Chapitre 33 : Les espoirs du nord

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Ils s'installèrent dans l'auberge où ils s'étaient donnés rendez-vous et Aymeric apprit que le reste de leurs compagnons n'étaient pas encore arrivés. Gébald et Hydronoé allèrent se reposer pendant qu'Aymeric et Zacharie se détendaient autour d'une bière dans l'ambiance calme et bourgeoise de l'auberge. Les quatre chevaliers dragons en mission chez les sylphes pointèrent le bout de leur nez deux jours après, aux premières lueurs de l'aube, alors que le demi-dieu commençait à trouver le temps long.
- C'était une bataille de tous les instants ! grogna Alaman avec une pinte à la main lors de son rapport. Les parents de l'espoir refusaient de nous laisser entrer. Nous avons presque supplié la reine à genoux pour qu'elle nous écrive une lettre leur ordonnant de nous laisser examiner leur fille ! Mais les parents de Lysange avaient raison. Au moins nous n'avons pas perdu notre temps. Bien, où est-ce que nous nous rendons à présent ? J'ai hâte que ça se termine pour qu'on passe à autre chose...
- Nous allons un peu plus loin dans le nord, le renseigna Aymeric tout en se demandant d'où venait réellement la mauvaise humeur de son frère d'arme. C'est le chef du clan des Yuls qui a prévenu le roide Ronto. Un espoir serait né dans sa tribu.
Alaman grimaça.
- Un problème ? s'enquit Zacharie.
- Les Yuls n'aiment pas beaucoup les Valseryes. Il faut dire que mon peuple a failli exterminer le leur par représailles alors...
- Nous serons prudents, lui assura le demi-dieu. De toute manière tu es un chevalier dragon, pas un Valserye. Nous partons demain soir. Alaman, il faudrait que tu ailles acheter des provisions pour le voyage. Zacharie, tu écriras au roi d'Alembras pour l'informer de l'avancée de la mission. Lysange, tu ferras la même chose pour Lisbeth et tu lui demanderas de donner des nouvelles en envoyant une lettre ici, à l'auberge. Nous repasserons par là à notre retour.
Ils s'éclipsèrent pour réaliser leur mission respective et Aymeric accompagna son meilleur ami pour lui prêter main forte. Il vérifia aussi que le rouquin allait bien, discrètement. Revenir dans le nord le perturbait toujours un peu. D'ailleurs, alors qu'ils déambulaient dans le marché, Alaman était moins bavard que d'ordinaire et répondait à peine aux sourires que lui adressaient les femmes. Aymeric s'apprêtait à le rassurer et à lui promettre qu'ils resteraient loin du territoire des Valseryes quand le rouquin déclara:
- C'est tout de même étrange que tu ais autorisé Lisbeth a rester avec le roi d'Hangaï.
- C'était son vœu et elle a des affaires à régler au sein du palais royal, expliqua Aymeric.
- Quel genre d'affaire ? demanda Alaman.
- Je ne suis pas autorisé à en parler à sa place.
Alaman replongea dans ses pensées et demeura silencieux jusqu'à ce qu'ils regagnent l'auberge et qu'il commence à faire les yeux doux à une serveuse, ce qui lui ressemblait déjà plus. Le soir du départ, le rouquin avait retrouvé le sourire.
- Il y a environ deux jours de vol jusqu'au territoire des Yuls. Leur campement change de place selon les saisons mais à cette période de l'année, nous avons plus de chances de les trouver du côté sud du lac gelé, dit-il à Aymeric. Je vais vous guider en ouvrant la voie avec Firenza.
Le duo prit donc la tête de l'expédition. Ils portaient tous la tenue d'hiver de la garde et après une journée de voyage, les températures étaient déjà glaciales. Ils ne volaient plus sans se couvrir le visage de baume pour éviter les engelures. Ils ne quittaient plus leur épaisse capuche ni leur écharpe remontée jusqu'au nez.
C'est la nuit que le froid était le plus terrible, surtout en plein ciel avec la vitesse et le vent qui s'engouffrait sous les vêtements. Aymeric grelottait après quelques minutes de vol et finissait gelé après deux heures. Il ordonna des pauses régulières pour qu'ils se réchauffent autour d'un feu et reprennent leur route dans de meilleures conditions.
