Tristan
Héloïse se tenait rayonnante devant moi. Depuis que nos fiançailles avaient été prononcées devant l'ensemble des invités, incluant tout le personnel du château, une lueur indéfinissable habitait ses prunelles. Je me penchai vers elle pour lui voler un baiser et ses deux mains s'agrippèrent à mes épaules pour me retenir contre elle.
Je quittai sa bouche pour l'observer. Ses lèvres étaient rougies après que je les ai embrassées, tout comme ses pommettes. Je me sentais étrangement fier d'être celui qui suscitait de telles réactions chez elle. Elle était sensible à la moindre de mes provocations.
Sa gorge pâle était dégagée grâce à la broche qui retenait ses cheveux en arrière et je ne pus résister longtemps à l'envie d'y poser mes lèvres. Les doigts d'Héloïse se resserrèrent sur mes biceps et ma fiancée souffla mon prénom d'une voix presque suppliante. Mais je m'écartai.
- Nous sommes attendus.
Héloïse me jeta un regard noir, me faisant bien comprendre ce qu'elle pensait de ma fâcheuse habitude de la frustrer. Je lui souris en lui tendant mon bras qu'elle ignora. C'était peut-être la fois de trop.
- D'accord, mais on fait vite, murmurai-je contre son oreille.
- C'est si facile de te faire plier...
- Et vous êtes si facile à émoustiller, ma chère fiancée.
Elle frissonna sous mes doigts qui parcouraient la peau douce de son cou.
- Redis-le, me sollicita-t-elle.
- Ma chère fiancée, répétai-je en glissant une main sur le devant de sa robe.
Mes doigts parcoururent l'étoffe qui couvrait son buste, cherchant les points les plus réceptifs à mes caresses. Malheureusement, je n'allais pas pouvoir poursuivre mon exploration bien longtemps.
- Tristan ? Héloïse ? Le Comte m'envoie vous chercher, votre absence ne passe pas inaperçue... annonça Frédéric de l'autre côté de la porte.
- Tu vois ? Nous sommes attendus, taquinai-je Héloïse avant de déposer un baiser sur son front alors qu'elle faisait la mou.
J'ouvris la porte et tendis mon bras à ma fiancée. Elle le saisit sous le regard soupçonneux de son frère qui nous jaugeait avec attention. Bien mal lui en aurait pris de faire une remarque sur notre retard. Il se contenta de passer devant nous pour parcourir quelques couloirs jusqu'à la salle où se déroulait le banquet et dont l'écho des voix, chants et musiques résonnait jusqu'à nos oreilles.
Notre apparition laissa place à un silence chez les invités avant une vague de félicitations. De longues minutes nous furent nécessaires pour gagner les places qui nous étaient réservées au centre. En plus de domestiques et de la famille adoptive d'Héloïse, étaient présents les nobles avec lesquels notre Comté avait le plus d'interaction. Sauf concernant le Vicomte de Marsan, pour des raisons évidentes, bien qu'il fut un voisin, il n'avait pas reçu d'invitation. Et il n'en recevrait pas non plus le jour de notre mariage, c'était un détail auquel je me jurai de veiller personnellement. Et comme mon père avant moi, je préserverai ma Comtesse de sa présence entre nos murs. Ainsi que nos enfants.
Surpris par le fil que prenaient mes pensées, je me tournai vers Héloïse qui s'en sortait parfaitement bien avec les salutations d'usage avec les derniers nobles qui nous empêchaient de gagner nos places. Héloïse prit aimablement congé du Comte et de la Comtesse de Rodez tandis que je détaillai sa silhouette. Une hâte me prit soudain à l'idée de la voir s'arrondir pour porter nos enfants qui empliraient de cris de joie les murs du château un peu plus tard.
- J'ai l'impression que tu m'observes comme un faisan rôti, marmonna Héloïse.
- Tu es bien plus appétissante que cela. Tu veux des enfants ?
Elle faillit manquer la chaise tant ma question la prit par surprise alors qu'elle s'asseyait à mes côtés. Elle tourna la tête vers moi et je pus observer ses yeux encore écarquillés mais également ses pommettes roses.
- Je n'y avais jamais réellement songé. Je suppose que oui s'ils ne sont pas envoyés au couvent puis mariés aux premiers venus.
Ma main se posa sur sa cuisse et elle détourna les yeux de son inspection de la salle qu'elle avait débuté juste avant de me répondre.
- Je garderai mes enfants avec nous, je ne suis pas ton père. Et il a fait cela pour te protéger. Tu n'as même pas passé un mois à la Cour et pourtant quelqu'un a voulu te faire brûler vive.
Héloïse baissa la tête en se mordillant la lèvre.
- Je le sais. Mais même si j'ai eu tout l'amour d'une mère de la part de celle de Frédéric, je n'ai pas eu celui d'un père.
- Je serai là pour nos enfants, n'en doute pas.
Elle me sourit et déposa furtivement un baiser sur ma joue avant de se tourner vers son assiette. Les musiques s'enchaînèrent, les plats se succédèrent et les discussions ne se tarissaient pas. J'avais certes vécu des soirées beaucoup plus fastueuses que celle-ci mais jamais en aussi bonne compagnie. La femme à mes côtés suffisait à rendre cette soirée inoubliable. Le vin, bien que coupé à l'eau, dans le verre de ma fiancée était responsable de ses joues rougies et des ses doigts qui s'égaraient beaucoup plus facilement qu'auparavant.
De plus, sa langue se déliait même sur des sujets politiques ce qui aurait pu amener à une catastrophe mais je fus ravi de savoir qu'elle serait amplement apte à s'occuper du Comté avec moi. Elle laissa le Seigneur d'Albret muet de stupéfaction face aux arguments qu'elle avait avancés. Le pauvre ne sut quoi répliquer, gardant sa bouche entrouverte sous son épaisse moustache, ce qui lui valut une tape amicale de la part du Comte de Rodez.
Même si ce milieu n'était pas le sien et qu'elle n'était pas forcément à l'aise, elle n'en montra rien et tout le monde put apprécier sa vivacité d'esprit même après quatre verres. Ou bien cinq. Discrètement, j'indiquai au serveur qui s'occupait de nos verres de se contenter de servir du jus de raisin à ma fiancée. Je ne savais pas ce qu'elle pouvait endurer et elle ne semblait pas se méfier.
Quand l'occasion se présenta, je la tirai hors de table pour partager une danse et je savourai une fois encore sa présence contre moi. J'avais tout pour être un homme comblé avec Héloïse dans mes bras.
- Je suis heureux avec toi, soufflai-je à l'oreille d'Héloïse.
Sa prise se resserra autour de mes mains et elle chercha mon regard pour me répondre.
- Moi aussi Tristan.
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Héloïse ou Le double jeu
Historical FictionAutant vous prévenir de suite, il y aura bien une demoiselle en détresse mais pas de dragon, pas de marraine la bonne fée ni de chevalier servant. Quant au noble qui doit épouser la demoiselle en détresse à la fin de l'histoire... c'est un Vicomte m...