Chapitre 10

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J'avais demandé au taxi de me déposer un petit peu plus tôt pour pouvoir marcher et me vider l'esprit. Ce jour-ci, Birmingham était ensoleillé, et les rayons du soleil frappaient sur les vapeurs fumantes qui émanaient des maisons, de telle sorte que cela créait une atmosphère toute particulière.

Pour l'une des premières fois depuis mon arrivée, je me sentais réellement bien dans cette ville. Je me sentais enfin chez moi.

Cependant, pendant ma petite marche, mes pensées fusèrent vers Ada. Et son frère. Je savais qu'Ada était entre de bonnes mains et que ses jours n'étaient plus en danger mais je ne pus m'empêcher de m'inquiéter pour elle. Je ressentais la peine qu'elle traversait et j'espérais du fond du cœur qu'elle puisse un jour trouver la paix suite à la mort des deux hommes qui avaient partagés sa vie.

Quant à Thomas, la réaction qu'il avait eu m'avais laissée sans voix. Certes, il était normal qu'il soit bouleversé, mais je ne l'avais jamais vu dans cet état. Habituellement, il gérait chaque situation minutieusement et dans un calme absolu. Il ne s'éparpillait jamais, ne dévoilant jamais rien. Mais la panique que j'avais saisit dans son regard m'avait glacé le sang. Cet effroi qu'il avait arboré dévoilait la perte de contrôle qui s'emparait de lui, et cela m'effrayait plus que sa froideur habituelle. Si Thomas Shelby pétait les plombs lui aussi, cela signifiait que rien de bon n'était à présager.

Je rejoignis mon appartement sous les coups de 15 heures de l'après-midi. Je pris le temps de me débarbouiller dans la salle de bain car mon maquillage avait coulé le long de mon visage. Je changeai de tenue également car elle était couverte de saleté, et j'enfila une nouvelle robe.

Une fois cela accomplit, je me dirigeai vers mon bureau et saisit le combiné en face de moi. Il était urgent que j'informe mes supérieurs des évènements passés, et surtout de la mort très douteuse de Ben Younger. Ce politicien s'était certainement fait des ennemis, et ceux-ci pouvaient peut-être être en lien avec Oswald Mosley. L'interlocutrice décrocha à l'autre bout du fil et me dirigea vers mon correspondant.

-    Bonjour Monsieur.

L'homme derrière le téléphone était un agent du gouvernement prénommé Chester Campbell. Il était le fondateur de l'organisation dont je faisais partie. En effet, suite à la montée des mouvements extrémistes au sein du pays, les membres du gouvernement en avaient conclu qu'il était nécessaire d'envoyer certains agents surveiller ces partis douteux afin de prévenir leur arrivée au pouvoir ou en cas d'urgence et de nécessité tout mettre en œuvre pour trouver une preuve qui pourraient les éliminer définitivement. L'attentat qui avait tué Ben Younger était justement l'élément parfait qui pouvait être rattaché au parti politique d'Oswald Mosley si nous trouvions une preuve de son implication plus ou moins proche et qui permettrait de mettre fin à sa carrière. C'est pour cela que la plupart des agents envoyés étaient en réalité des agentes. Il est prévisible qu'un homme haut placé et intelligent se laisse difficilement approcher. Mais quand il s'agit d'une personne du sexe féminin et qui plus est plutôt jolie, ceux-ci baissent plus facilement leur garde s'ils tombent sous leur charme. Il est bien connu que les femmes sont la plus grande faiblesse des hommes et que les faiblesses des hommes font la force de ces dames.

-    J'attendais votre appel.

Lors de nos échanges, une règle impérative régnait : celle de ne jamais dévoiler aucun nom, pas même les nôtres. Il était courant que les conversations téléphoniques puissent être écoutées, et dévoiler de telles informations ferait courir trop de risques quant à ma sécurité et au bon déroulement de notre mission. De plus nous devions rester le plus vague possible, au cas où.

-    Je suis au courant de la situation, j'en ai été informé ce matin.

Mon interlocuteur faisait référence à la mort de Younger.

-    Pensez-vous que cela ait un lien avec lui ?

Je désignais évidemment ce cher Mosley.

-    Je l'espère. La victime était très respectable et luttait fermement contre ses idées. Pour vous mettre dans la confidence, il nous renseignait également sur ses agissements, au même titre que vous. Je pense qu'il l'avait découvert. Sa voiture n'a pas été piégée par hasard. C'est pour cela que vous devez vous montrer très prudente quant à ce que je vais vous demander de faire.

-    Je vous écoute.

-    Le seul moyen de prouver son implication est que vous dérobiez des documents.

-    Quelle sorte de documents ?

-    Nous savons qui a posé la bombe et il s'agirait des membres d'un gang du nord de l'Ecosse, dont je tairais le nom, vous savez pourquoi. Je vous le transmettrais par télégramme.

-    Qu'est-ce qu'un gang écossais aurait en rapport avec lui ?

-    Avant l'accident, notre défunt ami nous a transmis des informations concernant des transactions douteuses qui auraient eu lieu entre lui et ces criminels. Rien d'officiel et rien de très captivant. Mais maintenant que nous savons que ce sont ces mêmes types sont responsables de cette tragédie, tout devient tout de suite plus intéressant. Si vous parvenez à trouver des preuves concrètes le reliant à ces transactions cela pourrait prouver son implication indirecte avec ce qui s'est passé ce matin. Des relevés bancaires, c'est ce qu'il nous faut. Il a bien du payé ces gars pour ne pas se salir les mains.

-    Savez-vous où je peux trouver cela ?

-    Je ne peux pas faire le bouleau à votre place, mais logiquement nous pensons que ces dossiers doivent se trouver dans son bureau professionnel. C'est le lieu le plus sûr et le mieux gardé. Nous ne pensons pas qu'il risquerait de conserver de telles informations chez lui.

J'écoutais très attentivement ses paroles, sans chercher à le couper.

-    Vous nous apporterez tout à Londres quand vous les aurez. On viendra vous chercher chez vous.

-    Je vous enverrai un télégramme pour vous informer de quand ce sera fait.

-    Faites attention à vous et ne tentez rien de stupide, restez prudente.

Mon interlocuteur raccrocha. La situation était désormais très claire mais très risquée. Je me demandai comment j'allais réussir à dérober des documents qui n'existaient peut-être même pas, sans attirer les soupçons sur moi.

Le télégraphe mes côtés se mit en marche et interrompu mes pensées. L'appareil effréné recracha le papier aux bouts de quelques secondes. Je le saisis dans mes mains et je lu le message qu'il contenait : « Billy boys ».

Tout le monde connaissait ce nom, celui du gang redoutable qui sévissait au nord de l'Ecosse. Ses partisans n'étaient pas des tendres et étaient impliqués dans de nombreuses affaires de vols, contrebandes et de meurtres. Quoi que Mosley ait pu manigancer avec ces types, cela n'était pas clair et j'étais déterminée à découvrir la vérité.

Cependant, il fallait que je réfléchisse méthodiquement et que je monte un plan sans failles afin de ne pas me mettre en danger. Et cela n'allait pas être simple. La première étape de celui-ci me conduisait directement à la Chambre des Lords.

NB : l'agent Campbell dans cette histoire n'a jamais eu de soucis avec Thomas comme dans la série. C'est juste un agent du gouvernement qui souhaite obtenir des informations sur Mosley.

Le prix à payer - PEAKY BLINDERSOù les histoires vivent. Découvrez maintenant