CHAPITRE 5 - io amo

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IO AMO

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IO AMO

(je t'aime)

Anir se tient face à la fenêtre, son regard est rivé vers l'extérieur. Il y a toujours du noir caché dans les nuages. L'eau de la piscine stagne, des feuilles mortes flottent à la surface, suivant les quelques vaguelettes provoquées par le vent. Les souvenirs restent, ancrés quelque part dans son esprit, dans des zones de la mémoire qu'il ne soupçonne pas, rendant sa poitrine douloureuse.

Il a besoin de prendre du recul, de s'éloigner de cette famiglia qu'il n'a pas su défendre comme il le souhaitait.

Des morts.

Le libyen en a semé partout autour de lui comme un rayonnement néfaste qu'il répend à quiconque l'approche de trop près. Il ne veut plus blesser ses proches et affronter quotidiennement les personnes qu'il a cru connaître et comprendre, et qui l'ont irrémédiablement trahies, déçues.

Il est blessé, abîmé. Irréparable.

La vie est une pute. Elle lui a tout pris si facilement, la moindre opposition de sa part a été un échec cuisant. Il a seulement gagné une bataille contre Palerme et le sang recouvre ses mains depuis ses seizes ans. Il a vendu son âme, et, personne, pas même Dio, n'en voulait en voyant à quel point elle était trop empoisonnée.

Dio ne l'a pas aidé, il faut dire qu'ils ne se sont jamais vraiment aimés.

Deux bras encerclent sa taille, Rosa reste contre lui, regardant à l'extérieur sans un mot. Est-ce qu'elle pense comme lui ? Il se tourne vers elle pour pouvoir l'admirer de son regard, il est un peu trop défoncé par la cocaïne. Avec douceur, elle prend sa main dans la sienne. Elle souffle au creux de son oreille en un murmure :

- On danse ?

Le libyen l'observe de haut en bas et il acquiesce silencieusement. Il place sa main dans le creux de son dos comme pour être sûr qu'elle ne s'éloigne pas de lui. Sans un mot, ils se déplacent mutuellement dans la pièce en suivant un léger balancement. Il tient sa main du bout des doigts, le mafieux l'observe danser avec attention.

Pourquoi elle danse avec le diable ? Il pourrait lui faire du mal.

Sa gorge est sèche et il aimerait qu'elle parle la première, pour changer le cours des choses, mais elle n'en fait rien. Elle continue d'onduler, ses cheveux bruns bougeant au rythme imaginaire qu'elle impose à leur danse muette. Anir voudrait rester des jours à la regarder mais il finit par bloquer la brune contre son torse et susurre :

- Je pars à New York, l'avion décolle à six heures.

Il vient de se libérer d'un poids et il sent qu'elle resserre son étreinte autour de lui, ses bras encerclent ses épaules musclées comme pour le garder près d'elle.

- Un cousin de Gio a besoin de moi là-bas. Il faut assurer le passage des frontières d'après ce que je sais.

- Envoie un de tes hommes.

Anir soupire, il aimerait qu'elle comprenne. Il secoue négativement la tête, c'est mieux qu'il parte pour le bien de sa famiglia.

- Je dois trouver quelqu'un pour avoir les réponses à mes questions, dit-il dans un soupir.

- Tu reviendras ?

Il ne répond rien. Rien n'est sûr, rien n'est certain. Anir ne sait pas ce qu'il trouvera dans la mégalopole américaine. Et si c'était mieux qu'il reste là-bas pour le bien de sa famiglia ? Si il restait là bas à tout jamais aux côtés de l'homme qu'il va trouver ?

- J'aimerais tant que tu sois plus égoïste, elle soupire.

Cette fille a ouvert sa cage thoracique en deux, elle a écartelé sa peau et ses côtes pour regarder ce qu'il y a l'intérieur. Elle y a trouvé son cœur empoisonné, certes, mais son cœur qu'il a encore.

Anir la contemple. Il voit des adieux quelque part au fond de son regard. Il voudrai qu'elle ne ressente rien, qu'il puisse tout absorber, que ses larmes arrêtent de couler sur sa peau halée et qu'elle puisse le pardonner. Le fond de ses iris brillent de regrets et de non dits, il a la vague impression de revivre la même situation qu'il y a six ans. Il ne pourra pas résister à ses larmes, il supplie presque :

- Ne pleure pas.

Elle secoue la tête mais c'est déjà trop tard, les larmes arrivent à l'assaut. Anir la serre contre son torse, il se maudit de la blesser encore et il est fatigué de tenir toujours le rôle du méchant.

- Garde tes larmes pour un autre, il supplie tandis que ses lèvres frôlent sa joue.

Rosalinda l'étreint un peu plus, et sans attendre ses lèvres cherchent celles du libyen. Ils s'embrassent avec avidité, incapables de se séparer plus de quelques secondes, ses mains pressent ses hanches pour la rapprocher de son corps ardent. Ils se déshabillent mutuellement, des soupirs leur échappent quand leur corps se côtoient. La douceur de ses doigts sur sa peau écorchée le fait frissonner, il ne souffre pas tandis qu'elle griffe son dos dans leur ébat.

Leurs yeux se croisent. Il voudrait cacher la vérité, mais ses démons luisant au fin fond de ses iris polaires ne peuvent dissimuler ses sentiments grandissants, il murmure doucement quelques mots.

Il les regrettera aussitôt dans les heures suivantes, sachant pertinemment qu'il ne parvient pas à protéger ceux qu'il aime.

Il l'observe dormir. Ses sanglots ont fini par s'arrêter au bout de quelques heures, Rosalinda a aussitôt sombré dans un sommeil profond. Le libyen joue avec ses cheveux bruns, il les enroule autour de son index et son cœur se serre quand il constate qu'il est déjà l'heure. Il embrasse une dernière fois son front avant de se lever doucement du lit. Dans la chambre, il récupère ses vêtements éparpillés sur le sol, il reboutonne sa chemise blanche et renoue sa cravate autour de son cou.

Dans l'obscurité la plus totale, il s'habille tentant de refouler les battements de son cœur fébrile. Il tente d'empêcher à la bile de remonter donnant un goût âcre à son palet. Il tente d'arrêter les tremblements frénétiques de ses mains quand il attache les sangles de son holster autour de son épaule.

Et quand il se dirige vers la porte, qu'il presse la poignée, il se tourne une dernière fois pour observer son visage éclairé par les premiers rayons lumineux. Il finit par se résigner à partir. Il évite les adieux avec la famiglia et s'éclipse discrètement de la maison, comme un voleur, il s'engouffre dans sa voiture pour se diriger vers l'aéroport.

Une larme roule le long de sa joue, en s'éloignant de Corleone, sachant pertinemment qu'il ne reviendra pas. Il laisse derrière lui ses regrets pour une histoire inachevée qui n'avait pas réellement commencée.

 Il laisse derrière lui ses regrets pour une histoire inachevée qui n'avait pas réellement commencée

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ᴀɴɪʀ ✓Où les histoires vivent. Découvrez maintenant