Chapitre 35.

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Tobio

  La journée fut très longue parce qu'il avait mal dormi et subi les grognements de ses chiennes le matin quand il les avait nourries. Il était incapable d'oublier les lèvres retroussées de Havoc. Il fut trop occupé à rattraper son retard en cours, sans oublier les examens qui devaient avoir lieu la semaine suivante, pour traîner dans les couloirs ou même déjeuner à la cafétéria. C'est seulement après la dernière sonnerie qu'il retrouva Matty au vestiaire. Il lança une vanne sur son interdiction de sortie. Quand Tobio lui raconta qu'il avait vu Hinata Shōyō, il lui donna une claque sur l'épaule et le traita d'agent secret, ce qui était parfaitement absurde, comme à peu près tout ce qu'il disait. Matty refusa de le laisser partir avant qu'il lui aie donné plus de détails. Tobio l'emmena vers le terrain d'entraînement et lui servi une version condensée, revue et corrigée de sa rencontre avec Shōyō et de la raison pour laquelle ils se voyaient. Matty déclara qu'ils devraient tous les quatre aller au cinéma, lui, Tobio, Shōyō et Shanti, dès que sa punition serait levée.
  Tobio espérait de tout son cœur que d'ici là il serait débarrassé de cette malédiction, pour avoir une chance de convaincre Shōyō que c'était une idée géniale.
  Alors qu'ils arrivaient en plein soleil, Tobio remarqua que Matty observait son visage. Il se souvint alors du rouge de ses iris et lâcha un « Merde, je suis en retard ! » avant de s'esquiver vers le parking. Si la couleur du sang était presque invisible sous un éclairage artificiel, le soleil semblait concentrer sa lumière sur elle comme un projecteur.

  Shōyō lui téléphona juste au moment où il passait la porte de la maison. Tobio lui dit bonjour avec un sourire et coinça le téléphone entre son oreille et son épaule tout en attrapant une tasse dans la cuisine. Shōyō lui annonça que tout serait prêt le lendemain pour son rituel de purification. Tobio l'informa alors qu'il était privé de sortie.

- Hum ! Eh bien, en attendant, bois l'infusion. Je trouverai bien un moyen. Je te tiens au courant.

- Est-ce que je dois... ?

  La tonalité du téléphone le coupa.
  Cette interruption soudaine ne fit rien pour améliorer son mal de crâne.
  Il sorti sa tasse d'eau fumante du micro-ondes : Kaito lui allongea une bourrade dans l'épaule.

- Hé, qu'est-ce qui te prend à boire ce thé ? dit-il.

  Tobio haussa les épaules et laissa tomber le petit sachet de Shōyō dans sa tasse.

- Rien, j'aime bien le goût.

- Avant, tu étais accro au café comme nous tous, observa Kaito en se dirigeant vers le réfrigérateur pour en sortir une canette de soda.

  Il s'adossa au plan de travail et jeta à Tobio son regard d'officier supérieur qui passe ses troupes en revue. Immobile, les bras croisés, Tobio tenait le menton légèrement baissé pour l'empêcher de le regarder droit dans les yeux.
  Ils restèrent ainsi jusqu'à ce que Tobio repêche le sachet pour le jeter dans l'évier.

- Allons boire dehors, décida Kaito en désignant du menton les portes en verre coulissantes donnant sur l'arrière-cour.

  Il prit sa tasse, l'entraîna et referma la porte derrière lui en poussant presque Tobio sur les marches en béton.
  Il s'assit sur la plus haute, les jambes étendues devant lui, tendit son infusion à son frère et ouvrit sa canette de soda.

- Bon Dieu, tu sens ce parfum dans l'air ? C'est vraiment l'été ! J'ai hâte qu'il pleuve !

  Tobio le rejoignit à contrecœur, en détournant les yeux du chenil, avec un grognement en guise de réponse. En effet, les montagnes d'Afghanistan devaient être bien arides comparées au Japon en mai.
  Pendant un instant, aucun d'eux ne prononça un mot. L'orage qui couvait avait commencé à chasser le plus gros de la chaleur et de l'humidité, si bien qu'il ne faisait pas trop lourd. Pour l'instant, il n'y avait qu'un peu de vent et quelques nuages qui masquaient la lumière du soleil. Tobio s'imagina fonçant à travers eux vers le soleil. Le vent sifflait très fort à ses oreilles.

Blood Lovers || Kagehina Où les histoires vivent. Découvrez maintenant