Seuls Alaman et Firenza ne craignaient pas le froid. Ils progressèrent donc plus doucement que prévu mais c'était nécessaire pour le moral, et surtout la santé, de l'équipe. Même si son ami originaire du nord lui assurait qu'ils ne risquaient rien à voler durant le jour à cause de la faible densité de population des terres gelées, Aymeric refusa.
La discrétion avant tout dans cette contrée inhospitalière où les autochtones en quête de ressources au cœur de ce pays neigeux n'hésiteraient pas à les approcher pour les voler au moment propice, dragons ou non.
Ils se posèrent aux abords du lac gelé au milieu de la troisième nuit. Ils montèrent le camp sur le sol glacé plus dur que de la roche. Alaman alla puiser de l'eau et testa la fragilité de la glace du bout du pied.
- Elle est déjà assez épaisse par endroits pour supporter mon poids...Les premières neiges ne vont pas tarder. J'espère que les Yuls sont encore proches de la rive et qu'ils n'ont pas déjà levé le camp pour se réfugier plus au sud. Sinon nous allons devoir rebrousser un peu chemin.
Ils débutèrent les recherches le lendemain. Malgré ses réticences, Aymeric autorisa Ourania à voler pour repérer la tribu. Elle était la plus rapide mais aussi la plus discrète en plein ciel. Ils attendirent son retour au campement.
Chacun occupait le temps de façon différente pour tuer le temps. Zacharie faisait l'inventaire de ses plantes et remèdes, Lysange jouait aux cartes avec Hydronoé, Firenza et Aymeric tandis qu'Alaman sculptait un morceau de bois. La dragonne d'air revint deux heures après son départ, porteuse de bonnes nouvelles.
- Ils sont un peu plus haut mais ils commencent à démonter leur campement. Nous pouvons les rejoindre en volant, il n'y a aucune autre tribu sur le chemin : personne ne nous verra.
Cette fois, Aymeric accepta. Plus vite ils finiraient cette mission, plus vite ils pourraient se concentrer sur la troisième Nuit. Le trajet de jour demeurait aussi rude que celui de la nuit, avec quelques degrés en plus. La neige en contrebas aveuglait le demi-dieu depuis le ciel et il garda les yeux clos une longue partie du trajet.
Les Yuls ne se trouvaient pas loin, fort heureusement pour ses rétines ! De retour à terre, Aymeric ordonna aux dragons de rester à l'écart sous leur forme reptilienne pour ne pas dépenser de l'énergie inutilement et mieux résister aux températures glaciales, le temps qu'ils examinent l'enfant.
Alaman n'avait pas menti en évoquant une extermination des Yuls. On pouvait parler de famille plus que de clan. Il n'y avait que cinq huttes, quatre petites et une grande. Les membres du clan s'affairaient autour d'elles pour les démonter et les charger sur des traîneaux. Il devait y avoir cinq hommes, à peu près autant de femmes, et trois enfants. Un petit garçon emmitouflé dans un épais manteau les repéra et cria quelque chose dans sa langue. La seconde d'après, une dizaine de flèches les visaient.
- Aussi accueillant que ce que j'avais prévu, murmura Alaman.
Un homme d'une quarantaine d'années, qui bandait un arc plus imposant que celui de ses compagnons, se détacha de la foule. Il cria d'une voix forte pour couvrir les mètres qui le séparaient des nouveaux venus :
- Qui êtes-vous ?
- Des soldats de la garde d'Alembras, répondit Aymeric sans manifester une once d'anxiété. Nous venons pour examiner l'enfant que vous avez signalé comme espoir au roi de Ronto.
- Pourquoi y a t-il un Valserye à vos côtés ? Nous ne voulons plus que ces monstres approchent notre campement ! Ils sont déjà suffisamment actifs ces derniers jours...
- Mon ami ne fait plus partie de ce clan depuis des années. Mais si cela peut vous rassurer, je peux lui demander de s'éloigner.
- Non ! Je préfère le garder à l'œil, il ne faut jamais leur tourner le dos. Venez avec moi.
Il lâcha un ordre dans sa langue et les arcs se baissèrent. Après un dernier regard méfiant aux étrangers, les Yuls reprirent leurs occupations. Le chef les guida vers la gigantesque tente, la seule autour de laquelle personne ne s'affairait.
