26 ALTERCATION

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— Je vais te tuer.

Cette phrase parvint à l'oreille de Kalen Lachenaie au ralenti. Ramis se retourna vers lui en serrant les poings. Le brun ne broncha pas. Il avait même cessé de respirer. Tout d'un coup, ce n'était plus une si bonne idée d'avoir révélé son secret à Ramis.

— Tue-moi si tu veux, dit-il, mais sauve d'abord ton neveu. Matteo est en train de mourir.

— Pourquoi, Kalen ?

— Parce qu'il est malade ! rugit ce dernier.

— Non, je veux dire...pourquoi as-tu fait ça ? aboya Ramis, les yeux vitreux. Matteo ne vous appartient pas.

— Et il t'appartient peut-être ?

— Si je suis le seul à pouvoir lui sauver la vie, alors je suis le seul avec qui il a une connexion sur cette Terre. Kalen crut s'étouffer de colère, et se mordit l'intérieur des joues jusqu'au sang pour se calmer.

— Si tu penses réellement ça, opina-t-il, alors tu es vraiment stupide. Matteo est l'enfant de mon mari !

— C'est mon enfant !

Les deux avaient crié en même temps, puis s'étaient instantanément tus. Ils écarquillèrent les yeux. La surprise se lisait sur leurs deux visages incrédules.

— Mickael était...ton mari ?

— Comment ça ton enfant ?

Ils avaient parlés en même temps, puis s'étaient tus. Ils restèrent silencieux tous les deux, essayant d'assimiler ce qu'ils venaient de se dire. Le cerveau de Kalen fonctionnait à un rythme anormalement rapide. Si Matteo était l'enfant d'Ingrid et aussi celui de Ramis, cela voulait dire que...

— Oh mon Dieu...

— Mickael était marié ?

Ce n'était pas possible. C'était quoi le délire ? Ramis et Ingrid ? Non, ce n'était pas possible. Comment Ramis pouvait-il prétendre que Mickael était l'homme de sa vie, et faisait quand même un enfant avec sa propre sœur jumelle ? Et Mickael...comment avait-il pu le tromper avec deux êtres aussi répugnants qu'Ingrid et Ramis ? Le fin mot de l'histoire était donc que Matteo était un enfant incestueux ?

— Vous...vous me dégoutez, siffla Kalen en tombant à la renverse sur ses deux fesses.

— Je...je ne comprends pas...Mickael était-il marié ?

— Comment as-tu pu avoir un enfant dans ces conditions ?

— Je...je l'ignore. C'est arrivé comme ça, c'était un accident, et...

— Arrivé comme ça ? explosa le commis de cuisine. Un accident ? Mais tu es un monstre, Ramis !

— Je veux récupérer mon fils.

— Oh, crois-moi tu n'approcheras jamais Matteo, de toute ta vie. Quand on est une personne si déplorable, on ne mérite même pas de vivre.

— Qui es-tu pour me juger ? Je te signale que c'est toi le kidnappeur ici. Et crois-moi, je le récupèrerais, Kalen. Tu vas me le rendre, même si je dois te martyriser pour cela.

— Essaie pour voir...

***

Xander n'avait pas eu besoin de deux mois pour cerner la personnalité de monsieur Nikova. Deux jours avaient largement suffi. Il s'était rendu compte que son nouveau patron ne le traiterait pas comme l'ancienne. Pour Willow, il était avant tout un équipier, un fils même. Pour Kotchenko, il n'était ni plus ni moins qu'un assistant.

Ce matin, le brun avait la mine renfrognée. Il ne savait pas si c'était les nouvelles couleurs infernales du bureau qui le mettaient dans cet état, mais il ne se sentait plus à l'aise ici. Il voulait tellement partir. Partir loin de Kotchenko, loin de l'âme de Willow. 

Une vorace envie de fumer lui mordit l'intérieur de la gorge. Au même moment, son nouveau patron traversa la porte et fila directement vers son siège.

— Xander, tonna-t-il une fois assis, la porte.

— Mais...c'est vous qui l'avez laissé ouverte !

— Si tu pouvais fermer ta gueule en même temps, je t'en serais infiniment reconnaissant.

Xander ne répondit pas. Il se mordit à nouveau l'intérieur des joues, son front se recouvrant de grosses plaques rouges. Il ferma la porte et revint vers son siège, la gorge soudain sèche.

— Je veux les dossiers relatifs à l'accident d'Ingrid Winchester et Mickael Lachenaie, ordonna l'homme aux cheveux rouges. Oh, et j'oubliais...un capuccino bien chaud. Xander se leva d'un bond et se précipita vers la porte, la veine sur son cou battant la chamade. Attendez, monsieur Christoffel, l'arrêta le veuf. Xander se retourna, les yeux injectés de sang.

— Oui, monsieur, dit-il avec toute la peine du monde.

— La méthodologie, monsieur Christoffel. J'ai dit les dossiers d'abord, le capuccino ensuite. Pas l'inverse, surtout pas l'inverse. Il faut être méthodologique, métho...

— ...dologique, le coupa Xander en frappant les dossiers sur la table devant Kotchenko. J'ai compris monsieur. Et il disparut en trombe à travers la porte.

Kotchenko ouvrit le dossier et le feuilleta longuement. Il lut avec attention chaque ligne de chaque paragraphe. Il observa chaque photo prise, chaque note inscrite par la main de sa femme. 

Quand Xander revint au bureau des enquêtes une demi-heure plus tard, Kotchenko avait déjà fini avec le dossier. L'assistant déposa le café devant son patron et retourna à son siège, un peu plus calme. Une faible odeur de tabac imprégna la salle fraîchement repeinte.

— Il faut que tu me conduises sur les lieux de cet accident.

— Ça fait presque un mois, vous n'allez rien trouver là-bas. Toutes les preuves ont été effacées par le temps.

— Que vous êtes hurluberlu, mon cher. Un vrai enquêteur sait toujours une chose, tonna Kotchenko en avalant une gorgée de son café, les preuves ne disparaissent complètement jamais. J'ai encore quelque chose à vérifier...

LIENS PARTAGÉS (WATTYS2020)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant