Brandon courait.
Courait comme jamais de sa vie il n'avait couru.
C'était la course de sa vie.
S'arrêter n'était pas une option.
Vous me direz, seul un fou serait capable de penser qu'il parviendrait à rattraper un attelage.
Et vous auriez raison.
Brandon était fou. Fou de chagrin pour ce qu'il était sur le point de perdre, fou de haine envers le duc, fou... d'Anthéa tout entière. La perdre, ce serait se perdre lui-même.
Il avait bâti son existence autour d'elle, de sa joie, de son sourire, de ses yeux si lumineux qui semblaient éclairer sa vie, le sortir des ténèbres dans lequel il s'était plongé depuis qu'il était né.
C'était la première personne qui lui avait tendu la main. La première à l'avoir regardé avec un sourire aux lèvres. La première, et la seule, à avoir réussi à lui faire ressentir autre chose que cette haine envers ce monde qui le répudiait.
Elle lui avait appris à vivre... elle était sa vie. Elle était la personne qui le faisait vivre, elle était la personne qui faisait battre son cœur. Et il était sur le point de la perdre.
Le chemin tortueux de la forêt le ralentissait, des branches le griffait. Mais c'était sa seule chance.
Les mots qu'on avait eu de cesse de lui répéter tournant dans sa tête.
« Personne ne pourra jamais s'intéresser à toi, personne ne pourra jamais vouloir devenir ton ami, et surtout personne ne pourra jamais t'aimer ».
Les larmes dévalaient ses joues.
« Je t'aime Brandon ».
Il ne s'arrêtait pas de courir malgré la fatigue.
Alors qu'il approchait de la grande route, il entendit des martèlements de sabots. Son cœur fit un bond dans sa poitrine.
Il y était presque.
Il s'élança vers la grande route, la respiration saccadée.
Et là, il la vit.
La tête baissée vers ses genoux, il ne pouvait voir distinctement son visage. Mais c'était elle, il le savait, il la reconnaitrait entre mille.
Il s'engagea enfin sur la route.
Hélas, l'attelage lancé au petit trot allait bien trop vite pour lui. Il était épuisé, à bout de souffle. Et pourtant, il savait qu'il ne pouvait pas s'arrêter. S'arrêter, ce serait la perdre.
Alors, utilisant le peu d'air qu'il avait dans ses poumons, il cria, faisant s'envoler quelques oiseaux :
— Anthéa !
La seconde suivante, un aboiement se fit entendre, et la tête de la jeune fille sortait de la fenêtre, les mains agrippées à la porte. Et ce qu'il vit lui fendit le cœur.
Elle pleurait.
Mais ce n'était pas de petits sanglots qui dévalaient lentement ses joues. Non, ses pleurs étaient une véritable avalanche de larmes qui inondait littéralement son visage tandis que son corps était agité de soubresauts incontrôlés.
— Brandon !
Le cocher, ne comprenant pas ce qui se passait, avait ralenti l'allure des chevaux.
Anthéa tendit le bras vers Brandon, qui fit de même sans cesser sa course. Leurs mains allaient presque se toucher. Il vit une étincelle s'allumer dans le regard d'Anthéa.
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Dans son regard - Brandon
Historical FictionAngleterre, XIXe siècle. Ils n'étaient pas désirés, ils n'ont pas été aimés. En route vers la résidence de campagne de son père, la fille du duc de Bellington pense enfin entrevoir le bonheur. Si elle a perdu depuis longtemps l'espoir d'être aimé, A...