Attention à la première partie postée
Il était si tôt qu'officiellement je n'avais pas commencé à travailler. Je ne pris pas même la peine de passer par les vestiaires, je filais dans les couloirs en tee-shirt tant il faisait beau, en jean, sans blouse, mon sac sur le dos.
La porte de sa chambre avait été laissée ouverte avec un cale-porte pour ne pas claquer avec la fenêtre ouverte. Je m'annonçai d'un petit coup sur la porte alors que j'étais déjà entré.
Il était habillé d'un jean comme moi, ses cheveux encore humides lui dessinaient des boucles brillantes tombant sur son front. Je l'embrassai d'un regard brûlant en essayant de faire taire mes pulsions.
"Il fait déjà chaud, lui fis-je remarquer en désignant son pull."
Il baissa les yeux sur le vêtement, un sourire en coin.
"Si tôt ! Et tu veux déjà que je déshabille, s'amusa-t-il."
Je grognai en sa direction, il mordit sa lèvre pour cacher son sourire. Saisissant le revers du fameux pull d'un bleu roi qui faisait ressortir le teint de sa peau, il le fit passer par-dessus sa tête. J'eus le temps d'apercevoir son ventre avant que le tee-shirt blanc qu'il portait en-dessous ne retombe. Il surprit mon regard que je ne pouvais détacher de cette petite bande de peau à la couleur du sable.
Je me rattrapai en sortant un emballage de papier marron de la poche avant de mon sac.
"Tu... Encore ? Pourquoi ?
_ Pour entamer la conversation sur une note joyeuse ?"
Je l'emmenai plus loin que la dernière fois, dépassant le simple banc de métal devant les portes du hall d'accueil des visiteurs. Je le conduisis jusqu'au parc qui bordait le bâtiment, désert à une heure aussi matinale. Arrivant devant un banc en bois, à l'ombre des grands arbres qui suivaient le chemin de gravier, il me fit signe de m'arrêter.
"Aide-moi à m'asseoir."
Je l'aider à se lever, il réussit à faire les deux pas qui le séparaient de l'assise avant que je ne me penche pour accompagner son corps jusqu'à la position où il pouvait se tenir seul. Il me murmura un merci au creux de l'oreille qui me fit remonter des frissons le long du dos.
Je m'assis à côté de lui, cette boule toujours au creux de l'estomac qui papillonnait au rythme de mon cœur. Le visage dans un rayon de soleil, il ferma les yeux, laissant sa tête rouler vers l'arrière.
"Je voudrais ne pas passer mon anniversaire ici, chuchota-t-il.
_ Ton anniversaire ? Quand est-ce ?
_ Dans deux semaines.
_ Et où voudrais-tu être ? Tentais-je."
Il rouvrit les yeux, baissa la tête en faisant craquer sa nuque. Il caressa du regard ma main posée entre nous, la sienne frémit.
"C'était donc de ça que tu voulais me parler ? Je ne sais pas, Diego. J'en sais foutre rien même. J'y pensé chaque jour, j'en dors pas la nuit. Je rêve de sortir autant que je le redoute. Je voudrais reprendre mes études, mais ce ne sera pas avant septembre, même si j'avais le droit à une chambre étudiante à la rentrée, en attendant...
_ N'as-tu vraiment pas une seule personne de ta famille ?
_ Quand mes parents ont choisi Dieu avant moi, ils m'ont fermé au nez la porte de la famille. J'ai déjà essayé d'appeler ma grand-mère, elle a raccroché quand elle a su que c'était moi. Mon oncle et ma tante n'ont même pas décroché. Un vieil oncle a accepté de me parler mais il perd la tête, je crois qu'il ne m'a pas reconnu."
Je me rendis compte que je le dévisageai parfaitement, il ne s'en offusqua pas. Son regard se perdit dans la frondaison face à nous, les feuilles se balançant qui dessinaient des ombres douces sur son visage.
"Deux semaines c'est court, grommelais-je.
