Chapitre 30

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Le dîner est délicieux, la légère musique de fond est agréable et puis, la main d'Isaac nichée sur ma cuisse sous la table alors qu'il converse avec ses collègues comme si de rien était est excitant. Kat n'est pas installée à la même table que nous et quelquefois, je croise son regard ennuyé alors qu'un homme tente d'engager la conversation avec elle. J'aurais bien aimé l'aider, mais la bulle qui me fait flotter au côté d'Isaac est trop épaisse pour que je puisse m'en échapper, ou même l'envie.

Je me retrouve pourtant à nouveau comme une plante verte, mais je m'en fiche. Je tiens fermement la main d'Isaac contre ma peau, après qu'il l'a glissé sous ma robe, caressant la peau intérieure de ma cuisse du bout des doigts. Mon corps entier est excité, le désire, tout autant que mon cœur et mon âme tout entier. J'ai presque envie de grimper sur ses genoux et y rester logée toute la soirée. Mais je reste sérieuse et garde un sourire poli sur mes lèvres tout en hochant de temps en temps la tête quand des regards se posent sur moi.

Parfois, c'est Isaac qui me lance un regard langoureux et tout mon corps frissonne et je retiens de gémir de frustration. Je suis à deux doigts de le traîner dans les premières toilettes disponibles pour l'embrasser jusqu'à mourir asphyxié. Même si, d'après son regard, je n'aurais pas vraiment à le traîner, il courra aussi vite que moi.

Je suis bien forcée de quitter ma bulle lorsque je sens une douce main me toucher le bras. Le regard que je croise est emplie de bienveillance et de douceur. La femme de Carl est assise à mes côtés et depuis que je l'ai rencontré, je ne peux pas cesser de la voir comme une maman douce et gentille, tout comme je vois Carl comme un papa gâteau et tout câlin.

- Ma puce, tu veux un peu de vin ?

- Non, merci, souris-je. Je n'aime pas ça.

- Tu n'aimes pas ça ? S'insurge-t-elle avec un petit rire. Comment c'est possible ?

- Un mauvais souvenir.

- Ah ! Le vin peut être traître, c'est vrai. Une grosse cuite, j'imagine ?

- Tu as vu juste, ris-je en hochant la tête.

- La jeunesse, roucoule-t-elle. Que ça peut me manquer !

- Qu'est-ce que tu racontes ? Tu es encore jeune. Tu as quoi ? Trente ans ?

- Vilaine flatteuse, rit-elle. Mais tu as raison, je suis encore jeune. Dommage que je sois mariée avec un vieux, en revanche.

À cette remarque, Carl se tourne vers sa femme et écarquille les yeux.

- Toi, jeune ? Ne te moque pas de moi. Tu as deux mois de plus que moi, madame-je-veux-être-jeune. Tu es la vieille de la famille.

- Saloperie, éclate-t-elle de rire. Tu n'es pas censée être en pleine discussion ?

- J'entends quand on ment derrière mon dos.

Elle lui tire la langue et je ris en les voyant agir aussi naturellement, même en plein repas professionnel. Isabelle, la femme, est une dame adorable et m'a mis à l'aise dès notre rencontre, il y a une petite demi-heure. Elle me fait rire, me conseille, me parle, m'occupe l'esprit alors que je n'ai qu'une envie : quitter cette salle et m'enfermer avec Isaac dans notre appartement jusqu'à mourir.

- Retourne à ta discussion, je parle avec Cléo. Elle, au moins, trouve que je fais jeune.

- C'est peut-être ça le mensonge que j'ai senti derrière mon dos, s'amuse Carl. Cléo, on sait tous les deux que tu la vois comme une vieille !

- Arrête de la gêner, rit Isabelle en attrapant gentiment ma main.

- En tout cas, je pensais que Carl avait au moins dix ans de plus que toi, Isabelle, finis-je par dire en levant innocemment les deux mains en l'air.

K.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant