Rouxroue se réveilla lentement, avec un mal au crâne intense. La douleur s'estompa en quelques minutes, et c'est là qu'il remarqua quelque chose d'anormal. Il faisait absolument noir, partout. Il ne discernait pas la moindre lumière, et il ne sentait aucune odeur familière. S'il en croyait ses pattes, il marchait sur de la roche métamorphique. Lorsqu'il s'était endormi la veille, il campait dans une savane, avec deux de ses amis. L'aurait-on enlevé ?
-Hé oh ! Cria-t-il.
Le dragonnet put entendre l'écho de sa voix se réverbérer sur de multiples parois, s'éloignant de plus en plus de lui.
-Axus ? Houxe ? Appela-t-il. Est-ce que vous êtes-là ?
Personne ne lui répondit. Il était bel et bien seul. Il paniqua. Il s'envola tout en criant le plus fort possible et se cogna la tête contre quelque chose de pointu. Il retomba dans de l'eau tiède. Après avoir été calmé par le choc, il en but un maximum, puis sortit de l'eau. S'il voulait survivre, il n'avait pas le choix : il devrait avancer et essayer de retrouver son chemin.
Rouxroue se secoua pour faire partir l'eau. Il perçut ensuite une forte chaleur sur sa droite, vraiment intense. Celle-ci l'attira. En général, qui dit chaleur dit sécurité, non ?
Le dragonnet crachait de temps en temps de petites flammèches violettes pour illuminer son passage. Il était dans une sorte de couloir rocheux qui virait à présent à gauche. La température s'envola à un point qu'il n'aurait pensé être capable de supporter indéfiniment ; mais il se sentait bien, au milieu de cette fournaise.
Le chemin montait à présent, et il lui semblait bien apercevoir une lueur vacillante à son bout. Rouxroue se hâta, profitant de la chaleur ardente qui en provenait. Il put voir une immense cavité au bout de la grotte. A l'instant où il y pénétra, la chaleur fut telle qu'il tomba au sol.
Il se redressa avec d'immenses difficultés. Le dragonnet tenait à peine sur ses six pattes. Il remarqua qu'il s'enfonçait dans la roche, qui était étrangement visqueuse. Lorsqu'il leva la tête, il resta sans voix. Une éblouissante lumière blanche émanait du centre de la cavité ronde. Rouxroue se trouvait à côté d'un soleil !!! Il rêvait d'arriver à approcher le Soleil. Une fois, il était parti de chez lui sans prévenir personne, et avait tenté d'atteindre l'astre. Il eut volé, en ligne droite, vers le haut. Hélas, il avait beau s'épuiser, voler toujours plus haut, se battre davantage pour l'atteindre et voir jours et nuits s'enchaîner, il n'a nullement eu l'impression que le Soleil fut plus proche que lorsqu'il avait initié son périple. Pourtant, dès qu'il baissait la tête... Toutes ces terres qui s'étendaient à perte de vue dans toutes les directions... ... Il n'avait jamais songé à ce qui se trouvait au-delà de ses contrées.
Plus il montait, plus il discernait des paysages lointains. Cet étonnement compensa pendant un temps la frustration et la fatigue qu'il éprouva. Au bout de quatre jours, il commençait vraiment à ne plus en pouvoir. Toujours aucun changement côté ciel. Parfois il traversait des nuages, parfois un vent violent, mais le Soleil, lui, ne se rapprocha jamais. Le dixième jour, complètement exténué, accablé par la fatigue, la soif et la faim, il ne parvint pas à continuer. Il avait la volonté, mais il avait tellement mal partout. Il se laissa chuter. A cet instant, il crut entrevoir une ombre fondre juste au-dessus de lui, mais il n'y avait rien. Commençait-il à devenir fou ?
Le dragonnet tenta une dernière fois de serrer le soleil entre ses serres, puis tomba dans les pommes.
Quelques temps plus tard, il s'était réveillé, toujours en pleine chute. Ses yeux lui piquaient et ses ailes, courbaturées, le tiraillaient. Il essaya tout de même de les entrouvrir, et remarqua que le paysage avait drastiquement changé. Il ne pouvait observer qu'un territoire beaucoup plus étroit qu'avant sa chute, et celui-ci se rétrécissait de plus en plus vite à un point qui en devenait vertigineux.