_ Je sais. Et c'est déjà trop en même temps. Je veux juste sortir, revivre une vie un tant soit peu normale. Je veux aller sur la tombe de Yanis, je veux fêter mon anniversaire, sans fête, sans personne s'il le faut, mais juste pas entre les quatre murs blancs d'une chambre d'hôpital.
_ Je comprends."
Un sourire naquit au bord de ses lèvres, faisant mine d'étirer ses bras devant lui, il vint effleurer mes doigts. Je voulais les garder dans les miens, serre sa main contre moi mais il la retira prestement.
"Je veux te découvrir, poursuivit-il. Je veux pouvoir te parler sans aucun interdit, je veux aller pisser sans aide. Je ne veux plus être réveiller par le bruit des chariots dans le couloir, manger cette bouillie infâme à dix-huit heures.
_ Je te le promets Brahim. Je te ferais sortir d'ici."
Sans rien lui en dire, ma tête fourmillait d'idées folles qui nous donnaient un avenir à deux.
"J'ai parlé de toi à mon frère, lâchais-je pour détourner la conversation.
_ Oh, et il souhaite me rencontrer ? Ricana-t-il.
_ Oui, d'ailleurs puisque tu demandes.
_ Ah."
Son sourire s'atténua quelque peu, remplacé par une grimace incertaine. Je souris devant sa moue défaite. Il pouffa avec moi.
"Non, je veux dire... je me suis promis lundi soir en sortant de ta chambre que ça ne devait plus se produire. Et ça me paraissait tellement simple quand tu n'étais pas à côté de moi. Je pensais vraiment qu'il suffisait que je referme la porte pour faire taire mon esprit et ses idées absurdes. Et puis j'ai parlé de toi à mon frère, naturellement, comme j'aurais parlé d'autre chose. Parce que tu es là, tu es important. J'ai compris que tu es plus qu'un numéro de chambre, je en veux pas que tu sois un patient de plus à qui je souhaite un "bon courage pour la suite" sans jamais les revoir.
_ Toi et moi on sait que tant que je suis là...
_ Oui ! Je sais ! J'arrête pas d'y penser aussi. Le truc c'est que... Moi non plus j'ai plus envie d'être là. J'veux pas faire le discours du mec fier et assumé parce que ça ne me va pas, j'en suis loin, mais ça commence à me peser de devoir être quelqu'un d'autre pour faire plaisir à mes collègues, à mes chefs. J'ai passé trop de temps à avoir honte, à me sentir mal à cause de mes attirances. Et ça recommence ! Je voudrais juste pouvoir faire ce que j'aime, continuer à faire mon boulot mais sans que personne n'ait rien à dire sur mes relations."
Il scrutait mon visage sérieux, mes sourcils froncés, l'air de celui qui analyse et réfléchit. Il poussa un soupire à fendre l'âme.
"Pourquoi tout doit être si compliqué ? Tout le temps ? Gémit-il.
_ Je t'aurais bien sorti une phrase de merde "la vie te met à l'épreuve alors lève-toi et bats-toi" mais elle serait vraiment de mauvais gout celle-là."
Il ricana en mordant le croissant qu'il avait gardé à la main, à moitié sorti de son emballage.
"Et je ne trouve pas ça normal non plus, repris-je. Ça ne devrait pas être si compliqué. Les autres ne devraient pas à choisir pour nous. Je ne devrais pas avoir à me promettre de ne pas te céder. En plus je suis nul pour tenir les promesses.
_ Hé non ! T'as promis de me sortir de là !"
Il se mit à rire et je tournai vers lui, le découvrant rayonnant mais le menton couvert de miettes beurrées et collantes. Je tentai de réprimer le rire qui me secouait intérieurement, faisant trembler mes lèvres. Il fronça les sourcils.
" J'm'en suis mis partout ?
_ Tellement ! Explosai-je."

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Blouse blanche [BxB]
General FictionPour Diego, il va être difficile de rester professionnel face à Brahim, son nouveau patient récalcitrant. Mais entre conscience professionnelle et amour, Diego devra faire un choix. Contenu mature.