29 DISPARITION

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Léaina s'extirpa lentement de sa torpeur. Elle se frotta les yeux en réalisant qu'elle se trouvait dans une chambre de garde. À son chevet, Kalen somnolait. Il se réveilla en sursaut lorsqu'elle bougea.

— Tu es déjà réveillée, grogna-t-il en s'étirant.

— Que s'est-il passé ? s'exclama la rousse. Où est Matt ?

— Calme-toi, il est au bloc...la rassura-t-il. Elle s'arrêta un instant et le fixa de ses yeux fauves. Ça y est, Léa...tout s'arrange enfin. Ramis était compatible avec l'enfant. On va le guérir.

Les yeux de Léaina devinrent vitreux de larmes. Elle ferma les yeux pendant un instant, semblant réaliser ce que Kalen venait de lui annoncer. Le cauchemar était enfin terminé. Matteo survivrait et tout finirait bien pour lui. Il vivrait une longue vie, irait au collège, se ferait des amis, et même des petites amies. C'était ça la vie qu'elle rêvait pour lui. Et enfin, elle voyait une illumination au bout du chemin.

— Et Anto...il est aussi au bloc ?

Kalen secoua la tête, l'air soudain renfrogné. Antonio Delacruz avait disparu. Et il se demandait si c'était une coïncidence, que celui qui doive opérer Matteo s'évanouisse dans la nature à ce moment précis. 

Après tout, ils étaient au centre d'une enquête très serrée qui avait conduit au décès de la détective Nikova. Ce n'était plus un jeu. Et tout ça amenait à Kalen Lachenaie à penser que peut-être Antonio était en grand danger, lui aussi.

— Il n'aurait jamais quitté l'hôpital à un moment si critique, gémit Léaina. Il était censé être au bloc. Où peut-il bien se trouver, Kalen ?

— Personne ne le sait... je ne l'ai pas revu depuis mon retour à Pajpi. Et son téléphone ne passe pas. Il a...disparu...

Kalen sentit son cœur être secoué dans tous les sens. Il avait un mauvais pressentiment concernant Tony. Et à en juger par l'expression déconfite de sa grande sœur, il savait qu'elle partageait ses craintes. Tony les avait tellement aidés. C'est lui qui avait sauvé Matteo le jour de l'accident. Il s'était montré tellement dévoué à leur cause, quand bien même ça allait à l'encontre de son serment. 

Parfois, Kalen se disait qu'ils étaient néfastes pour le chirurgien. Tout avait changé dans sa vie à cause des Lachenaie. Il avait même fini par fragiliser ses liens avec Nina.

— Son numéro ne passe vraiment pas, remarqua Léaina lorsque le téléphone la renvoya vers la messagerie. Il sait pourtant ce qu'on a prévu de faire dès que Matteo sera tiré d'affaire...et il sait qu'on n'y arrivera pas sans son aide...

— J'ai comme un mauvais préssenti...

— Arrête de parler de toi, Kalen, l'arrêta Léaina en relançant l'appel. Mon meilleur ami a disparu, et au moment le plus crucial de cette affaire. Ce n'est pas le moment de la ramener à toi.

Au même moment, le chirurgien qui avait opéré Matteo, un homme noir à la taille imposante, entra dans la pièce. Il semblait essoufflé et heureux.

— L'opération a été un franc succès, avoua-t-il en souriant. Votre enfant va être conduit en salle de réveil. Mais vous devrez encore attendre environ une heure pour le voir.

— Merci beaucoup, le gratifia Kalen en joignant ses deux mains devant son visage, merci pour tout ce que vous avez fait. Nous vous en serons infiniment redevables. Le docteur acquiesça, et fit demi-tour. Mais Kalen l'interpella avant qu'il ne sorte. Attendez un instant. Et le donneur...il va bien ?

— La ponction sternale est une opération relativement facile à réaliser. Surtout que l'hôpital Pajpi a de très bons chirurgiens. Les plus chevronnés d'Amsterdam. Néanmoins, il a fallu compléter par une ponction-biopsie médullaire, à cause de la fibrosité de la moelle. Ensuite, le chirurgien a com...

— Cet homme veut savoir si son petit-ami va bien. S'il est mort, dites-le nous tout simplement.

— Léa !

— Il va...bien, rougit le chirurgien. Il se rétablit dans la salle 3B, troisième à gauche... au cas où vous voudrez le voir. Si vous voulez bien m'excuser, j'ai beaucoup de travail.

— T'as pas besoin d'être si atrabilaire, tonna Kalen en se levant de son siège.

— A quel moment de ta vie, t'as cru que t'avais le droit de m'donner des leçons ? Et puis où vas-tu ?

— Si tu du nouveau à propos de Tony, fais-moi signe. Quant à moi, j'ai quelqu'un à rencontrer...

***

Antonio ouvrit péniblement les yeux. Le soleil de l'après-midi filtrait à travers les barreaux de la lucarne. Le chirurgien essaya de déterminer où il se trouvait. Il ne se souvenait pas de cet endroit. Il ne se souvenait d'ailleurs de rien de ce qui s'était passé durant les dernières heures. 

Un homme avait surgi dans son bureau. Il avait des cheveux rouges et un accent russe très prononcé. Il lui avait demandé de déplacer sa voiture dans le parking. Antonio avait d'ailleurs trouvé cela étrange. Sa voiture était garée sur la même place depuis son arrivée au Pajpi, et jamais il n'avait bloqué le trajet. 

Néanmoins, il était allé voir ce qui se passait. Et il ne se souvenait de rien à partir de ce moment. Il leva les yeux et se rendit compte que ses mains étaient enchainées vers le haut. Il n'avait plus aucun vêtement sur lui, à part son bermuda noir.

— Il y a quelqu'un ? cria-t-il en secouant ses chaines.

LIENS PARTAGÉS (WATTYS2020)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant