Lorsqu'il rentra chez lui tout exténué, Kalen balança sa bandoulière de cuir et s'affala sur le canapé vert du salon. Il n'avait jamais été aussi heureux de revoir sa petite maison à la déco vieillotte.
Il desserra sa cravate et soupira en se débarrassant de ses chaussures. Il ajusta les coussins sous sa tête, puis ferma les yeux pendant un instant. Ça faisait longtemps qu'il n'était pas rentré aussi épuisé d'une journée de travail. A Santorin, le rythme était indéniablement moins dense qu'au Smaken.
Ce n'était pas un restaurant gastronomique, loin de là, évidemment. Une petite gargote à bas prix qui offrait des salaires aussi misérables que l'étaient les clients qui la fréquentaient. Mais Kalen s'y sentait à sa place, contrairement au Smaken qui lui semblait hostile sans la présence rassurante de Ramis Winchester.
Le brun regrettait de n'avoir croisé son chef de la journée, et se conforta dans l'idée que ce dernier l'évitait sans doute. L'énormité de la situation manqua de le faire rire. Le « coucou » habituel de l'horloge le fit sursauter et il ouvrit les yeux.
— Nous avons reçu le courrier ce matin, brailla Léaina en surgissant en trombe dans le salon, une pile d'enveloppe dans la main. Elle s'arrêta devant Kalen.
— Tant de courrier ? s'étonna-t-il.
— Il y a la facture d'électricité, informa-t-elle en tendant l'une des enveloppes à son petit frère. Il la prit et décolla le rabat avant de sortir le papier à l'intérieur.
« Garde un air naturel, fais mine de vraiment lire des factures », déchiffra-t-il intérieurement. Il ne broncha pas.
— Quarante euros de plus que le mois passé, tonna-t-il entre deux soupirs. Qu'est-ce qui se passe ?
— Il y a aussi le devis pour la réparation du four électrique, siffla-t-elle en lui tendant une autre enveloppe.
« La maison est pleine de caméras et de micros, je crois que nous sommes espionnés. »
— Ce n'est pas du tout raisonnable ! cent cinquante euros pour un moteur défectueux ? Mais enfin, pourquoi ?
— Que veux-tu que je te dise ? Je suis tout autant choquée que toi. Tiens, il y a aussi ça, qui est urgent. C'est ton relevé bancaire. Kalen ouvrit l'enveloppe d'un air impassible.
« L'enfant est chez Anto. On se retrouve chez lui dans deux heures, cet endroit n'est plus sûr. Je sors d'abord, tu me rejoins après. Je t'expliquerais tout là-bas.»
— Je suis à découvert, se lamenta Kalen en se prenant la tête entre les mains. Je crois que je devrais rencontrer mon banquier avant que ça n'empire, dit-il en remettant ses baskets. J'espère être revenu avant la tombée de la nuit.
— Il y a un reste de macaronis dans le four, dit Léaina en s'enveloppant d'un châle vert, je vais faire un tour en ville. Tu devrais manger avant de sortir.
— Tout à fait...
***
— Vous ne percevez pas quelque chose d'étrange ? s'étonna Xander en regardant Léaina refermer la porte derrière elle. Je trouve la réaction du suspect très...suspecte...
— Il vient de découvrir une série de dettes dans son courrier. N'importe quel homme aurait eu la même réaction, mon cher ami, le contredit la détective en lançant son dernier popcorn en l'air. Elle le réceptionna directement dans sa bouche, avant d'ajuste sa frange.
Xander hocha la tête, peu convaincue. Il avait l'impression que quelque chose clochait. C'était sûrement parce que rien de concluant ne s'était produit depuis l'installation du matériel d'espionnage. Il s'attendait à obtenir des aveux, ou du moins une preuve, dès les premières minutes. Mais aucune mention de l'enfant ni du kidnapping.
Il n'y avait que deux explications possibles. Soit ils n'étaient pas coupables et les détectives s'étaient plantés sur toute la ligne, soit les deux individus se jouaient uniquement d'eux. Dans tous les deux cas, Xander savait qu'ils s'en sortiraient perdants, ce qu'il voulait à tout prix éviter.
— Je crois que je vais rentrer chez moi, souffla Willow en s'étirant. On n'a rien capturé aujourd'hui, demain on aura assurément plus de chance. Un proverbe de chez moi dit « qu'au royaume de l'espoir, il n'y a pas d'hiver. »
Une fois sa patronne partie, Xander examina encore toutes les vues des caméras s'il n'y avait aucun angle mort. Il n'en trouva effectivement aucun. Ses collègues étaient des pros, ils savaient ce qu'ils faisaient. Mais le stagiaire se doutait bien qu'il y avait quelque chose qui ne tournait pas rond. Il était sûr qu'ils tenaient les bons coupables. Qu'est-ce qu'il leur manquait donc ?
Lorsqu'elle arriva chez elle, Willow était en proie aux mêmes spéculations. Aucun de leurs stratagèmes ne marchait, ce qui l'inquiétait au plus haut point. Elle sortit un plat de sandwiches du micro-onde et le posa sur sa table à manger marbrée.
Puis, elle se débarrassa de son manteau violet et de son chandail rose. Elle aurait tellement voulu que leur plan aboutisse aujourd'hui même. Elle ne savait pas combien de temps allait durer cette observation illégale qu'elle avait elle-même initiée, mais elle savait qu'elle en avait déjà marre.
Willow n'avait certainement pas le sens de la patience. Elle détestait devoir attendre. Il lui fallait une autre piste sur laquelle s'activer en attendant que les autres mordent. Et en croquant dans l'un des sandwiches, elle sentit apparaitre dans sa tête le nom de sa nouvelle piste. Un nom qui revenait beaucoup depuis un certain temps.
Un nom qui, elle était sûre, lui rapporterait des indices ou des preuves contre les Lachenaie.
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LIENS PARTAGÉS (WATTYS2020)
Mystery / ThrillerGAGNANT DES WATTYS THRILLER 2020 Matteo va mourir. Il n'a que sept mois, mais souffre d'une leucémie aiguë, qui le tuera si rien n'est fait. Il lui faut impérativement une greffe de moelle osseuse de ses parents biologiques, les Winchester. Mais Mat...