Chapitre 22

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Il était onze heures trente quand j'arrivai sur le petit parking public, à deux rues de chez mes parents. J'avisai immédiatement la moto d'Ezéchiel, et lui dessus. Je me garai à côté de lui. Son casque entre ses cuisses il semblait m'attendre, une cigarette éteinte pendue entre ses lèvres.

"Tu fumes encore ? M'étonnai-je. "

J'avais ouvert la fenêtre le temps de ranger mes affaires et de couper le contact.

"Non. Et toi ?

_ Non.

_ Merde, j'avais besoin d'un briquet."

Je ricanai en lui en tendant un, toujours dans ma voiture. Il soupira en allumant sa clope, et tira dessus les yeux fermés.

"J'ai jamais arrêté, avoua-t-il.

_ Enfoiré !"

Je venais de sortir de la voiture après avoir refermé la fenêtre, enfilant ma veste sur ma chemise. Comme pour toutes choses, Ezéchiel avait arrêté de fumer en un claquement de doigts deux ans auparavant, alors que j'avais lutté durant des mois contre moi-même, comme pour toutes choses.

"J'ai pas pu, désolé.

_ Pas grave, ça me fait plaisir de savoir que toi aussi t'es un peu un raté. Je me sens moins seul."

Il sourit tristement. Je détaillai son visage, réalisai comme il avait l'air fatigué, à bout de nerfs, ses yeux rouges embués de larmes. A défaut de me regarder, il fixait le panneau stop à la sortie du parking.

"Tu tiens le coup ?"

Il haussa les épaules sous son blouson de cuir avant de venir couvrir son visage de sa main. Il étouffa un sanglot. Démuni, je posai une main dans son dos.

"Elle l'a annoncé au boulot vendredi. Elle a ramené les échos. Un p'tit garçon.

_ Quelle pute, marmonnais-je. Pardon, mais je trouve ça dégueulasse de faire ça devant toi."

Il se mit à pleurer de plus belle.

"J'en suis malade Diego. J'ai l'impression qu'on me vole mon... Fils.

_ Mais fais un scandale ! Tu as des droits, tu n'es pas qu'une quantité de sperme qui l'a fécondé !"

Il renifla sans élégance, frotta son visage.

"Tu vas le dire aux parents ?

_ Que je pars oui. J'ai commencé mes cartons.

_ Et ...?

_ Non, non, j'peux pas. J'en crève moi-même, je ne peux pas y penser sans pleurer."

Comme il l'avait fait pour moi quelques jours avant, je le pris dans mes bras, malhabile mais il ne sembla pas s'en formaliser. Il se laissa couler dans l'étreinte, me serra fort contre lui.

"Je te soutiendrai quoi que tu fasses, assurai-je.

_ Merci."

Nous nous séparâmes pour pouvoir prendre le chemin de la maison des parents.

"Et toi ? S'enquit-il. Tu avances avec ton patient ?"

Je sus que j'avais rougi au moment où il se mit à rire. Il me poussa d'un coup d'épaule et je me renfrognai, susceptible.

"Allez, raconte !

_ Y a rien à dire.

_ Boude pas."

Nous arrivions au bout de la rue, nous pouvions voir la maison et la voiture des parents garée dans l'allée.

"On apprend.

Blouse blanche [BxB]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant