Chapitre 32

2.6K 245 51
                                    

As-tu lu la partie précédente ? 

--------------------------------------------------

Il pleuvait des cordes. Une véritable averse qui glaçait jusqu'aux os. Ma paranoïa me faisait me demander si c'était un présage, une représentation de mon état d'esprit, un quelconque signe divin. Mes essuie-glaces balayaient frénétiquement le pare-brise au travers duquel apparaissait par intermittence le bâtiment d'accueil. Sur le siège passager, mon sac qui contenait beaucoup trop de choses de grande importance. J'aurais pu attendre, mais me refusant depuis la veille au soir à considérer ça comme une erreur, je ne voyais pas pourquoi attendre. Remettre les choses au lundi ne changerait finalement rien.

Mes cheveux goutaient d'eau, mes épaules trempées quand j'arrivais devant Jessica, penché sur ses dossiers derrière le bord épais du comptoir en bois élimé. Je saluai d'un signe de tête les gens attendant dans la salle d'attente et m'accoudai par-dessus le meuble d'accueil. L'ombre que je dessinai sur ses feuilles lui fit lever la tête.

"Salut, Diego ! Qu'est-ce que tu fais là ? Tu ne travailles pas aujourd'hui.

_ Non, je voudrai déposer un courrier pour Mme. Ledû."

Son sourire poli mais conventionnel, de celle qui sourit à tout le monde, tout le temps, se crispa. Elle tapotait de ses ongles longs sur le bord de son bureau, me regardant à travers ses longs cils.

"Oh. C'est vrai alors ? Il paraît qu'hier soir ça a été...

_ Est-ce que tu pourrais juste lui donner ce courrier s'il te plaît ? Et pourrais-tu m'envoyer les contacts de mes patients que j'ai en ce moment ? Il faudrait que je les appelle rapidement. S'il te plaît.

_ Tu veux que je m'en occupe ? Je peux appeler et ...

_ Non, merci. Tu as assez à faire comme ça et c'est à moi de m'en occuper. Je te remercie, Jess, bonne journée.

_ Tu pars déjà ?

_ Non, je vais voir la raison pour laquelle je démissionne."

Je croisai deux collègues qui gardèrent les yeux baissés sur les chaussures blanches, mâchoires serrées en rasant les murs. Je m'en moquai. Je n'avais jamais eu le cœur si léger en marchant le long de ce couloir. Que la peinture des murs était laide, réalisais-je. Un vert d'eau tirant sur le menthe insipide qui ne paraissait jamais être une bonne idée pour peindre des murs. Les quelques rangées de chaises en plastique gris, inconfortables et tout au mieux, simplement laides. Les portes qui s'enchaînaient, se remplissaient, se vidaient, et se remplissaient encore. Des noms et des visites sans fin, des joies, des pleurs, des victoires et des défaites.

Sa porte ouverte, il m'attendait. Sagement assis sur son fauteuil orienté vers la fenêtre, des béquilles calées à l'arrière il se tourna vers moi alors que je n'étais pas encore entré. Son visage se détendit instantanément et je sentis mon cœur fondre, une sensation chaude dans la poitrine qui me fit sourire à m'en déchirer un zygomatique. Il s'était coiffé, ses boucles bien ordonnées qui paraissaient plus sombres dans la lumière maussade d'un temps pluvieux. Il portait un pull blanc et un jean ; il était beau. Je me posai contre le chambranle de la porte, à le regarder de loin, parce que soudain je ne savais plus quoi faire. Il était évident que j'étais amoureux de lui, si évident que ça m'en faisait tourner l'esprit, comme lorsque je pensais à l'infini de l'espace, que je le voulais, de toutes les façons qu'il était possible de vouloir quelqu'un, je fantasmais sur lui, je rêvais de lui et désormais, j'en avais le droit. J'en avais le droit parce que je me l'accordais et que je ne laisserais personne m'interdire de l'aimer.

Mais maintenant que c'était tangible, qu'il était si près de moi, si frêle et si beau, j'eus peur de le casser, de lui faire mal, à l'emmener dans mes plans foireux de mec instable.

Blouse blanche [BxB]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant