Chapitre 7

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Elyo

Ce soir, j'ai réussi mes lâchers de barre. À l'époque, je faisais ça sans problème. Je tournais à toute vitesse sur la barre fixe puis je la lâchais pour la rattraper après une figure dans les airs. Je n'en suis pas encore là, ce sont de simples lâchers de barre mais je suis fier de moi.
Je suis peiné que ce soir Asha ne soit pas là pour voir ce que j'aie pu faire. Je suis sûre qu'elle aurait été fière de moi. Gabriel m'a prévenu qu'il lui avait dit que ce n'était pas nécessaire de venir car on allait être soi-disant concentrés. Et c'est vrai. Cependant, j'aime voir que je l'impressionne. Cette sensation me manque. J'ai toujours été le premier, celui sur qui on prenait l'exemple. J'ai ramené des prix.
Je suis fier de mes amis qui progressent vite. Pendant que je suis terrifié. J'ai peur de ne plus aimer le sport qui me fait vivre depuis mes quatre ans. Juste parce que je ne suis pas sûr de retrouver mon niveau. En soit, j'ai mon niveau. C'est juste moi, le problème. J'ai peur.

FLASHBACK :

— Et toi Elyo ?

Je lève la tête vers la femme qui dirige ce putain de club thérapeutique. Les personnes assises en cercle me regardent avec de grands yeux. D'autres se rongent les ongles ou fixent le vide. Cette salle me donne envie de tout sauf parler. Certains tableaux qui sont accrochés aux murs me font peur.

— Quoi moi ?

— Oh aller, sois plus agréable Elyo... On est ici pour t'aider, me dit-elle tendrement.

Plus agréable ? Tout le monde ici a envie de mourir. Cette ambiance morbide me casse les couilles à un point inimaginable. J'aurais préféré rester dans ma chambre.

— Je dois répondre à quoi ? je marmonne en me redressant.

— Elodie disait à quel point ses problèmes avec la nourriture lui faisaient du mal. Au point de se suicider. Je te demandais alors...?

— Ce que me provoquait mes problèmes avec la nourriture ?

La femme acquiesce. Je regarde Elodie au bord des larmes. C'est une jolie femme. Elle doit avoir seize ans. Ses cheveux roses m'ont fait rire la première fois que je l'ai vu. En fait, la plupart des gens qui sont ici ne me donnent pas l'impression d'être malheureux. D'apparence, ils ont tous l'air parfaits.

— Je tiens déjà à m'excuser de parler de mon point de vue après le tien Elodie car... J'ai pas de problème de boulimie... Et ça doit être très dur. Je m'excuse car....

— "C'est pas aussi grave que moi" ? Elyo, c'est pas grave. Ta parole peut aider d'autres gens dans la pièce, me rassure Elodie.

Son sourire me fait du bien. J'ai vraiment l'impression d'être une merde ici.

— J'ai d'abord arrêté de manger sans le vouloir. J'avais pas faim car quelque chose n'allait pas. Et, je me suis rendu compte qu'avec quelques kilos en moins... Je pouvais faire plus en gymnastique. Plus de figures, augmenter mon niveau de difficulté. J'étais devenu obsessionnel avec le fait de devenir le meilleur. Pour rendre mon père le plus fier possible avant qu'il s'en aille.

J'appuie mes coudes sur mes genoux en reprenant mon souffle. En vrai, il y a tellement plus de détails que cela mais je n'ai pas envie d'en parler.

— En soit, sur le moment, mes problèmes avec la nourriture n'en étaient pas. J'étais même heureux. C'est juste maintenant qu'ils me rendent malheureux. Quand j'ai perdu connaissance quelques jours avant le championnat de France. Alors, ce que ça peut me provoquer... C'est juste de la haine. De la haine car si j'avais pas fait le con, je serais encore Champion de France à la barre fixe ou bien au sol.

Le saut des angesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant