Chapitre 13.

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Shōyō

  Purifier Tadashi de la malédiction que son père lui avait jetée demandait du temps. Comme il était jeune et que Shōyō n'avait jamais opéré sur un être humain, ils préféraient tous deux avancer doucement.
  Hinata lui expliquait tout au fur et à mesure, lui parlait d'autres malédiction dont il avait été témoin, malédictions enfermées dans des dents de mammouth fossilisées ou dans les fondations d'une maison. Hiro avait décelé la plupart d'entre elles, et il lui avait minutieusement enseigné les méthodes pour les lier ou les détruire. Aucune de ces solutions ne leur convenait et, naturellement, ils ne pouvaient arracher de son dos la rune noire en forme de chandelle.

  Ce jeudi-là, Shōyō se contenta de l'examiner. Tadashi resta allongé au soleil sur le ventre, torse nu, à l'intérieur d'un cercle de sel. La rune s'étendait sur tout le bas de son dos comme une araignée aux pattes déployées, toute en courbes complexes et angles nets. Son père avait dû le lier avec des cordes ou l'assommer pour pouvoir exécuter ce dessin. Hinata ne posa pas la question à Tadashi et il ne lui révéla presque rien sur son père. Il lui assura néanmoins que ces marques ne descendaient pas plus bas que ses hanches, et le rouquin fut soulager d'apprendre que son père, bien que diabolique, n'était probablement pas pervers.
  Kōshi ne quittait pas la maison. Shōyō se demandait si la vue d'un jeune garçon victime de la magie lui rappelait des souvenirs de lui-même et de Jun qu'il préférait oublier.
  Shōyō fit une copie exacte de la rune et nota tout ce que Tadashi lui racontait de ses sensations quand on la touchait ou quand il traçait autour d'eux le cercle de sel protecteur, ce qui le faisait grimacer. Pour le soulager, Shōyō piqua son doigt et ils enfouirent son sang dans la terre avant la séance.
  Ce soir-là, alors qu'ils n'avaient pratiquement rien fait de la journée, Tadashi était épuisé. Vendredi, ils avaient donc délaissé leur travaux pour une tâche moins absorbante, mais plus immédiatement gratifiante : cuisiner.
  Tadashi se révéla être un excellent assistant, très doué pour rouler la pâte et très attentif à la chaleur du four. Il aida Kōshi à préparer des tartes, des petites tourtes à la viande pour les corbeaux et deux plateaux de gâteaux roulés à la cannelle. Kōshi en fût attendri et prit un plaisir visible à lui parler de la magie naturelle de la cuisine.

- Là, les métamorphoses opèrent sans l'intermédiaire du sang et des incantations, lui confia-t-il en adressant un sourire à Shōyō.

  Ce dernier ne lui donna raison qu'à contrecœur. Il utilisait du sang pour ses préparation culinaires, mais c'était pour l'élaboration de sorts, non pour des aliments. Il confectionnait des petits gâteaux de blé assaisonnés de lavande et de rue qui procuraient des rêves agréables et chassaient les allergies, et des pastilles contre la toux à base de laiteron bouilli mélangé à du miel. Il faisait sécher des racines d'échinacée sauvage pour le thé et préparait des macérations d'huile contre les douleurs et les fièvres. Dans toutes ces préparations, Shōyō versait des gouttes de sang pour accélérer leurs effets. Ses recettes étaient infaillibles. Il n'avait pas à surveiller le temps : le parfum suave du laiteron bouilli à point, le crépitement des feuilles de chêne séchées comme il convenait et un soupçon de miel sur sa langue l'avertissaient que tout était prêt.
  Il avait aidé Hiro et Granny à confectionner des charmes le plus clair de son existence. Dès qu'il sentait l'odeur de la farine et du sang mêlé d'herbes, il allumait la vieille radio de Granny, réglée sur une station jouant du jazz à son époque. Il ne chantait pas à l'unisson, mais la musique l'aidait à chasser la nostalgie qu'il avait d'eux.
  Tadashi mordit dans l'une des tartelettes aux framboises dont la confiture coula sur son menton, et soudain, un souvenir revint à Shōyō : sa mère caressait son menton du doigt pour essuyer une coulée de miel poisseuse, mettait son doigt dans sa bouche et le suçait avec un sourire.

- Allons-nous-en d'ici, mon chaton, disait-elle, et, balayant de la main les protestations de Granny, elle l'entraînait dans sa chambre à l'étage. Sa valise était ouverte au pied du lit, car elle dormait toujours avec lui pendant ses séjours ici, lovée autour de son fils comme une carapace de tortue.

Blood Lovers || Kagehina Où les histoires vivent. Découvrez maintenant