L'entrée était gardé par deux chiens qui tenaient plus du loup sauvage que des canidés apprivoisés prisés par les nobles pour chasser. Ils grognèrent à leur approche. Le chef les siffla avec mécontentement mais ils refusèrent de s'écarter. Au contraire ils s'approchèrent et les reniflèrent longuement avant de finalement reculer.
- Ils veillent sur le petit comme des louves sur leur portée, leur dit l'homme en soulevant un pan de tissu épais qui masquait l'entrée.
A l'intérieur il faisait chaud et sombre. Les braises d'un feu se consumaient au centre, dans un foyer. Un lit couvert de fourrures occupait un coin de la pièce, encadré de deux petites malles de bois. En dehors de cela il y avait peu de meubles ou d'objets. Juste une cuve en pierre remplie d'eau sur une planche en bois à même le sol avec quelques assiettes et pots en terre cuite à côté. Alors qu'Aymeric se demandait où était l'enfant, le chef des Yuls les invita vers le coin de la tente le plus sombre.
Le bébé n'avait pas de berceau et dormait sur un épais tapis de mousse séchée recouverte d'une pile de fourrures et de couvertures. Il reposait sous l'une d'elle, chaudement habillé. Et il n'était pas seul. Deux oiseaux et trois souris sommeillaient avec lui, une assemblée pour le moins étrange autour d'un nouveau-né.
- Le voilà. Comme vous pouvez le constater, il est sous bonne garde.
- Ce sont vos animaux ? demanda Lysange.
- Absolument pas. Les chiens sont bien ceux du clan mais en ce qui concerne les autres...Ils sont arrivés peu après sa naissance et refusent de s'éloigner de lui. Et comme les chiens, ils n'aiment pas beaucoup les inconnus. Ne le touchez pas si vous souhaitez conserver tous vos doigts.
- Dans ce cas est-ce que vous pouvez le prendre ? Nous devons regarder son dos, expliqua gentiment la sylphe.
Le chef obtempéra en conservant une moue contrariée. Pendant qu'il retirait délicatement les vêtements du bébé, Lysange l'interrogea:
- C'est votre fils ?
- En quelque sorte. Je l'ai adopté. Sa mère est morte en le mettant au monde et je la considérais comme ma sœur.
- Toutes mes condoléances, murmura Zacharie.
- La vie est ainsi. Tenez.
Il tendit le bébé à Lysange qui l'attrapa avec une extrême délicatesse. Aussitôt les oiseaux ouvrirent les yeux et les souris se réveillèrent en couinant. Comme prévu, le bébé avait la constellation du dragon dans le dos. Il n'était pas difficile de deviner en quoi consistait son don. Lysange le confia à son père adoptif qui s'empressa de le rhabiller et de le recoucher. Le petit n'avait pas bronché et se rendormit aussitôt, comme les animaux autour de lui.
- Si vous avez eu la confirmation que vous désiriez, partez. Je suis occupé.
Ils sortirent de la tente sans protester, puis du campement tandis que le chef retournait superviser le démantèlement des tentes. Ils rejoignirent les dragons qui attendaient au bord du lac en chahutant dans la neige comme s'ils avaient dix ans. Alaman s'étira et déclara :
- Bonne nouvelle, nous ne sommes pas morts et notre mission dans le nord est terminée ! Direction Hangaï !
Il grimpa sur le dos de sa sœur avec un sourire ravi aux lèvres quand Hydronoé, qui scrutait la surface du lac en plissant les yeux, leur signala :
- On dirait que quelqu'un court sur la glace dans notre direction.
Aymeric l'imita et distingua une silhouette qui se rapprochait en agitant les bras et en criant. Son instinct lui souffla que ce n'était pas une présence hostile alors il laissa l'inconnu venir à eux sans tirer son épée de son fourreau, à l'instar des autres chevaliers dragons qui se calquèrent sur son attitude. Bientôt ils discernèrent tous une chevelure rousse qui se détachait de la glace bleutée du lac.
- Alaman ! hurla une voix féminine un peu déformée par la distance.
Le rouquin ouvrit des yeux surpris. Il mit ses mains en porte-voix et hurla :
- Alya ?
- Alaman ! répéta la nouvelle venue en accélérant la cadence.
