Après cela, nous étions revenus sans dire un mot jusqu'à la maison de la vieille dame. En nous ouvrant la porte, elle nous avait hâtivement fait rentrer, barrant la route aux éléments tourmentés. Une fois dans le couloir vivement éclairé, grelottant de froid, je sentis enfin le soulagement m'envahir. J'avais réussi. Je l'avais retrouvé et ramené avec moi. J'en étais à peu près là de mes pensées quand une épaisse serviette me tomba dans les bras. La femme s'était précipitée vers Cub, silhouette inconsciente dans les bras de l'homme. Lessivé par les éléments, il semblait plus frêle que jamais.
- Mes pauvres enfants, murmura-t-elle en posant une main sur le front de Cub, une autre sur le mien. Vous êtes dans un état ! Thomas, frictionne-le pendant que je fais couler de l'eau chaude. Il est froid comme la pierre, j'espère qu'il ne sera pas trop malade. Quand à vous, jeune homme, vous devriez vous sécher et vous changer sans attendre. J'ai sorti des vêtements que j'ai mis dans la cuisine, ça risque d'être grand, mais si ça peut vous éviter une pneumonie...
Je hochai la tête.
- Merci infiniment pour tout ce que vous faites pour nous, soufflai-je, presque gêné face à toute l'énergie qu'elle consacrait à nous aider. Mais avant cela, je devrais prévenir les autres que je l'ai retrouvés. Puis-je emprunter votre téléphone de nouveau ?
- Bien sûr, bien sûr, allez-y ! s'exclama-t-elle avant de disparaître dans le couloir, sans doute pour aller dans sa salle de bain.
Je retirai ma chemise et la laissai pendre dans l'entrée. Le vêtement était tellement imbibé d'eau qu'il commença aussitôt à goutter. Je me séchai rapidement le haut du corps avant de m'envelopper dans la serviette pour me réchauffer un peu. J'avançai dans le couloir en direction du téléphone, laissant une flaque à chaque pas sur les tomettes de l'entrée.
Je dus m'y reprendre à deux fois pour composer le numéro à cause des tremblements incontrôlables de mon corps et de mes mains engourdies, et jetai un coup d'oeil inquiet à Cub, que l'homme avait déshabillé et frottait vigoureusement dans un immense drap de bain, s'arrêtant de temps en temps pour lui souffler dans le dos à travers le tissu.
- Allô, boucherie Curtis ? fit la voix de Winry.
- Winry, c'est Al ! On l'a retrouvé ! m'exclamai-je.
- Il l'a retrouvé, cria-t-elle à l'intention de ceux qui devaient être autour. Je suis soulagée que tu appelles, on commençait à s'inquiéter sérieusement pour toi, on n'avait pas de tes nouvelles depuis plus de deux heures, et vu le temps...
- J'avoue, je suis lessivé, fis-je en me doutant qu'elle avait remarqué que je ne pouvais pas m'empêcher de claquer des dents.
- Vous êtes où, là ?
- Chez une dame qui nous a accueillis, mais je ne connais pas son nom...
- Svena, répondit l'homme, en s'immisçant dans la conversation. On est au 15, allée de la Jetée.
- Merci ! répondis-je avant de répéter les informations à Winry.
- Apparemment, Izumi voit où c'est, elle vient vous chercher avec la camionnette. Restez au chaud en attendant.
- Avec plaisir, grelottai-je.
Je raccrochai, et me frottai de nouveau, encore gelé par le froid.
- Le bain est prêt ! annonça la femme - Svena - en passant la tête à l'angle du couloir. Tu me l'amènes, Thomas ?
L'homme hocha la tête et souleva son précieux paquetage pour la rejoindre, laissant de grandes traces de boue dans le couloir.
- Et vous, changez-vous ! Vous tenez tant que ça à attraper la crève ?
Elle disparut dans attendre ma réponse, et je ne pus m'empêcher de sourire. Ce mélange de politesse et de familiarité était touchant.
Seul dans le couloir, je retirai mes chaussures et mon pantalon, me retrouvant en caleçon, et m'enveloppai dans l'énorme serviette. J'étais peut-être ridicule, mais au moins, ce serait ça de moins à nettoyer pour notre hôtesse improvisée. Un peu réconforté par cette idée, je me dirigeai vers ce qui devait être la cuisine, et trouvai sur une chaise une épaisse chemise de laine à carreaux orange et verts et un pantalon en velours côtelé. C'était criard, vieillot et beaucoup trop grand pour moi, mais l'intention était louable, et au moins, je serais au sec.
Je cherchai un peu pour trouver les toilettes, retirai mon caleçon pour l'essorer au dessus de la cuvette, puis le séchai autant que possible en le tamponnant avec la serviette avant de le remettre, un peu à contrecoeur. J'enfilai la chemise, qui me tomba aux genoux et me réchauffa immédiatement, et en remontai les manches avant de mettre le pantalon qui était tout simplement immense. Même la braguette fermée, j'étais obligé que le tenir pour qu'il ne me tombe pas aux chevilles. Je retirai ma ceinture de cuir détrempé l'essuyai avec la serviette maintenant très humide avant de la mettre pour maintenir le pantalon qui fit de grands plis ridicules à la taille. Puis je me penchai pour replier l'ourlet jusqu'à ce que je retrouve mes pieds. Voilà, à défaut d'être présentable, j'étais — approximativement — sec.
Je repassai dans la cuisine, où Thomas, qui manifestement connaissait bien les lieux, avait mis de l'eau à bouillir, puis avançai vers la salle de bain, poussant la porte d'un geste hésitant.
La chaleur moite de la pièce me sauta au visage, et je vis la femme, penchée sur Cub qui flottait dans une eau fumante, à la propreté douteuse. Il avait les lèvres bleuies de froid.
- Comment va-t-il ? demandai-je d'un ton inquiet.
- Ça devrait aller, il se réchauffe bien, fit-elle en posant une main sur son front. Par contre, il est manifestement épuisé.
- Ça ne m'étonne pas, répondis-je simplement.
- Il est allé jusqu'à Yock à la nage, expliqua l'homme.
- Mais quelle idée ! Et vous, ça va mieux ?
- Oui. Merci pour les vêtements.
Le froid me collait encore à la peau, mais j'avais cessé d'avoir la chair de poule et de trembler convulsivement, ce qui n'était déjà pas mal.
Au bout d'un moment Svena et moi le sortîmes de l'eau, le séchâmes avant de lui enfiler une chemise au moins aussi laide que celle que j'avais sur le dos et de l'envelopper de plusieurs couches de couvertures, parmi lesquelles la femme glissa une bouillotte. Il remua mollement, nous regardant d'un air vague, et se détendit en me reconnaissant. Svena tendit la main vers le tas de couverture, m'incitant à me couvrir davantage, moi aussi.
- Tu te sens mieux ? demandai-je.
Il hocha la tête, et je souris, un peu rassuré.
Tout le monde se retrouva dans la cuisine, attablé devant une tasse d'infusion de thym qui nous réchauffa de l'intérieur. Cub était si abondamment empaqueté qu'on aurait dit que c'était les couvertures qui le maintenaient assis. Et pour être honnête, vu son état, il y avait des chances pour que ce soit réellement le cas.
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Bras de fer, gant de velours - Troisième partie : Dublith
FanficChamboulé par ses dernières découvertes, Edward décide de quitter Central pour retrouver Izumi et lui demander conseil, accompagné par Al et Winry. Pendant que l'équipe de Mustang démêle les conséquences de l'attentat du passage Floriane, Les deux...