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Héloïse

Progressivement, les invités prenaient congé pour gagner leurs chambres préparées certainement à la hâte dans l'après-midi. Je ne savais pas comment Tristan s'était débrouillé pour organiser nos fiançailles le lendemain de son retour en ayant prévenu autant de nobles. Certains avaient plusieurs jours de voyage pour gagner Lectoure, comme le Comte et la Comtesse de Rodez par exemple.

Tristan me sortit de mes pensées en déposant un baiser sur ma tempe.

- Quand tu voudras te retirer, n'hésite pas à me le dire, murmura-t-il.

Il avait du voir la fatigue gagner mon visage. La nuit était déjà bien avancée et j'avais été levée à l'aube par mon charmant fiancé.

- Encore plusieurs minutes avant que je ne tombe de fatigue, répondis-je.

Tristan hocha la tête avant de se lever. Je le vis glisser quelques mots à une domestique qui s'empressa ensuite de quitter la salle tandis que Tristan reprenait sa place.

- Que lui as-tu dit ?

- Tu le sauras bien assez tôt, sourit-il.

Les minutes s'égrenèrent jusqu'à ce que finalement Tristan proposât que je fus accompagnée dans une chambre. Il confia cette responsabilité à Frédéric à ma plus grande surprise, je m'attendais à ce qu'il le fit lui-même pour nous permettre de passer encore quelques minutes de plus ensemble. Les rares invités encore dans la salle me saluèrent, chose à laquelle j'allais devoir progressivement m'habituer. Être ainsi le centre de l'attention était une nouveauté pour moi même si j'avais pu temporairement l'expérimenter lorsque nous étions à la Cour.

Tandis que nous progressions dans les couloirs vides, Frédéric brisa le silence.

- Je n'ai pas encore eu l'occasion de te remercier pour ta proposition.

- Tu le mérites. Tu as veillé sur moi comme un grand frère toutes ces années, c'est un juste retour.

- On parle tout de même d'un comté comme récompense, rigola Frédéric. Ce n'est pas rien, surtout que je l'ai fait en n'attendant rien en retour. Alors merci Héloïse.

Je lui souris et il déposa un baiser sur mon front. Puis il me désigna la porte devant laquelle nous nous étions arrêtés.

- C'est ici que tu dormiras, passe une bonne nuit.

Il fit demi-tour pour regagner la salle du banquet, certainement pour profiter encore un peu de la soirée, et qui sait, peut-être aussi observer ces nobles qu'il serait amené à côtoyer en reprenant la tête du Comté de Nevers. À condition que mon père acceptât.

J'ouvris la porte de ma future chambre et fus par deux fois surprise. Une première fois lorsque je reconnus la chambre de Tristan où nous nous étions rencontrés pour la première fois trois années auparavant. Une seconde fois parce qu'elle avait été préparée pour mon arrivée. Des bougies étaient allumées un peu partout mais plus particulièrement autour d'un bac en bois rempli d'une eau encore fumante. Alors c'était cela qu'il était allé demander à la domestique ?

Je m'avançai jusqu'au bac pour tremper mes doigts dans l'eau qui était toujours à la bonne température. J'attrapai ensuite un flacon déposé sur la desserte en bois disposée à côté et l'ouvris pour le porter à mes narines qui furent immédiatement envahies par une odeur de lavande. Tout avait été soigneusement préparé.

Je ne fus qu'à moitié étonnée d'entendre la porte s'ouvrir pour laisser passer quelqu'un. Tout aussi rapidement elle fut refermée et même barrée. Les pas s'approchèrent dans mon dos puis il s'immobilisa.

- Ma surprise te plaît ? Je me suis dit que tu aurais besoin de te détendre après cette longue journée.

Son souffle s'égarait dans mon cou, il était bien plus proche que ce que je pensais.

- Merci, répondis-je alors que je sentais sa main sur ma nuque.

Tranquillement, il défit le collier de parure que m'avait passé ma mère avant que nous ne venions au château. Il me débarrassa ensuite de la ficelle retenant la bague de mon père pour la poser en évidence sur un linge propre qui était soigneusement plié sur un tabouret. Ses mains s'égarèrent dans mon dos pour défaire le laçage du corset de ma robe et je soupirai de contentement en sentant ses lèvres contre la peau de ma nuque. Du bout des doigts, il fit glisser l'étoffe sur mes épaules et je me retrouvai en quelques secondes vêtue d'une simple chemise blanche, la robe à mes pieds. 

Je fis un pas en avant pour me dépêtrer du tissu puis envoyai valdinguer mes sabots. Dans la précipitation de notre départ pour le château, personne n'avait pensé à vérifier ce que je portais aux pieds. Et fort heureusement, personne n'était allé chercher dans quoi mes pieds étaient enfermés sous ma robe durant les fiançailles. J'entendis le rire de Tristan à cette découverte.

- Il n'y a vraiment que toi pour se retrouver dans cette situation.

Je me tournai vers lui et tout trace de rire disparut de son visage pour laisser place à une autre expression que j'avais déjà pu le voir arborer. A cet instant, il me désirait.

- C'est à ton tour maintenant.

Tristan me regarda, perdu.

- Déshabille-toi, ordonnai-je en rigolant de son air hagard.

Il ne se fit pas prier plus longtemps. En quelques mouvements rapides, il se retrouva seulement vêtu de ses braies me laissant tout le loisir de réellement l'observer dans son ensemble pour la première fois.

Il y avait cette cicatrice sur le flanc que j'avais déjà pu embrasser. Mais j'en découvris d'autres, plus fines et certainement dues à des ronces. Aucune arme ne laissait de marques autant estompées. Les bougies éparpillées dans la pièce paraient de reflets dorés les muscles de Tristan. Ses trois années de formation au combat avaient sans aucun doute développé sa silhouette, si bien que je réalisai que j'avais un homme devant moi et non plus l'adolescent de notre première rencontre.

Tristan s'avança jusqu'à moi, faisant se mouvoir les muscles sous sa peau. Je trouvai tout à coup ce spectacle fascinant, il y avait presque quelque chose d'animal à le voir faire. Ça me rappelait les mouvements puissants de certains chevaux.

Rougissante, je levai les yeux vers lui quand il se fut arrêté devant moi. Il en profita pour m'embrasser et je sentis ses mains passer sous mes bras. L'instant suivant, il me souleva et je ratterris les pieds dans l'eau chaude. À son tour, il pénétra dans le bac avec un sourire.

Je retirai la broche de mes cheveux avant de la pincer entre mes lèvres. Tristan m'observa silencieusement et presque avec avidité tresser ma chevelure. Je l'enroulai au sommet de ma tête et piquai à nouveau la broche dans ma coiffure pour la faire tenir tandis que le regard de mon fiancé s'égarait vers ma poitrine toujours dissimulée sous la chemise.

Il se saisit de mon poignet, y déposa un baiser brûlant puis me fis pivoter. Mon dos butta contre son torse et il s'assit dans le bain, m'entraînant avec lui dans l'eau chaude.

Héloïse ou Le double jeuOù les histoires vivent. Découvrez maintenant