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Héloïse

Je regardai la porte fraîchement verrouillée de ma chambre, mon corps encore tout perturbé par ce qu'il venait de se produire. Tristan avait compris que j'étais une fille et, alors que j'avais craint sa colère, sa réaction m'avait prise de court. Mon corps, ce traître, l'avait laissé disposer de moi comme bon lui semblait. Dire que je n'avais pas apprécié serait un mensonge, je ne pouvais ignorer le plaisir qu'il m'avait donné avec seulement ses doigts et pour preuve mon entre-cuisse était encore moite. Je soupirai en me levant du lit. J'étais coincée ici sans pouvoir atteindre mon père pour l'instant. D'un côté, cela me laissait le temps de récupérer de ma blessure mais de l'autre je craignais que mon père repartît avant que je n'ai pu le voir.

Le soleil commençait à se coucher et la lumière baissait dans la petite chambre. Je ne savais pas jusqu'à quand Tristan allait me garder enfermée ici, ni même s'il comptait me dénoncer. N'ayant rien d'autre à faire pour tromper l'ennui et la solitude, je repris la couture des broderies d'ornement sur le bas de ma robe. Une heure après que le soleil se fut couché, et alors que j'approchais de la fin de ma création, des pas se firent entendre dans le couloir. Je m'empressai de dissimuler ma robe dans mes affaires de voyage et de rabaisser ma capuche sur mon visage. Quelques secondes plus tard, la porte s'ouvrait alors que je faisais mine d'observer la nuit depuis la fenêtre. Un toussotement légèrement gêné se fit entendre et je me retournai vers le visiteur, après une hésitation. Tristan se tenait au milieu de la pièce, un peu embarrassé, avec une assiette de potage et un bout de miche de pain dans les mains.

- Je vous ai ramené de quoi manger.

Il posa le tout sur la petite table en bois avant de me fixer.

- Merci.

Je m'approchai du repas tout en le gardant à l'œil après m'être rendue compte que la dague se trouvait toujours sur le lit, hors de ma portée.

- Vous comptez me regarder manger ? L'interrogeai-je.

- Je ne compte pas repartir tant que je n'aurais pas tiré certains points au clair.

- Je vous écoute, répondis-je en observant ma soupe.

- Pourquoi avez-vous voulu vous intégrer à la garde provisoire de l'héritier du trône ?

Je me crispai.

- Je ne peux pas vous le dire, pas maintenant.

- Est ce que vous êtes une menace pour sa sécurité ?

- Non, j'ai bien trop besoin de lui pour souhaiter qu'il lui arrive malheur.

Je vis du coin de l'œil Tristan s'asseoir sur mon lit et attraper la dague qu'il fit tourner entre ses doigts.

- Et êtes-vous une menace pour ma sécurité ? Lui demandai-je à mon tour.

Il relève la tête pour croiser mon regard.

- Si c'était le cas, vous pensez réellement que vous seriez encore là ? Que vous ne seriez pas plutôt dans un cachot ou soumise à la question* ?

Je l'observai en silence en cherchant à le décrypter. Il détourna le regard pour le reconcentrer sur la lame entre ses doigts. Je n'arrivais pas à comprendre sa réaction : il découvrait une sorte de passager clandestin dans son régiment mais ne s'en inquiétait pas. Mon regard tomba sur ma soupe. Il ne s'inquiétait pas de mon cas peut-être parce qu'il comptait le régler de façon définitive avec ce repas. Je repoussai mon assiette ce qui fit relever la tête à Tristan.

- Vous ne mangez pas ?

Je secouai la tête et il s'approcha de moi.

- Vous vous sentez mal ? Un peu fiévreuse ? S'inquiéta-t-il.

Héloïse ou Le double jeuOù les histoires vivent. Découvrez maintenant