Blood Lovers || Kagehina

Chapitre 26.

  Comme Yasuo, parti moins d'une heure après l'arrivée de Mayumi, n'était toujours pas rentré, nous avons passé tout l'après-midi ensemble, toi, moi et elle.
  À ma grande surprise, vous êtes restés à la maison. Tu as montré à Mayumi nos petites marques de sang sur les rebords de fenêtres, qu'un simple mot chuchoté chargeait de pouvoir pour faire circuler la brise dans toute la maison. Elle battit des mains, ravie, et chercha à améliorer le procédé - le rendre permanent par quelque sacrifice supplémentaire, ou autonome en le réglant sur la lumière du soleil ou les courants d'air. Ce n'était qu'une conversation sur l'usage pratique de la magie, mais vous exultiez comme deux enfants.
  Je commençais à comprendre de quoi il retournait : Mayumi était obsédée par le sang, par le pouvoir qu'il recelait, comme jamais je ne l'avais été ni ne le serais jamais. Pour elle, c'était l'alpha et l'oméga, une fin en soi. Pour moi, cela n'avait jamais été qu'un instrument, même si cet instrument était un catalyseur de beauté. Elle tenta à plusieurs reprises de m'entraîner dans leur conversation, mais je répondis avec un haussement d'épaules qu'un bon ventilateur au plafond remplirait le même office. Je réagissais ainsi par perversité et par désir de me distinguer d'elle, même si c'était contraire à ta volonté.

  Vous avez passé toute la journée à discuter, à rire et à tracer des plans gigantesques sur un rouleau de papier que tu avais rapporté de l'écurie. Je vaquais à mes tâches à la maison, au jardin, pétrissais de la pâte et faisais infuser de la lavande. Quand je me suis préparé du thé et vous en ai apporté un pot, j'ai eu la surprise de trouver Mayumi accroupie à côté d'un dessin complexe représentant un cercle magique. Des larmes délayaient son maquillage, qui ruisselait sur ses joues, et tu lui parlais doucement.

- Il reviendra quand il aura retrouvé la paix, disais-tu.

- Il a oublié tout le plaisir de l'existence, Hiro, a-t-elle sifflé entre ses dents.

  Je suis sortie de la pièce à reculons, mais trop tard : elle m'avait vue. Ses yeux bleus étincelaient. Elle nous a dévisagés tour à tour, puis elle a souri.
  Jamais je n'aurais pu deviner ce qu'elle avait en tête.