Laisse toi aller (T2)

#13 Hailey

Je déteste cet endroit. Je déteste les lundi et je déteste les examens médicaux qui apportent de mauvaises nouvelles. Assise sur le divan médical bleu, je fixe les murs blancs et froid. Sérieux, un peu de couleur et de gaieté à cet endroit ne ferait pas de mal. Il n'y a pour toute décoration que des tableaux d'artistes de renom qui doivent valoir une fortune, quelques images de nos chers organes vitaux et des statuettes hors de prix. Un vrai musée mais aucune chaleur et réconfort ne s'en dégage. C'est pourtant le meilleur cardiologue de LA, mais son cabinet ne me met pas à l'aise.

- Tu retires le haut, on va prendre ton pouls, et après on passe à l'électrocardiogramme. Me demande gentiment le docteur Harrison.

Je m'exécute tout en conservant une image sereine comme si rien de tout cela ne me faisait flipper. Mais la vérité que personne ne connaît c'est que je suis totalement effrayée. Le médecin m'a donné un second rendez-vous pour des examens plus poussés, apparemment mon état s'est un peu empiré. Rien d'alarmant m'a-t-il assuré, mais ce n'est pas lui qui vit avec une insuffisance cardiaque depuis l'âge de 5 ans.
Mon médecin me pose les dix électrodes à même la peau : six sur le thorax et une à chaque extrémité des membres. Ce n'est pas désagréable mais j'appréhende la mauvaise nouvelle.
Le tracé des impulsions émises par le cœur apparaît sur le papier. Il s'en saisit pendant que je me rhabille.
Ses sourcils se froncent et je n'aime vraiment pas l'air inquiet qu'il arbore.

- Tu suis toujours ton traitement à la lettre ? S'enquit-il.

Je sais qu'il s'agit plus d'une affirmation que d'une question mais ça m'agace tout de même qu'il me la pose. Je ne suis pas folle au point de sauter une prise de médicaments.

- Oui, je réponds sèchement.

- Les essoufflements se sont intensifiés ces dernières semaines ?

- J'ai pas fait beaucoup d'efforts, je peux pas tellement vous dire.

- Bon, je ne vais pas te mentir, Hailey. Ta cardiomyopathie ne stagne pas, elle semble même s'aggraver un peu. Ne fais pas cette tête, me dit il en constatant ma mine défaite, on a des solutions et crois moi il y a des situations bien plus sévères. On va faire une épreuve d'effort, une échographie cardiaque et on va éclaircir tout ça, d'accord ?

Je vois bien qu'il essaie de me rassurer mais moi tout ce que je ressens en ce moment, c'est la grosse boule de peur qui se forme au creux de mon ventre.
Le cardiologue me demande de monter sur le tapis roulant puis augmente progressivement la vitesse. Pendant ce temps là, l'activité électrique de mon cœur et ma tension artérielle sont enregistrés régulièrement. Huit minutes s'écoulent avant qu'une douleur thoracique n'apparaissent et je sens peu à peu mon souffle faiblir. Au bout de dix minutes, Mr Harrison éteint la machine et me fait descendre de celle-ci.

Tandis que je me rhabille pour la seconde et j'espère, dernière fois, mon médecin analyse les résultats. Je me prépare mentalement au moindre choc émotionnel, à chaque rendez-vous il faut être prête à tout entendre.

- Très bien Hailey, prends place.

Il me désigne le fauteuil et je me laisse tomber lourdement sur celui-ci.

- Ça se présente comment ? Je demande timidement.

Docteur  Harrison passe une main dans ses long cheveux grisonnants puis ôte sa paire de lunette rectangulaire dont il aspire une des branches avant de les poser pensivement sur son bureau en marbre.
Il croise ses mains puis plante son regard dans le mien et je retiens ma respiration.

- La mauvaise nouvelle c'est que la cardiomyopathie hypertrophique à l'origine de ton insuffisance cardiaque persiste, malgré le traitement médical que tu suis. La bonne nouvelle, c'est que les symptômes sont moins alarmants que je l'imaginais et je pense qu'il existe une solution mais elle est chirurgicale.