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Tristan

Le soleil commençait à illuminer le ciel et l'intérieur de la chambre. J'étais réveillé depuis un moment à cause de la légère gêne que provoquait ma blessure à la cuisse mais je n'avais pas encore eu la force d'abandonner Héloïse dans le lit. Elle dormait toujours, la tête calée contre mon épaule et son corps blotti contre mon flanc. Finalement, je me résolus à quitter notre couche pour m'approcher de la fenêtre en veillant à ne pas réveiller Héloïse. Elle avait besoin de sommeil après m'avoir veillé plusieurs jours en attendant que je fusse suffisamment en forme pour me débrouiller seul. Tout était encore calme dans la cour du château : des domestiques se dirigeaient tranquillement vers les cuisines pour préparer le premier repas à servir au réveil du Duc, deux écuyers se rendaient aux écuries pour nourrir les montures et les soldats qui avaient effectué le tour de garde durant la nuit étaient relevés par une autre unité. Je quittai ce spectacle apaisant des yeux pour les poser sur Héloïse. Appuyé contre la fenêtre, je l'observai dormir. Ses cheveux clairs accrochaient les premiers rayons du soleil, lui faisant une couronne dorée, et son visage était paisible. Sa poitrine se soulevait doucement sous le drap de coton. Je me perdis dans sa contemplation et quelques coups discrets frappés à la porte m'en sortirent. Je m'en approchai.

- Cessez de toquer, murmurai-je, vous allez réveiller mon valet.

- Messire, c'est Adélaïde, le médecin me fait vous apporter de quoi soigner votre plaie.

- Repassez plus tard, mon valet dort pour l'instant et je ne vais pas le réveiller pour qu'il me fasse mes soins.

- Mais... vous ne voulez pas m'ouvrir pour que je dépose les onguents ?

Je soupirai et appuyai ma tête contre le bois de la porte. Les longs cheveux étendus sur l'oreiller ne laissaient aucun doute quant à l'identité de mon valet et je ne pouvais pas laisser une autre personne percer à jour Héloïse.

- Non, si vous ne voulez pas repasser mon valet ira les chercher quand il sera levé.

- Bien Messire. Navrée de vous avoir dérangé et je repasserai plus tard tout de même.

Les pas s'éloignèrent dans le couloir derrière la porte et j'allai m'asseoir sur le bord du matelas. Il me fallait réveiller Héloïse avant qu'il ne soit trop tard afin qu'elle puisse rattacher ses cheveux et remettre son bandeau en place autour de sa poitrine. Je remis la mèche de cheveux qui tombait sur son visage derrière son oreille et laissai mes doigts caresser sa tempe et sa joue pour la sortir doucement du sommeil. Ses cils papillonnèrent sur ses joues claires avant de s'ouvrir pour me laisser observer deux iris d'un vert-gris qui me transperçaient à chaque fois.

- Bonjour, murmura-t-elle.

Son corps frissonna et j'ôtai mes doigts de sa peau, sachant que nous n'avions pas de temps à perdre.

- Adélaïde est passée, elle voulait apporter des onguents mais je ne lui ai pas ouvert, annonçai-je tandis qu'Héloïse se redressait sur ma couche. Il est temps de vous faire disparaître pour laisser place à Elliot si vous ne voulez rien risquer.

Elle posa ses pieds sur le sol frais et attrapa le tissu qui était resté à terre depuis que je l'y avais fait tomber dans la nuit.

- Pourriez-vous vous retourner ? Me demanda-t-elle les joues rougissantes.

Je lui obéis pour lui laisser un peu d'intimité et le silence de la pièce fut seulement percé par les bruits d'étoffe. Puis je sentis les mains d'Héloïse glisser sur mes épaules avant de venir se poser sur mon torse et son visage se cala contre mon dos.

- Je n'ai pas envie de sortir de cette chambre, chuchota-t-elle.

- Pourtant il le faut si vous voulez vous débarrasser du Vicomte de Marsan... Où vit votre père ? Si vous le souhaitez, je peux vous aider à le convaincre.

Héloïse ou Le double jeuOù les histoires vivent. Découvrez maintenant