Prologue : Corrompue

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Emilie

Dimanche 21 Avril 2019.

Lille (France), à l'appartement des garçons.

Des erreurs, j'en ai faites au cours de ma si courte vie, comme tout le monde en somme, mais je me suis toujours efforcée de prendre les bonnes décisions, que ces dernières soient justes et qu'elles n'affectent personne, en raison de ma nature prudente et très intègre, et de mon esprit cartésien. Et pourtant ces derniers mois, je les ai cumulées, encore et encore, accentuant cette sensation horrible d'être devenue cette personne que je déteste tant. Je suis une fille abominable, corrompue et une femme sans cœur. Et je me hais tellement ! Tellement !

La culpabilité ne cesse de me ronger depuis des jours, je m'en mords les doigts en songeant à tout ce que j'ai pu faire, à tout ce que j'ai pu détruire derrière moi en fonçant tête baissée vers les choses dans lesquelles je refusais obstinément de mettre les pieds. Je ne me reconnais plus, je me sens tellement mal d'avoir été aussi bête, d'avoir pu être cette fille naïve et aussi détestable. Et je sais que tous mes choix, quels qu'ils soient, vont affecter tout mon entourage, tôt ou tard, et que lorsque je m'en rendrais compte : le mal sera déjà fait.

Et rien que pour cette raison, comme toutes les autres qui ont précédé cette dernière, je ne me suis jamais autant abhorrée de toute mon existence. Je me dégoûte, tout comme lui, et je vomis tout ce qu'il a pu me promettre jusqu'à aujourd'hui, parce que la seule chose qu'il a pu tenir jusqu'à présent : c'est de me fendre en deux, dans tous les sens du terme.

La respiration définitivement coupée, je le regarde une dernière fois tandis qu'il me tourne le dos, à faire ce qu'il a toujours été capable de faire : blesser les autres pour se protéger. Les lèvres courbées en une grimace et le regard empli de haine, je décide de m'en aller une bonne fois pour toutes et de ne plus le laisser s'immiscer dans mes pensées pour corrompre mon cœur, et être enfin maîtresse de tous mes jugements. Parce qu'il est temps que j'assume enfin mes erreurs et que j'arrête de me voiler la face ; il faut que je répare les pots cassés et ce n'est pas en restant chez lui que je vais remodeler quoi que ce soit.

C'en est même sûr et certain.

Je claque la porte dans mon dos puis je descends des escaliers, si vite que je m'en sens rapidement essoufflée. J'ignore volontairement les appels de Raffael qui résonnent dans la cage, il saura un jour pour quelle raison je suis aussi en colère, et tellement brisée..., mais pas tout de suite. Je dois rejoindre une personne pour tout lui avouer, quitte à ce que cette dernière me crache sa propre animosité à la figure pour soulager ma conscience empoisonnée.

Parce que j'ai toujours été impartiale et pondérée, et que je m'en veux terriblement pour toutes les fautes que j'ai pu commettre !

Les larmes ruisselantes sur mes joues, j'atteins le rez-de-chaussée en quelques secondes. Je pousse la porte vitrée d'un geste forcené et me rends machinalement vers les vélib' qui se trouvent aux pieds de l'immeuble. J'en détache un après l'avoir loué et le dirige vers la chaussée qui grouille de tout un tas de véhicule.

- Emie, attends ! me hurle Raffael, d'une voix si criarde qu'elle en brise définitivement mon cœur malmené.

Je pivote ma tête vers lui, le visage ravagé par une douleur insupportable. Je pleure ma stupidité, ma bêtise et ma rancœur, je laisse couler ma souffrance le long de mes joues et ma poitrine me fait mal, si mal que je comprends mieux cette mauvaise passe durant laquelle mon meilleur ami est passé, ces dernières années. Il se précipite vers moi, les larmes aux yeux, et me détaille d'une œillade si apeurée que ma responsabilité cisaille fermement ma chair, entraînant ses entailles profondes jusque dans mes organes, qui se mettent à saigner un à un.

NOUS Envers et contre toutOù les histoires vivent. Découvrez maintenant