Je garai la voiture avec soulagement, harassé de la journée qui m'avait paru sans fin. Si j'avais pu me lever plus tard car ma journée ne commençait qu'en milieu de matinée, je m'étais laissé couler dans ses bras à peine avait-il ouvert les yeux. Il commençait à devenir trop plaisant de le laisser me faire jouir de bon matin, alors qu'il prenait d'autant plus d'assurance, me vidant de toute énergie vitale pour le reste de la journée. J'avais ensuite passé tout mon peu de temps libre à organiser la soirée de demain soir, celle de son anniversaire. Je claquai la portière en soupirant. Je la vis.
Minuscule, un petit sac de cuir serré sous son bras, ses cheveux cachés sous un voile pâle. Je verrouillai ma voiture de l'autre côté de la rue, elle ne fit pas attention à moi dans un premier temps. Elle regardait fixement la porte d'entrée de l'immeuble. Elle semblait parfaitement perdue, droit dans ses mocassins noirs, brillants. Elle serrait la bandoulière du sac à deux mains, la manche de sa veste glissant sur son avant-bras, dévoilant une montre fine en cuir rouge.
Je m'approchai, le cœur battant à tout rompre, sûr de moi malgré la boule au fond de mon estomac. Je ne pouvais pas me tromper. J'arrivai à sa hauteur, mon ombre embrassant la sienne.
"Mme. Aarab."
Elle sursauta, serrant son sac d'autant plus fort. Son regard affolé parcourait mon visage que je n'arrivais pas à garder neutre. Je ne pouvais pas le croire. Elle amorça un pas en arrière, sans me lâcher des yeux.
"Attendez !"
Un mètre nous séparait désormais, je refusais de la laisser partir si près du but. Elle avait fait le déplacement, elle était venue jusqu'ici, elle avait répondu au message de son fils, son unique fils maintenant, qui lui laissait une dernière chance.
"Vous... Vous êtes...
_ Docteur Oliveira, Madame. Je me suis occupé de votre fils durant son hospitalisation, je l'ai aidé dans sa rééducation. J'étais son... Kiné.
_ Et maintenant il vit chez vous."
Ma gorge se serra devant son regard sévère, sa posture défensive comme si je pouvais lui faire mal, comme si je la menaçais d'une quelconque façon.
J'ignorais quoi dire, quoi faire pour l'empêcher de partir. Je ne pouvais pas la retenir de force. Mais si elle faisait demi-tour, que dirai-je à Brahim alors ? Que j'avais bien vu sa mère, mais que l'amour pour son fils ne l'avait pas retenue ?
"S'il vous plaît, vous pouvez me juger, moi et mes choix de vie, vous pouvez me détester, refuser de me parler même, mais il y a là-haut votre fils. Votre unique fils, qui pleure son frère, seul. Je... J'aurais voulu que tout cela se passe autrement, mais tout ce qui compte, c'est que sa mère lui manque.
_ Vous ne savez pas.
_ Je sais que ma mère aussi m'a fermé la porte. Mais j'ai mon frère, mon appartement, mon travail. Ma vie est construite. Brahim n'a plus que vous. Je veux l'aider, le supporter, l'encourager, mais je ne pourrais jamais prendre une certaine place. Vous êtes sa mère, il vous aime. Ca fait des mois qu'il attend un geste, un mot de votre part. Je sais que ça a été dur pour lui de vous envoyer ce message, de prendre le risque d'être non pas déçu, mais brisé, si vous n'en faisiez rien. Et vous êtes là.
Elle me dévisageait littéralement et je ne pus que me dire qu'elle avait le même regard que lui, ses yeux étirés en amande, d'un noir d'encre profond. Elle essayait apparemment, en quelques secondes, de juger si j'étais digne de confiance ou non. Je fis tinter mes clés dans ma main, mes faisant tourner une par une entre mes doigts.
J'aurais voulu qu'à ce moment Brahim regarde par la fenêtre, qu'il la voit, qu'il l'appelle, qu'il l'incite à me suivre et à venir le voir. Elle pinça les lèvres, comme il le faisait quand il était contrarié.

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Blouse blanche [BxB]
Ficção GeralPour Diego, il va être difficile de rester professionnel face à Brahim, son nouveau patient récalcitrant. Mais entre conscience professionnelle et amour, Diego devra faire un choix. Contenu mature.