Laisse toi aller (T2)

#38 Samy

J'inspire et j'expire, lentement, comme on m'a appris afin de gérer une situation de stress intense. Les secondes défilent mais paraissent durer des heures tandis que je me précipite vers le corps inconscient de Hailey.

Un attroupement s'est déjà formé autour d'elle. Je ne comprends rien à ce qui se passe, la scène se déroule au ralenti. Faith surgit de nulle part et s'accroupit auprès d'elle, tandis que Rose observe la scène, horrifiée. Une petite voix dans ma tête se demande ce qu'elle fout ici et si elle a quelque chose avoir avec sa chute mais je n'ai pas le temps de m'attarder sur la question, je reprends rapidement mes esprits et appelle immédiatement les urgences.

Etrangement, Faith semble prendre les choses en main et je me tiens à l'écart, impuissant. La femme à l'autre bout du fil me demande un tas d'infos que je n'ai pas, je ne sais rien de ce qui s'est passé ni pourquoi Hailey a perdu connaissance. Faith lève la tête après avoir placée Hailey en position latérale de sécurité et me fait signe de lui tendre le téléphone.

- Allo, oui, je suis de la famille. Hailey présente une cardiomyopathie hypertrophique sévère, elle vient de perdre connaissance. (Elle marque un court temps de pause. Je suis pendue à ses lèvres et elle se met à fouiller dans le sac de Hailey). Non, elle n'a rien sur elle, mais je crois qu'elle a pris son traitement avant de partir. Enfin j'en sais rien, s'énerve-t-elle.

Putain, je comprends rien à ce qui se passe. Quelques minutes auparavant tout se passait bien et désormais j'ai l'impression que ce qui arrive est très grave et je ne peux rien faire. Je suis là, comme un con à attendre que la situation soit prise en main, j'ai envie de taper dans quelque chose. Hailey est livide et je n'ai jamais vu Faith aussi sérieuse et grave, je sais qu'elle tente de faire bonne figure, mais on ne ment pas à un mec comme moi, encore moins lorsque j'essaie de garder la face au même moment.

- Très bien, on vous attend, finit-elle par dire avant de raccrocher.

- Pourquoi est ce qu'elle ne se réveille pas ? Et c'est quoi ce délire de traitement ou je ne sais quoi ? J'aboie, hors de moi.

Je n'ai pas droit à une réponse. Imperceptiblement, les yeux de Hailey se mettent à cligner et je tombe à genoux à côté d'elle. Je ne m'étais pas rendu compte à quel point j'étais inquiet de la voir inerte, aussi pâle. Je ne sais pas si l'image de son corps sans vie quittera un jour mon esprit. Mes mains tremblent lorsque pose ma veste sur ses épaules nues. Il fait une chaleur étouffante et pourtant elle est gelée. La boule qui s'est formé dans ma gorge grossit à vue d'oeil. Et si elle ne se réveillait jamais ? 

Pour la première fois de ma vie, la peur me lancine l'estomac et je ne peux qu'attendre. Pour ne pas affoler tout le monde nous décidons d'attende dehors, là où l'air sera beaucoup moins étouffant. Je glisse un bras sous le genoux de Hailey et l'autre sous ses bras. Elle est aussi légère qu'un plume. Nous nous frayons un chemin parmi la foule compacte et nous retrouvons enfin à l'air libre. Serrée contre moi, j'ai l'impression stupide de la protéger et de me rendre enfin utile.

Doucement je la sens s'agiter doucement et reprendre connaissance tandis que je dévale les marches qui mènent au parking en contre bas.

- Merde, grogne-t-elle contre mon cou. Qu'est ce qui s'est passé ? Bredouille-t-elle tout en sortant doucement de sa torpeur.

Je m'arrête enfin lorsque la lumière des sirènes brisent l'obscurité. Elle se gare tandis que Faith accoure à leur rencontre. Une femme ronde d'une quarantaine d'année, les cheveux bruns hirsute descend de la camionnette accompagné d'un grand blond plutôt baraqué. Tous deux ont l'air d'avoir de l'expérience dans les questions qu'ils posent.

- Tu peux me lâcher s'il te plait, murmure Hailey. C'était vraiment pas la peine d'appeler les urgences, peine-t-elle à articuler.

Je dois me faire violence pour ne pas lui hurler dessus et déverser toute ma colère, mon soulagement et mes peurs, elle ne serait pas en état d'encaisser.