Entre Terre et Mer (Terminé - premier jet)

Chapitre 38 - L'hôpital

J'ai les hôpitaux en horreur. Je me souviens du jour où j'ai prévenu les secours pour Matthew. Il est resté quelques jours dans une chambre au ton crème, qui était tout aussi pâle et livide que lui. Puis, il est mort, des suites de ses blessures. Parce que je n'ai pas réagi assez rapidement, que je n'ai pas agi tout court alors que ce que je vivais n'était tout simplement pas normal. Aujourd'hui, je vais devoir affronter à nouveau cette situation. Une vague de panique monte en moi, que j'essaye de refouler à l'aide d'inspirations profondes : paniquer n'aidera pas Anna.

Lorsqu'enfin nous arrivons, vingt minutes plus tard, le véhicule s'arrête devant l'entrée des artistes : le service des urgences. Je descends en même temps que les urgentistes qui emmènent Anna et son brancard. Je m'arrête à l'accueil pour me charger de son admission. Ses papiers d'identité me sont fort utiles. Une fois l'admission effectuée, ce qui me prend quelques minutes, la secrétaire m'invite à patienter dans la salle d'attente. Après l'avoir remerciée, je me dirige vers la sortie de l'hôpital, pour prendre l'air et en profiter pour appeler les Clearwater.

Helena décroche à la deuxième sonnerie.

— Comment va Anna ? me questionne-t-elle de but en blanc.

— Je ne sais pas encore. Ils n'ont pas l'air inquiet mais ils vont lui faire passer des examens...

— Et comment tu te sens ?

Question difficile. Revoir tout cela aux premières loges, sans être la principale concernée me donne la sensation d'être tout aussi impuissante. En outre, il faudrait que je discute avec Anna pour lui faire prendre conscience que cette situation n'est pas normale et qu'elle est en droit d'agir. Dans le pire scénario, cela pourrait la tuer. Mais il m'avait fallu du temps pour m'en rendre compte...

— Pas vraiment au top... Je vais rester un peu, le temps qu'Anna se réveille. Je vais essayer de prévenir sa mère. Elle n'est peut-être pas au courant de la situation, mais... (j'en doute pensé-je).

— Tu veux que je te rejoigne ?

Je regarde l'heure sur mon téléphone. 16h45. Helena doit passer chercher Samuel à ma place à l'école et je n'ai pas vraiment envie qu'il vienne ici. Cette situation fait remonter beaucoup de mauvais souvenirs, hors de question d'avoir le sosie de mon petit frère dans les parages.

— Non, mais je te tiens au courant dès que j'ai du nouveau. Et je vais essayer de trouver le numéro de la mère d'Anna sur son portable pour la prévenir.

Elle accepte ma décision et après encore quelques minutes d'échange, je raccroche.

Commence maintenant la partie la plus difficile. J'ouvre le sac à dos de mon amie que j'ai emporté avec moi à l'extérieur. Je fouille la grande poche bien que je n'ai pas souvenir de l'y avoir vu lorsque j'en ai retiré ses affaires de cours. Faisant choux blanc, j'ouvre la petite poche devant et : bingo ! J'appuie sur une des touches latérales pour avoir accès à l'écran de verrouillage et son fond d'écran une photo d'Oceanpier, prise depuis le ponton face à une mer calme. Cette image ravive en moi d'autres souvenirs que je préfèrerai laisser enterrer à jamais au plus profond de mon cerveau. Je dessine son schéma de déverrouillage, un grand « N », pour accéder à son écran d'accueil sur lequel se présente cette fois-ci une photo de nous deux : elle tout sourire et moi avec un petit sourire. Cette image me réchauffe le cœur et me rappelle des souvenirs agréables.

J'ouvre alors l'application des « Messages » pour essayer de retrouver la trace d'un échange de texto entre Anna et sa mère. Mais hormis nos échanges, je n'en trouve pas d'autres. Je clique sur l'icône des « Contacts » pour y chercher le nom « Maman » ou bien quelque chose d'approchant. Son répertoire contient très peu de numéros. Mise à part le mien et celui de quelques camarades de classe, j'en déduis que « Patricia » doit être le prénom de sa mère. J'espère ne pas me tromper tandis que j'appuie sur l'icône du téléphone pour appeler cette personne.