Un craquement se répercuta à la surface du lac. Après un moment de flottement, Alaman cria en agitant furieusement les bras :
- Alya, quitte le lac ! Quitte le lac ! C'est dangereux !
- Quoi ? dit la rouquine en pilant net. Parle plus fort, je ne t'entends pas !
La glace s'ouvrit sous ses pieds et le lac l'avala avant qu'elle puisse réagir. Alaman cria son prénom et sauta à terre. Avant qu'il se jette bêtement dans les eaux glacées, Aymeric et Zacharie le saisirent. Hydronoé reprit sa forme partiellement humaine en quelques secondes et se précipita pour sauter dans le trou qui s'était ouvert sous la jeune femme. Il disparut à son tour dans les eaux glaciales du nord. Les secondes qui suivirent furent longues. Seule la respiration hachée d'Alaman troublait le silence tendu.
Je l'ai ! hurla mentalement Hydronoé.
Il creva la surface peu de temps après son message et se propulsa dans les airs d'un puissant coup d'ailes, dispersant des gouttes d'eau dans son sillage. Dans ses bras une jeune femme rousse grelottait, recroquevillée et visiblement stupéfaite. Alors qu'il regagnait la rive sans la lâcher, Firenza préparait un feu grâce à ses pouvoirs et Alaman quittait sa cape. Hydronoé déposa la dénommée Alya près des flammes et utilisa ses pouvoirs pour attirer à lui toute l'eau contenue dans les vêtements de la jeune femme, pour qu'elle se réchauffe plus vite.
Il ne se soucia pas de lui alors qu'il était trempé jusqu'aux os. Ses longs cheveux bleus gouttaient mais il ne tremblait pas, insensible à l'humidité. Ses yeux dorés concentrés se détendirent une fois sa tâche achevée. Alaman se précipita et entoura Alya dans sa cape. Loin d'être traumatisée par cette expérience, la Valserye dit avec un sourire jusqu'aux deux oreilles :
- Vous êtes vraiment héroïques.
Sa remarque s'adressait surtout à Hydronoé et Firenza. En la regardant de plus près, Aymeric constata qu'elle ressemblait beaucoup à Alaman. Aucun doute : c'était bien sa petite sœur, qu'il avait rencontré pour la première fois lors de sa mission contre l'invasion des démons du désert. Alaman donna une petite claque à l'arrière du crâne de la rouquine.
- Toi alors ! Tu as le don pour sortir de nulle part et te mettre dans de sales draps ! On peut savoir ce que tu fais ici, si loin du clan des Valseryes, sur un lac à peine gelé ? On ne t'a jamais dit que c'était dangereux ?
- Je venais te voir, répondit-elle sur le ton de l'évidence.
- Et comment est-ce que tu savais quand je viendrais et quand je me trouverais ici ?
- Disons...qu'un bon ami à moi m'a prévenu. Ne me demande pas de qui il s'agit, c'est un secret très confidentiel ! Et puis je te l'ai déjà expliqué : j'adore être renseignée.
- Est-ce que notre mère sait que tu es ici ?
- Bien sûr que non, sinon ça ne serait pas drôle !
Elle éclata de rire devant l'expression déconfite d'Alaman et lui donna une claque dans l'épaule.
- Arrête de t'angoisser mon frère ! Je suis exactement là où je dois être. J'ai aussi une nouvelle pour vous, de la plus haute importance.
Son frère marqua une pause et demanda :
- A propos de quoi ?
- Des espoirs que vous êtes en train de chercher ! Il y en a une qui est née chez nous. Et je peux vous jurer qu'elle en fait partie : elle a la constellation du dragon dans le dos.
- Comment tu fais pour en savoir autant ?! s'écria son frère.
- Moins tu en sais, mieux c'est. L'enfant s'appelle Karen. Elle est née durant la lune de sang. Pour le moment elle ne manifeste aucun don particulier mais je n'ai pas eu le temps d'effectuer des observations approfondies : le devoir m'appelait ici.
A l'écouter parler, Aymeric commença à croire qu'elle était au courant pour la prophétie et qu'elle l'avait même déjà lu. Sauf que c'était impossible : les tablettes avaient quitté le nord depuis bien longtemps. L'espoir né chez les Valseryes faisait sans aucun doute partie des trois enfants encore non déclarés.
