Amitié fille/ garçon (1)

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Emilie

Mardi 5 Juin 2018 (onze mois plus tôt).

Lille (France), dans l'amphithéâtre de l'université.

La fin des cours, la liberté.

Enfin... c'est ce que pense en général la plupart des étudiants lorsqu'il est enfin l'heure de quitter le cours magistral comme il est indiqué sur notre planning, alors que notre professeur n'a pas encore fini son grand discours. Les différents bruitages me gênent pour la prise de note et je me sens obligée de fusiller du regard les branleurs de ma classe ; je me demande toujours ce que fabriquent des touristes pareils en pharma. Et ces derniers savent très bien qu'ils dérangent, mais ils s'en tamponnent complètement le coquillard.

Et qu'est-ce que ça a le don de m'énerver ce genre de personne ! Pourtant, il faut y aller pour arriver à me saouler, seul mon petit-frère de dix-sept ans a réussi à me faire perdre patience, tellement il est con sur les bords, et lui sait à quoi s'en tenir lorsque je suis indisposée.

Je pousse un soupir agacé en griffonnant sur mon bloc note, attirant le regard de Romane sur ma personne. Je croise rapidement ses yeux bleus-gris alors que je suis en train d'inscrire une abréviation du mot « environnement » pour aller plus vite dans mon annotation.

— Tous des cons, pff, finit-elle par me chuchoter en saisissant la raison de mon emportement.

Je lève les yeux au ciel en réponse et continue de gratter sur ma copie jusqu'à ce que le prof décide d'en arrêter là pour aujourd'hui.

— Je vous conseille d'apprendre ce chapitre pour vos partiels qui arrivent dans deux semaines, nous informe Monsieur François, notre professeur de santé publique. N'oubliez pas de réviser la réglementation du système de santé, c'est très important pour ce semestre. On risque de vous poser des questions sur le rôle de la sécurité sociale sur le remboursement total ou partiel des médicaments, ainsi que celui de la mutuelle.

Je range mon stylo bic dans ma trousse et fourre toutes mes affaires dans mon sac à dos avant de me redresser de mon pupitre. Je suis la chevelure rousse de Romane des yeux pendant que je descends des marches pour accéder jusqu'au bureau de Monsieur François, qui éteint rapidement son ordinateur portable. Nous le saluons brièvement avant de sortir de l'amphithéâtre toutes les deux.

— Tu viens à la soirée, jeudi ? me demande soudainement mon amie.

Je fronce les sourcils : pourquoi les étudiants organisent toujours des fêtes un jeudi soir alors que le lendemain, on a cours ? Je me le suis beaucoup de fois demandée et je ne vois toujours pas l'intérêt. Le vendredi matin, j'aperçois souvent des jeunes à deux doigts de rendre leur petit-déjeuner et qui se plaignent d'un assez gros mal de tête. Non, mais mec, si tu voulais être un minimum sérieux et un tant soit peu clair, tu n'avais qu'à boire de l'eau.

— Tu sais bien que non, je déteste les soirées étudiantes. C'est débile, c'est souvent dans des pubs qui puent la mort où le but est de s'alcooliser jusqu'à en être malade, et je me fais tout le temps chier dans ce genre de fête.

Romane émet un petit rire dans le fond de sa gorge. Je l'observe remettre une mèche rousse en arrière ; ce n'est pas sa couleur naturelle, je lui ai déjà demandée l'année dernière. C'est une brune comme moi, mais elle se préfère avec des cheveux auburn.

— Ça c'est parce que tes meilleurs amis ne seront pas avec toi...c'est Raff et Max, c'est ça ?

Je hoche la tête. Je connais les garçons depuis le lycée et nous ne nous sommes jamais quittés après ces trois merveilleuses années passées ensemble. Il a fallu que Raffael arrive en retard le jour de la rentrée en seconde et qu'il se sente obligé de s'asseoir sur la seule place libre dans la classe, soit à côté de moi. A partir de là, nous avons commencé à beaucoup sympathiser et je me suis vite attachée à lui. Raff ressemble vaguement à un petit chaton, tant pour sa curiosité parfois déplacée, mais aussi dans sa façon de se comporter avec les personnes qu'il ne connait pas : se rouler en boule dans un coin et montrer les griffes pour menacer quiconque oserait l'approcher, surtout lorsqu'il a décidé d'être de mauvais poil. Cela lui a valu directement ce surnom et cela ne lui déplait pas.

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