Chapitre 1

111 8 0
                                    

 	Bon, il faut arrêter d'être nostalgique, de ressasser le passé et juste oublier ce moment désagréable

Oups ! Cette image n'est pas conforme à nos directives de contenu. Afin de continuer la publication, veuillez la retirer ou mettre en ligne une autre image.


Bon, il faut arrêter d'être nostalgique, de ressasser le passé et juste oublier ce moment désagréable. J'ai pu y aller, j'habite chez Farid à Puteaux. Lui et sa femme m'ont accueillie et je me sentais déjà chez moi. C'est vraiment grand chez eux et j'ai ma propre chambre ! Cuisine ouverte, salle à manger, grand salon avec un canapé en tissu gris anthracite en forme de U. En même temps, quand on est un chef 4 étoiles, on gagne plutôt bien sa vie.

J'ai pu voir mon neveu Iyad grandir, il est très intelligent pour ses 6 ans, avec ses bêtises qui s'agrandissent aussi vite que sa taille. J'ai pu visiter Paris, c'est très beau, j'ai vu la Tour Eiffel de mes propres yeux, c'était impressionnant. On aurait dit une touriste. En même temps, je ne quittais pas souvent Le Mans. La raison n'est inconnue de personne : mon père.

J'ai beaucoup parlé avec Khadija et je lui avais raconté ce qu'il s'était passé il y a 4 ans, elle était elle-même outrée par son comportement. En y réfléchissant, la mentalité du bled a beaucoup à voir dedans. Les filles ne sortaient pas souvent à l'époque à part pour aller chercher de l'eau ou du bois comme il me le disait souvent. Oui sauf qu'on est en France.

Bref, j'ai eu aussi ma première rentrée à l'Université, j'ai failli arriver en retard, heureusement que Farid avait sa voiture, une petite Toyota Yaris noire. Ce n'était pas loin de la maison. Une demi-heure environ en transports. Mais c'était mon premier alors il a tenu à m'y accompagner. En arrivant là-bas, ce n'était pas du tout ce à quoi je m'attendais, j'ai cru que ce serait comme dans les séries sur Netflix : les campus, les grands espaces verts avec des groupes d'étudiants sur les pelouses et tout ça. La gifle a été violente : en fait ce n'est pas du tout ça, vraiment pas. J'oubliais qu'on était à Paris. La Sorbonne, c'est un vieux bâtiment, qui forme un rectangle et ouvert sur la largeur, qui a un certain charme, je ne peux pas le nier, surtout la chapelle qui s'élève, c'est vraiment magnifique.

Si mon père t'entendait....

Comme on dit c'est le charme de l'ancien, n'est-ce pas ? J'avoue que j'avais plutôt hâte de rentrer dans une université, parce que personne ne te juge sur ton apparence et je peux y faire de nouvelles rencontres. Et franchement, ça fait plaisir.

Je suis devant les escaliers de l'Université quand on m'interpella :

— Excuse-moi, dit une voix plutôt douce.

Aussitôt je me retournais.

— Oui ?
— Ton aiguille dépasse et on voit un peu ton cou, me dit-elle avec un grand sourire.

Ah oui, elle a raison, mon voile est un peu mal mis, mon aiguille dépasse largement. Avec tout mon blabla sur mon passé sulfureux, j'ai peut-être oublié de mentionner que j'étais voilée.

— Ah merci, je n'avais pas remarqué.
— T'inquiète, c'est normal, le premier jour, le stress, ça arrive. Au fait, je m'appelle Sarah, Sarah Kaya, dit-elle en me faisant la bise
— Myra, Myra Assani, ça se prononce « Ma-ira ».
— T'es comorienne ?
— Oui, comment tu sais ?
— Intuition et peut-être ton nom de famille. C'est assez connu en banlieue.
— Et toi, t'es de quelle origine ? Non, attends laisse-moi deviner, tu es tanzanienne, non t'es plutôt claire, alors t'es camerounaise ou sénégalaise ? dis-je sans m'arrêter, trop excitée d'avoir rencontré quelqu'un.
— Aucune de ces propositions, ma chérie, tu es vraiment à côté de la plaque, je suis tchadienne, dit-elle avec fierté.

Attendez, pouce... C'est où ça ? Ça existe comme pays ?

Je la regarde un peu perplexe. C'est vrai qu'elle n'a pas l'air d'une tanzanienne, d'une camerounaise, ou bien d'une sénégalaise. Elle a une peau de couleur chocolat au lait, un tout petit plus foncé que moi. Des yeux noirs. Un nez assez fin allant avec son visage ovale et une bouche en cœur. Elle a des cheveux noirs mi-long qu'elle a plaqué dans une queue de cheval. Elle porte un t-shirt blanc qui lui arrive mi-cuisse, un pantalon noir en cuir, une veste en daim et une paire d'Air Force I le tout en noir. Avec pour compléter, des créoles dorées et son grand sac à main noire épais avec des fermetures dorées. Très classe en restant élégante. Elle est un tout petit peu plus petite que moi, de quelques centimètres. Elle a des formes généreuses sans trop les montrer.

— Sans vouloir t'offenser, c'est où ça ? C'est en Afrique ?
— « Ça » comme tu dis, c'est au centre de l'Afrique, chérie. Là tu insultes mon pays, et je n'aime pas trop ça. Le Tchad, tu ne peux pas le rater, on voit que lui sur une carte. Avec ton pays si petit qu'on ne le voit même pas au microscope là. Donc va retravailler ta géographie, me répond-elle d'un ton sec.

C'est moi ou elle a l'air vraiment sérieuse en disant ça ?
Elle commence à m'énerver là, on ne me parle pas comme ça, même mes frères ne me parlent pas de cette manière, du moins presque :

— On va commencer par le commencement, tu me parles correctement déjà et t'évitera de me manquer de respecter. Ton pays là, c'est pas un bête de truc tu sais. Ce n'est pas comme si tout le monde le connaissait d'accord ? T'es peut-être au centre de l'Afrique mais pas au centre du monde. Mon pays « si petit » comme tu le dis, t'es bien au courant qu'il existe, non ? C'est qu'il n'est pas si petit que ça. Donc si tu n'es pas capable de parler comme une personne civilisée et d'apprendre à expliquer aux gens lorsqu'ils font des erreurs, faut revoir aux niveaux de ton éducation, dis-je en m'énervant et insistant bien sur ce dernier mot.

J'étais excitée comme je suis énervée à présent. Quand mes nerfs sont à vifs, je parle vite. Très vite. Je la regarde dans les yeux en m'attendant à ce qu'elle me lance une réplique cinglante mais on dirait qu'elle....

— Hahaha !!! Hahahahaha !!!

...se retient de RIRE ?! Je ne comprends plus rien là.

— Je t'aime bien toi, t'as du mordant, hahaha. Désolée mais c'était hilarant, je n'ai pas pu résister. J'aime beaucoup provoquer les gens et tu viens de me montrer que tu es assez susceptible. Ce n'était pas méchant. Tu peux ranger tes griffes, Wolverine, me lance-t-elle en rigolant. J'aime bien ta réaction mais t'inquiète pas, tu n'es pas la seule à ne pas savoir où se trouve le Tchad, en plus ça me rend mystérieuse.

Et c'est comme ça que j'ai rencontré ma première vraie meilleure amie, Sarah...

Naufragée, vraiment ?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant