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Tristan

- M'expliqueras-tu pourquoi tu étais prêt à provoquer en duel le Vicomte de Marsan, Tristan ?

Mon père m'observait tourner en rond sur le tapis de sa chambre. Mon père s'était affalé dans un fauteuil de notre suite dès notre retour après la fin de l'audience avec le Roi Charles VIII. Cela faisait peut-être une heure qu'elle s'était achevée et je n'avais pas décroché un seul mot depuis, ce qui intriguait fortement mon père. Mais mon esprit avait d'autres préoccupations que de lui faire la conversation. Le Duc d'Orléans avait interféré en la faveur de Héloïse mais rien ne me garantissait qu'il n'y avait pas une lourde contrepartie à payer. Trop lourde pour Héloïse.

- Parce que je refuse que Héloïse l'épouse. Nous savons tous les deux ce qui est arrivé aux femmes trop proches du Vicomte et plus particulièrement à ses précédentes épouses. Épouser cet homme est une lente mise à mort. De plus, Héloïse serait de celles à faire front, ce qui empirerait sa situation et pourrait alimenter la violence du Vicomte.

Mon père m'observa attentivement depuis son fauteuil.

- Es-tu sûr que ce n'est pas un autre sentiment que la compassion qui guide tes actions ?

Je me figeai et fixai l'actuel Comte d'Armagnac.

- Serait-ce un problème, Père ?

Mon père sourit doucement avant de se lever et de réajuster sa tenue.

- Je n'ai jamais prétendu que cela puisse en être un. Je te rappelle juste que je t'ai élevé et ce ne sont pas trois années passées loin de notre domaine qui m'empêcheront de continuer à te comprendre Tristan. Ce que je vois, c'est plus que de la simple compassion ou pitié. Aurais-tu des projets ?

Mon père s'était approché à quelques pas de moi et me fixait. Je le dominai de quelques pouces et ce depuis mes seize ans.

- C'est bien possible mais le Duc d'Orléans risque de s'y opposer après avoir fait comprendre que Héloïse est sous sa protection et qu'il lui choisira un mari.

- Rien n'est impossible pour un cœur amoureux, mon fils.

- Mais je ne suis pas am...

- À d'autres Tristan, à d'autres. Je te rappelle que je suis ton père et que je t'ai vu grandir.

Mon père tapota mon épaule avant de se diriger vers la porte de notre suite.

- Je dois bien admettre que Héloïse est une jeune fille tout à fait charmante, la Comtesse l'appréciait énormément. Je sors prendre la température après ce léger accrochage avec le Vicomte de Marsan. Essaye de ne pas t'attirer d'ennuis pendant ce temps là.

Mon père me laissa seul dans la pièce et je réfléchissais déjà à la suite de notre séjour. Peut-être devais-je tenter ma chance auprès du Duc d'Orléans. Rien ne me garantissait qu'il refusât ma requête. Je passais nerveusement mes mains dans mes cheveux en désordre, cette situation allait me rendre fou.

Quelques coups se firent entendre à la porte et je l'ouvris sur un visage familier.

- Entre Frédéric.

Il ne se fit pas prier et pénétra à l'intérieur de la suite que j'occupais avec mon père.

- Es-tu soulagé ? Demanda-t-il en s'asseyant sur le fauteuil que mon père avait quitté un peu plus tôt.

- Pas tant que cela, grimaçai-je. J'ai l'impression qu'elle sera quand même fiancée lorsque nous quitterons cet endroit.

- Cela ne m'étonnerait guère. Il n'a pas réussi à la garder au couvent alors il tentera sûrement de la marier pour être tranquille.

Héloïse ou Le double jeuOù les histoires vivent. Découvrez maintenant