REDENZIONE
(rédemption)
Anir porte un regard vide sur la cour pavée où les prisonniers ont le droit de se dégourdir les jambes une heure par jour. Il observe les détenus se battre entre eux, s'insulter, se cracher à la figure. La prison ne rend pas les hommes plus nobles. Elle en fait des chiens. Elle empoisonne l'âme lentement par un reste de vie plongée dans la rédemption et l'attente d'une renaissance.
Il s'est fait prendre comme un débutant, il a tué plusieurs fois et Dieu a voulu le condamné pour un meurtre qu'il n'a pas commis, il est emprisonné par amour. Anir comprend désormais pourquoi le parrain ne s'est jamais marié, pourquoi il n'a pas de sentiments, pourquoi il lui répétait quand il était gamin de ne laisser aucune femme en travers de son chemin, ça risquerait de l'affaiblir sur la quête des millions.
Vingt et un an, déjà en prison.
Le libyen a désormais tout le temps de temps de réfléchir. Il pense à la suite, à ce qu'il se passera après, il prépare sa vengeance contre son tortionnaire et ce traditore. Il doit bouger plus intelligemment, il doit être plus efficace pour gagner cette partie qui lui sera peut être fatale.
- Le mafioso, ca devrait t'intéresser.
Un gardien s'approche le long grillage qui encercle la cour, un journal dans la main. La couverture attire immédiatement les yeux du libyen et Anir grogne :
- Combien ?
- Quindici.
(Quinze)Anir ne ronchonne pas face au bénéfice qu'il se fait, il tire quelques billets de sa poche puis donne le compte au gardien à travers les trous de la grille. Il récupère le journal de la même manière et s'éloigne les yeux plongés sur le papier.
"OMICIDIO SUL GIUDICE
PINO ESPINOSA"
(Homicide sur le juge Pino Espinosa)L'article explique que la villa, coûtant près d'un million d'euros, du célèbre juge Tino Espinosa a été réduite en cendres dans la nuit. Un incendie volontaire a réduit au silence le juge, sa femme et leurs deux enfants.
Un rictus étire ses lèvres, cet enfoiré qui l'a envoyé ici ne mérite que cela. Anir n'a aucun doute sur les personnes qui sont à l'origine de ce départ de feu, il est fier de savoir que son organisation le venge. Il jette le journal dans une poubelle et ses yeux gardent une lueur brillante d'espoir durant toute la journée, mais qui disparaît bien vite à la nuit tombée.
L'unique ampoule, suspendue au plafond, commence à perdre de sa lueur et cette pièce insalubre commence à lui foutre les jetons à chaque fois qu'on l'y traine de force. Il y a toujours cet enfoiré qui se pointe, une fois que les gardiens partent.
- Toujours pas envie de parler, stronzo ?
(enfoiré)Anir secoue la tête et un coup part dans sa mâchoire. Il crache au sol du sang et relève son regard polaire tandis que son tortionnaire dégaine un briquet qu'il regarde avec intérêt avant de dire :
- La dernière fois, ça n'a pas été efficace hein ? Il faut quelque chose de plus fort, de plus électrique...
Le libyen voudrait lui faire ravaler son air malicieux mais les chaînes à ses poignets le bloquent pour effectuer tout mouvement et les brûlures de son dos sont encore trop douloureuses pour qu'il puisse se permettre cela.
Anir l'observe quitter la pièce sans un mot, les minutes passent et il se demande ce qu'il prépare de pire que les semi noyades dans cette baignoire rouillée et le feu ardent du briquet. Le mafieux deglutit quand il revient avec une batterie et un long câble dénudé de gaine.
- Peut-être que les réponses te reviennent, il dit en dénouant le câble. Toujours rien ?
Il s'approche du libyen avec une eponge humide qu'il scotche à son pied. Il accroche le câble dénudé pour que les fils touchent l'éponge, Anir ne cherche pas à se débattre. Il peut mourir aujourd'hui et il en a rien foutre, il veut juste que l'homme en face de lui creve d'une des pires manières qui soient.
- C'est étrange quand même, Gio connaît ton padre et il ne te l'as jamais dit ?
Un nouveau mensonge. Anir fixe l'homme avec intensité, il n'y croit pas. Il veut le faire douter sur le parrain, il veut semer le doute sur les liens les unissant pour que le libyen parle.
Et si c'était vrai ? Il a ce doute au fond de lui. Gio n'est toujours pas rentré en contact en huit mois avec lui alors que les autres l'ont fait. Et si Gio savait les réponses à ses questions et qu'il n'a jamais rien dit ? Pourquoi ? Anir serre la mâchoire, des questions auxquelles il ne peut répondre l'assaillent et le foutent dans le mal.
- T'es sûr que t'as pas les réponses ?
Un regard polaire comme seule réponse et l'homme hoche la tête avec un faux air désolé. Il branche le câble à la batterie et murmure qu'il va d'abord tester. Il appuie sur le bouton et Anir pousse un hurlement effroyable quand la décharge traverse son corps depuis ses pieds.
- C'était juste un test...
Anir ferme les yeux et pour la première fois depuis des années, ses pensées se tournent vers le seul être qui lui est supérieur. Un courant électrique traverse son organisme et seule une prière s'échappe de ses lèvres avant qu'il ne sombre dans l'inconscient.
Que son Dieu le pardonne.
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ᴀɴɪʀ ✓
ActionAnir porte le prénom d'un ange, il ne dira pas un mot. Il suffira d'un regard envoûtant pour que l'ange déchu sème le chaos. Il n'a plus de cœur, il prendra le tien pour exister. La mafia italienne tremble sous son regard polaire. Il ne craint perso...