Le saut des anges

Chapitre 40

Elyo

Ce soir, je suis déjà au gymnase aux côtés de me coéquipiers. Je suis très triste d'avoir quitté Asha quelques heures plus tôt. Elle n'a pas voulu que je parte, c'était délirant de voir à quel point mon cœur se déchirait de plus en plus lorsqu'elle me regardait peinée. Nos pleurs ont longtemps résonné dans sa nouvelle maison. J'avais l'impression d'être qu'un pauvre petit garçon. Je lui ai répété un nombre incalculable de fois que je l'aimais. Elle m'a embrassé des centaines de fois en seulement quelques minutes et je suis partie avec le cœur en miette.

J'aime cette fille plus que tout et c'est très difficile de gérer la distance. Quelque part, ça me rend plus fort et plus compétiteur. Asha m'a demandé de réussir et de tout déchirer. C'est alors ce que je fais, j'ai enchaîné des multiples acrobaties sur le sol car je compte tout miser à la barre et au sol pour les compétitions sur agrès.

Je remets de la magnésie sur mes mains avant de recommencer mon enchaînement. Mon regard s'attarde sur Gabriel posté à côté de la barre fixe. Il semble vouloir s'exprimer mais reste silencieux. Je fronce les sourcils — m'avance pour sauter et attraper la barre. Mes ampoules sur les paumes de mes mains me brûlent de douleur, je me mords l'intérieur des joues avant de me balancer pour pouvoir faire des soleils autour de cet agrès. Je prends énormément de vitesse pour pouvoir lâcher la barre et effectuer un salto dans les airs avant de la rattraper. Quand tu es gymnaste, il est rare les fois où on hésite avant de faire quelque chose, il est primordial de ne pas se déclencher des blocages qui peuvent nous empêcher de faire des figures par peur. Ça s'appelle « la perte de figure », perdre tous ses repères dans l'espace et ta vision devient noire. Ce genre de phénomène arrive à n'importe qui n'importe quand même quand la figure est maîtrisé à la perfection. C'est ce qui bloque certains gymnastes à reproduire des acrobaties par peur que ce phénomène recommence de nouveau.

Personnellement je n'ai jamais peur, généralement je préfère faire la chose à fond peu importe si je me brise la nuque sur un élément. Je vis pour ce sport.

Je prends une dernière inspiration avant de prendre une accélération pour effectuer ma sortie en double salto carpés. J'atterris sur les pieds sans un pas à côté, ça signifie piler. Je serre le poing fier de moi et les applaudissements de Gabriel me fond sortir de ma bulle de concentration, j'avais oublié qu'il me surveillait. J'enlève mes maniques et les rangent dans mon sac alors que j'entends des pas arrivés vers moi.

— Tu es brillant ces derniers temps, conclut Gabriel.

Je souris timidement en le remerciant d'une simple poignée de main. Nous restons silencieux alors que les ressorts du praticable résonnent dans toute la salle sur le passage au sol d'Annabelle.

— Ça t'a fait du bien de voir Asha ?

— Tu n'imagines même pas à quel point, je ne donne même pas place à une seule défaite.

Gabriel tape mon dos en rigolant.

— J'ai hâte de te voir sur ce putain de podium.

— À tes côtés, je finis sa phrase.

Mon meilleur ami se gratte l'arrière de la tête et m'offre un sourire malicieux.

— Crois-moi Elyo, je ne vais pas te laisser gagner.

— C'est ce que je souhaite Gabriel, crois-moi si tu deviens Champion de France, je serai si fier de toi, tu le mérites, j'affirme.

Je n'ai aucun le droit d'être jaloux de mon meilleur ami et de sa réussite. Avant quand je sortais à peine de mon centre, il se trouve que oui, je pouvais être envieux. Maintenant, je ne le suis plus car j'ai appris que ce n'est pas en enviant des personnes qu'on est prêts nous même à devenir ce qu'elles sont. Le but, c'est de donner le meilleur de soi-même quitte à être meilleur que l'exemple sur lequel on s'appuyait. Aux championnats je donnerai le meilleur et je ne compte pas recevoir une seule défaite. D'un côté, je crois que je suis toxique envers mes propres attentes car je sais très bien que si je ne réussis pas, je me finirai par me détester.