53- Face à face avec le Monstre

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Solar

Je dois piéger Taeju comme il l'a fait avec Yeri et Felix mais pour cela, il faut qu'il croit avoir les cartes en main. Le seul moyen est de jouer la victime.

Après quelques directives supplémentaires, je rejoins les autres au salon, en boudant ostensiblement tandis que mes amis déambulent parmi les convives bruyants. Je repère immédiatement le jeu des sportifs qui consiste à isoler la proie désignée. Malheureusement pour leur effet de surprise, je suis la cible et ces requins assoiffés de sexe se mettent à me tourner autour pour m'écarter et m'empêcher d'appeler à l'aide. Le verre que je tiens les aide dans leurs démarches puisqu'ils doivent m'affaiblir par l'alcool et le petit supplément. Ayant déjà vécu une scène similaire, je sais que tout commence par ce contenant.

— Hey. Miss Solar, tu dépéris toute seule dans ton coin? Me demande Jeonghan.

Son but est de me faire baisser ma garde avec son sourire angélique mais cela ne prend pas. Je joue les agacées pour paraître crédible et le repousse sans plus attendre.

— Va voir ailleurs si j'y suis.

Le petit toutou de Taeju lève les mains en signe de reddition mais ne recule pas pour autant.

— Ne mords pas, je viens en paix.

— Va cracher tes mensonges ailleurs.

— Ma belle... Pas de ça avec moi.

Je l'observe s'approcher innocemment de mon verre. Il espère capter mon attention et attend le bon moment pour jeter le comprimé dedans.

— Je te faisais confiance, lui dis-je pleine de remords.

— Et tu lui plaisais. C'est comme ça.

Lui. Tout ne tourne qu'autour de Taeju. Le désir du capitaine prime sur tout. Je prends le temps de tourner la tête pour chercher Yeri du regard et lui permettre d'agir. Sa maladresse ne fait que retarder mon plan . Un léger bruit de flottement se fait entendre, m'indiquant qu'il est donc passé à l'action.

— Tu sais que tôt ou tard, il faut passer à la caisse.

— Ce dicton ne vaut que pour les faibles. Mais c'est beau d'espérer. Fighting.

Tout en lui faisant face pour qu'il plonge son regard dans le mien, je pose mon verre sur le rebord de la fenêtre, derrière le rideau et agite mes mains. J'espère au fond de moi que Jeongin a positionné le second gobelet au bon endroit, derrière l'épais tissu et que je ne me tromperai pas lorsque je le récupèrerai.

— Cette villa est bien assez grande pour qu'on s'ignore donc je retourne dans ma chambre.

Ma main frôle les deux contenants dissimulés et prend celui le plus près de la vitre. Lorsque je porte le liquide à mes lèvres, je remarque que les bulles dévoilent la limonade au lieu de la tequila et m'empresse de tout engloutir. Mon rival est satisfait et me laisse remonter les escaliers tout en chargeant les autres membres de l'équipe de me suivre du regard. Il serait dommage de perdre la proie fragilisée.
Une fois la porte passée, je m'assure qu'il n'y a personne de caché dans les recoins de ma chambre puis commence à positionner les téléphones de Seulgi et Jeongin derrière des objets anodins en activant le mode caméra. Seule Yeri a refusé de quitter son moyen de communication, m'empêchant d'obtenir un troisième angle discret. Puis je pose le mien sur la commode d'une façon assez évidente avec une lumière rouge qui indique clairement les intentions.

Jouer les idiotes est ce qu'il attend de moi. Maintenant il faut attendre que le poisson morde à l'hameçon.
J'ai beau joué les dures, l'angoisse s'empare de mon corps. Je me regarde dans le miroir pour me parler intérieurement et ne pas trouver une excuse pour fuir. Malgré ma préparation mentale, je sursaute quand la porte s'ouvre et se referme derrière le passage d'une silhouette sombre.
C'est lui.
Mon corps s'en souvient, tant je suis crispée.

Je me replonge trois ans en arrière. J'avais fait l'erreur de m'isoler dans la salle de bain, sentant que quelque chose d'anormal se passait dans mon organisme. Je pensais simplement avoir trop bu. Une cuite de jeunes lycéens, rien de plus banal. Mais il m'avait suivie et était entré derrière moi.

— Ma belle Solar...

Sa voix me révulse. Je n'ai jamais ressenti de haine aussi forte. Mon esprit me perturbe par des images de meurtre. C'est ce qu'il mérite et la peine que je voudrais lui infliger. Je dois donc me faire violence pour ne pas y céder.
J'entends ses pas arpenter la chambre. Je serre mes doigts sur mon chemisier lorsqu'il approche l'armoire où est posé en hauteur le téléphone de Seulgi. Mais il tend le bras vers la commode et récupère mon portable.

— Ma belle petite idiote.

Le monstre pianote sur le smartphone, arrête et efface l'enregistrement.

— Tu as du cran, je dois l'avouer. Et de la suite dans les idées mais tu n'arriveras pas à mon niveau. J'anticipe tout. Même ça.

Le con prétentieux balance l'objet au sol, explosant l'écran. Je suis bonne pour débourser des milliers de wons pour cette réparation. 

— J'ai envie de dire que tu représentes un défi à ma hauteur. Pas comme cette conne que tu as pour amie. Yeri.

— Ne parle pas d'elle comme ça ou tu le regretteras.

Ma menace ne lui plaît guère puisqu'il serre aussitôt mon avant-bras, me permettant selon la loi de me défendre. La paume de la main atterrit au niveau de son nez que j'entends craquer. Sa douleur est accompagnée d'insultes et d'une gifle qu'il me rend avec puissance. Mon corps bascule sur le lit, la tête vibrant sous le choc, ce qui ne me permet pas de le voir se jeter sur moi et arracher mon chemisier, faisant tomber au sol trois boutons d'attache.

— J'vais finir ce que j'avais commencé.

Sa menace glace mon sang. Je réalise alors que même si tout cela est filmé, je suis seule ce soir pour affronter ce monstre, et ma posture est très mauvaise.

— Taeju, arrête, lâche-moi.

Je tente de le frapper au visage mais il pare sans grande difficulté le coup et me plaque les bras vers le haut, afin que je lui facilite l'accès à mon corps.

— C'est moi qui ai eu l'idée de te droguer la première fois. Ton petit cul m'a tout de suite plu. Je te voulais. Quand je t'ai vu entrer dans cette salle de bain, je savais que j'allais prendre mon pied.

— Un viol. Utilise les bons termes, connard.

— Si tu veux, salope. Des petites connes comme toi que j'ai violées, il y en a eu à la pelle mais tu n'as pas su fermer ta gueule comme les autres. Il a fallu que tu rameutes tes chiens galeux. C'est toi qui a lancé les hostilités, souviens-toi de ça quand je vais te baiser.

La rage prend possession de mon âme mais un tout autre bruit attire mon attention.

My Last Game [ Tome 3 ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant