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Bonne année à vous ! Je vous souhaite le meilleur pour 2021

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Tristan

Cela faisait deux semaines que j'étais contraint et forcé à me comporter comme l'ombre du Duc d'Orléans. Les tensions s'apaisaient certainement grâce aux bals qui distrayaient les membres de la Cour mais nous ne pouvions oublier la virulence de certains propos encore tenus à l'égard du Roi et de tous les membres de sa famille seulement une dizaine de jours plus tôt. Et pour cette raison, le Duc ne m'avait toujours pas permis de regagner mon Comté alors qu'il s'agissait de ma seule hâte. D'autant plus qu'à mon plus grand malheur certaines femmes me prenaient à nouveau pour un parti envisageable puisque tout le monde pensait ma fiancée décédée dans de tragiques circonstances.

Les femmes de la Cour pouvaient se montrer tenaces pour obtenir ce qu'elles désiraient et j'en faisais les frais. Elles venaient rôder autour de moi pendant les soirées, vêtues de parures et toilettes valant une fortune, exposant bijoux et pierres précieuses comme si l'argent allait me décider à en choisir une pour remplacer Héloïse. Je semblais être devenu le meilleur parti de la Cour depuis que Louis d'Orléans m'avait choisi parmi bon nombre de prétendants pour épouser sa protégée.

- Avez-vous écouté un seul des mots que je viens de prononcer Messire d'Armagnac ? Asséna le Duc en me sortant ainsi de mes rêveries.

- Je m'excuse votre Altesse, mon esprit était loin d'ici.

Le Duc me fixa intensément par dessus son épaule et j'attendis le moment où il allait me rabrouer. Mais il n'en fit rien à mon plus grand étonnement.

- Il était chez vous, n'est ce pas ? À s'interroger sur ce que doit être en train de faire ma fille en ce moment ? Je sais que vous séparer alors que je venais juste de vous accorder sa main n'était pas la meilleure solution, mais c'est le père qui parle. L'héritier du trône, lui, sait que garder l'un des meilleurs combattants auprès de lui pour assurer sa protection était la seule solution envisageable.

Voir le Duc me montrer sa compassion pour ma situation, alors qu'il s'appliquait à être froid et distant avec tous ceux qui l'approchaient depuis que la chambre d'Héloïse avait brûlé, était assez déroutant. Sa main serra un instant mon épaule puis il poursuivit son avancée dans l'un des nombreux couloirs du château d'Amboise. Je lui emboîtai le pas, la main toujours sur le pommeau de mon épée.

- Serait-ce impoli de vous demander de répéter ce que vous avez formulé lorsque mon esprit vagabondait Votre Altesse ?

- Je venais de vous informer que je comptais retourner à Orléans dans trois jours et que vous serez ensuite libéré de vos engagements. Vous allez enfin pouvoir rentrer chez vous. Ici tout est rentré dans l'ordre et je dois regagner ma place dans mon château, ce qui par ailleurs vous arrange Messire.

Je ne pus cacher ma joie mais, fort heureusement, le Duc me tournait le dos et ne put donc voir le grand sourire qui prit place sur mon visage. Une semaine de plus et je serai auprès de ma fiancée, dans le château de mon père.

Le Duc poursuivit son chemin et nous atteignîmes un salon où plusieurs membres de la Cour étaient déjà assemblés en cette fin d'après-midi pluvieuse. L'orage grondait au loin, ce qui n'était guère étrange à cette saison.

Après avoir répondu aux salutations et courbettes qui lui étaient adressées, le Duc d'Orléans prit place dans un fauteuil en velours à rayures vertes et jaunes et je demeurai debout juste derrière lui, à sa gauche. Une servante lui servit un verre de vin et les conversations reprirent tout naturellement dans la pièce. Les femmes forçaient leur rire et les hommes avaient les mains baladeuses. Je ne supportais ces mondanités que parce que je savais que je ne serais plus forcé d'y assister longtemps, sinon il y a un moment que j'aurais fui le château d'Amboise.

Héloïse ou Le double jeuOù les histoires vivent. Découvrez maintenant