La tempête

Chapitre 45: Adrian

Marchant dans le couloir de son lycée, Adrian gardait la tête baissée. Sous les supplications de sa mère, il était de retour à son établissement scolaire depuis une semaine. Heureusement, quand il avait repris Marissa et Julie était déjà revenue. Liao avait repris quelques jours après. Si Adrian aurait pu, il ne serait jamais revenu mais il avait l'impression que sa mère commençait à en avoir un peu mare de lui et de son silence. Même si son médecin lui avait fait une prescription médicale, les journées restaient dures et éprouvantes. Ses professeurs lui avaient annoncé qu'il redoublerait son année de première, sans grande surprise pour lui après avoir manqué presque cinq mois de cours.

Le premier jour, quand il reprit, fut le plus dur. Regardé pour la première fois la place d'Azélie vide et ce pour toujours, les camarades de classe qui demandaient ce qui s'était passé et son état actuel, ses amis qui le regardaient avec pitié: tout ça était insupportable.
A son retour, les professeurs ont fait tous une minute de silence en l'honneur des disparus. Cette minute où il s'était retenu de fondre en larmes. Sur le haut du tableau de la classe de leur professeur principal, il avait marqué les noms de ces élèves que plus personne ne reverrait et en dessous de ces noms une phrase: "une personne chère ne nous quitte jamais... Elle ne vit au plus profond de notre cœur et pour la revoir, il vous suffit de fermer les yeux". Et deux heures ont été attribuées au professeur principal de chaque classe pour que les élèves puissent se recueillir et en parler. Durant ces heures, les élèves volontaires avaient dit quelque chose qu'ils aimaient chez la personne disparue qu'il souhaitait et chaque étudiant avait écrit quelque chose pour la personne décédée puis ils avaient brulé tous ces mots. Sur ce bout de papier, Adrian avait écrit: " Je suis tellement désolé, je ne te méritais pas. Je t'aime et ça pour toujours".

Il continuait de marcher dans ce couloir bondé de monde lorsqu'une voix l'appelant le força à se retourner. C'était Mr Litron, son professeur de SVT qui lui demandait de venir.

Adrian se déplaça jusqu'à lui en bravant les foule d'élèves, à contre-courant. Arrivé à la hauteur de son instituteur, celui-ci lui demanda d'entrer dans sa salle. Lorsque Adrian posa le pied dans la salle, une odeur de vinaigre l'assaillit sûrement dû aux expériences menées dans ce labo.

- Adrian, vous allez bien ? Demanda Mr Litre.

Adrian releva la tête rapidement et fit face à son professeur qui le détaillait du regard. Après quelques secondes de silence, Mr Litre reprit:

- Depuis que vous êtes revenu vous paraissez fatigué et vous ne suivez plus en cours. Quelque chose vous dérange ? Vous voulez en parler ? Vous savez, il y a des professeurs qui seront ravis de vous aider.

- Merci monsieur mais ça ira. Dit Adrian d'une voix où perçait l'épuisement. Bonne journée.

Sur ce, il sortit de la salle rapidement pour rejoindre Luc et Perle qui l'attendait sur un banc dehors. Il s'assit à son tour près de son meilleur ami et écouta leur discussion, muré dans un silence habituel, ces derniers temps. Il perçut du coin de l'œil Perle qui le regardait avec un mélange d'inquiétude et de tristesse. D'un côté, il mourrait d'envie de leur dire ce qui s'était passé mais il avait promis alors lorsqu'ils lui avaient demandé les détails de sa mystérieuse disparition, il s'était contenté de dire qu'il avait oublié, Luc et Perle n'avait plus redemandé depuis.

La sonnerie retentit les trois adolescents se levèrent et regagnèrent leurs classes respectives sans un mot. Lorsque leur professeur arriva, les élèves purent s'assoir et débutèrent par la suite le cours de mathématiques.

Adrian regardait la place inoccupée d'Azélie depuis bien une demi-heure sans suivre le cours sur les statistiques.
Plus il regardait cette chaise, plus il avait l'impression qu'elle allait rentrer dans la classe en s'excusant du retard, son magnifique sourire dissuaderait le professeur de la gronder et elle s'aspirateur sa chaise en regardant Adrian, d'un air qui le faisait craquer.
Pourtant rien de ceci arriva et la chaise devant lui resta vide. L'accablement se fit ressentir encore plus fort qu'il y a quelques minutes. Ses mains se mirent à trembler, sa vue se troubla par les larmes et il serra les poings en se focalisant sur la douleur que ça lui procurait pour empêcher les pleurs de franchir ses paupières. Plus rien ne pouvait le sauver de ce gouffre qui s'était ouvert sous lui le jour où il était retourné dans le présent, la douleur ne passait pas et rien de possible ne pouvait l'atténuer. Le temps défilait autour de lui alors qu'il était bloqué dans le passé, la possibilité qu'il puisse aller mieux un jour paraissait inaccessible. Son monde n'avait plus aucun sens et ses démons le hantaient sans interruption depuis cette seconde où il s'était aperçu de son oubli. Il n'était pas mort physiquement mais son esprit lui, n'existait plus, enterré dans le passé et ce pour toujours.