'ai pas la tête à me disputer avec un inconnu. Alors descends, que je puisse rentrer chez moi.

- Et si je dis non?

Elle essaya mais ne parvint pas à riposter. Sa tête cogna dans le dossier alors qu'elle contemplait le vide.

- Depuis... que mon mari est mort, j'ai constamment droit à ce genre de propositions indécentes. Je ne sais pas si vous vous en rendez compte quand vous le faites mais... Vous me faites du mal.

- Et alors quoi? Tu n'es pas en manque peut-être?

Elle s'esclaffa au fond de sa gorge.

- Vous ne comprenez rien.

- C'est toi qui ne comprends rien. Regarde ici... Allez, regarde... Si tu ne te trouves pas quelqu'un vite fait, tu vas finir moche et aigrie, c'est comme ça. Et si tu veux tout savoir, il est peu probable que tu tombes sur quelqu'un qui soit prêt à t'épouser.

- J'ai à peine trente-sept ans.

- Tes petites-sœurs de trente ans sont en galère alors laisse ton affaire. Admets-le ou pas, ça ne te déplaît pas tant que ça de te laisser aller. Mais t'as peur du qu'en dira-t-on? Et je dois avouer que vu la société dans laquelle nous sommes, c'est toi qui as raison. En même temps, la société ne souffre pas avec toi... Allez, je descends.

Avant de claquer la portière, il glissa sa tête à l'intérieur de la voiture.

- Et au fait, tu dis ce que tu veux de ma pétasse de mère. Elle s'est barrée à ma naissance après m'avoir déposé sur un tas d'ordures.

Dr DJENGUÈ Où les histoires vivent. Découvrez maintenant