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Héloïse

Frédéric me dévisagea et je me sentis mal à l'aise face à son regard scrutateur.

- J'ai fini par la reconnaître, me devança Tristan. Je suis le seul au courant, ne t'en fais pas. Mais il faut décider de ce qu'on fait pour le Vicomte de Marsan.

Je pris l'initiative de les interrompre.

- On peut en parler à l'abri des oreilles indiscrètes ? Murmurai-je en jetant nerveusement des regards aux domestiques qui vaquaient à leur occupation autour de nous dans la cour du château.

Frédéric approuva et nous suivîmes Tristan à l'intérieur du château jusqu'à sa chambre.

- Est ce qu'il est au courant pour ton père ? Me chuchota Frédéric tandis que nous marchions côte à côte quelques pas derrière Tristan.

- Il ne sait pas de qui il s'agit. Je ne suis d'ailleurs entré en contact qu'une seule fois avec lui et je pense qu'il a compris qui j'étais.

- Tu as pu lui parler du problème du mariage ?

- Non, il est parti précipitamment à cause d'un pillage par un groupe de brigands dans un des villages de son duché, non loin d'ici. Ensuite ils sont revenus et Tristan était blessé et...

Je m'interrompis en repensant à tout ce qui s'était passé dans la chambre de Tristan et je sentis mes pommettes me brûler. Frédéric s'arrêta au milieu du couloir et me dévisagea en fronçant les sourcils.

- La dernière fois que je t'ai vue aussi rougissante Héloïse, c'est quand je t'ai surprise en train d'essayer d'embrasser le fils du boulanger quand tu avais huit ans. Qu'est ce qu'il s'est passé ?

- Elliot !

Je me retournai et observai avec soulagement Adélaïde s'approcher de nous. Elle venait de m'éviter de devoir répondre aux questions gênantes de mon frère.

- Je suis passée ce matin pour déposer des onguents pour la blessure de Messire d'Armagnac mais il m'a dit que vous dormiez encore et il a refusé d'ouvrir la porte de sa chambre. Donc je venais vous les déposer à nouveau.

Je sentis le regard de mon frère peser un peu plus sur moi et je sus que je n'échapperais finalement pas à un interrogatoire. Adélaïde me tendit un petit pot en céramique contenant le cataplasme avant de faire demi tour en souriant.

- Est ce que j'ai bien compris ? Il sait que tu es une fille et tu as passé la nuit dans la chambre de Tristan ? Demanda Frédéric furibond dès que Adélaïde fut suffisamment loin pour ne pas nous entendre.

- Je... oui mais je suis son valet aux yeux de tous. C'était mon rôle de veiller sur lui pendant sa convalescence.

Frédéric rejoignit d'un pas agressif la chambre de Tristan où celui-ci nous attendait, accoudé à la fenêtre. Mon frère claqua la porte derrière moi et la verrouilla avant de se jeter sur Tristan.

- Mais qu'est ce que tu fais Frédéric, lâche le !

- Pas avant qu'il ne m'ait répondu. Est ce que tu as touché à ma sœur ?

Je déglutis en observant nerveusement les deux hommes se faire face.

- Qu'est ce que tu entends par la toucher ? Tu veux parler du moment où je l'ai portée jusqu'à sa chambre pour soigner la blessure causée par une flèche pour que personne ne se doute de ce qu'elle cachait ? Ou de la fois où je l'ai invitée à danser au banquet du Duc d'Orléans pour qu'aucun autre homme ne l'approche alors qu'elle n'en avait pas envie ?

Les poings de Frédéric se resserrèrent autour du col de la chemise de Tristan qui venait sans peut-être s'en rendre compte de le provoquer.

- Relâche-le s'il te plaît ! Suppliai-je mon frère en posant ma main sur son bras. Il ne m'a rien fait que je n'ai voulu, tu le connais et tu sais que c'est un homme de confiance contrairement au Vicomte de Marsan qui reste notre vrai problème. Et non Tristan !

Héloïse ou Le double jeuOù les histoires vivent. Découvrez maintenant