En temps normal Aymeric serait allé vérifié, pour ne pas s'appuyer uniquement sur les dires d'une inconnue, mais les Valseryes étaient imprévisibles. Le voyage d'Alaman aurait pu très mal tourner la dernière fois. Il ne pouvait pas risquer la vie des membres de son équipe inutilement, réincarnation ou pas. Il pesa le pour et le contre encore quelques instants avant de rendre son verdict.
- Très bien. Nous allons te croire, tu sais de quoi tu parles.
Une lueur reconnaissante passa dans les yeux noirs de la jeune femme. Puis elle déclara :
- En échange de cette information, je veux rentrer à Alembras avec vous.
- Tu veux quitter le nord ?! s'exclama Alaman.
- Ne fais pas cette tête surprise. Je t'en avais déjà touché un mot la dernière fois. Il est temps pour moi de découvrir de nouveaux horizons et de dire au revoir à la neige ! Alembras est là où je dois être. Si vous ne voulez pas m'emmener j'irais à pied. Mais vous savez ce qu'on dit des jeunes femmes qui voyagent seules sur les routes du continent...
Désespéré, Alaman pivota vers Aymeric. Ce dernier comprit que la décision lui revenait. Il soupira. La détermination d'Aylia brûlait dans son regard sombre et ses mains pâles serraient fermement la bandoulière de son sac de voyage en peau, plein à craquer. S'il décidait de la laisser elle irait à Alembras à pied, il n'en doutait pas une seconde. Elle paraissait aussi bornée que son aîné. Il dit :
- Très bien, tu as le droit de nous accompagner. En revanche nous n'allons pas regagner Alembras tout de suite et il faudra nous aider à réaliser certaines tâches lorsque nous camperons. Ça te va ?
La jeune femme bondit sur ses pieds et fit une révérence amusante accompagnée d'un «Oui chef !». Hydronoé reprit sa forme reptilienne sous les yeux admiratifs d'Alya qui ignorait superbement les remontrances de son frère. Ils reprirent leur voyage, avec une passagère en plus. Alya s'avéra très serviable et de bonne compagnie. Elle connaissait le territoire comme sa poche et se plaisait à raconter des histoires au coin du feu. Elle assommait souvent les dragons de questions à propos de leur nature et de leurs pouvoirs mais ils gardaient patience et répondaient avec amusement.
De manière générale, elle ne tenait pas en place. Sauf que là où son frère allait de femme en femme avec un regard de convoitise, ses yeux à elle se posaient tantôt sur une oiseau dans le ciel, tantôt sur une plante. Sa curiosité était sans borne. Quand elle apprit que Zacharie venait du désert, il devint sa nouvelle source de fascination. La couleur de sa peau l'intéressait particulièrement pour une raison que les chevaliers dragons ne cernaient pas exactement. Elle s'intéressa ensuite à Lysange et à sa chevelure blanche comme la neige. Et ainsi de suite. Chaque particularité suffisait à éveiller son intérêt. Quand ils entrèrent dans Ronto, elle s'écria :
- L'architecture est incroyable ! Comment font-ils pour créer ces portes en voûte sans qu'elles s'écroulent ? Il faut que je me renseigne...
Alaman leva les yeux au ciel. Il faisait mine d'être blasé par le comportement de sa petite sœur mais Aymeric le surprenait souvent à la couver d'un regard débordant de tendresse fraternelle. Ils se reposèrent à l'auberge le temps d'une journée. Aymeric s'attendait à ce que Lisbeth ait envoyé une lettre durant leur absence mais l'aubergiste affirmait n'avoir reçu aucune missive. Étrangement, cette absence de nouvelle ne le rassura pas. Il tâcha de ne pas trop y songer tandis qu'ils gagnaient Lanka à une allure soutenue.
La capitale était telle qu'ils l'avaient laissé, tout comme le palais royal, mais l'apparente quiétude des lieux s'arrêtait là. Le prince aîné les attendaient dans la cour, le visage tourmenté. Le mauvais pressentiment d'Aymeric s'accentua. Il descendit du dos d'Hydronoé et demanda aussitôt :
- Que s'est-il passé durant notre absence ? Où sont Lisbeth et Brazidas ?

Chevalier dragon : Tome 3 : Le crépuscule du mondeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant