30 - Retour (2/2)

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L'Assemblée est depuis longtemps terminée.

J'ai le sentiment d'observer un village abandonné, meurtris. Une odeur de mort flotte sur les lieux. J'hésite à poursuivre mon exploration, tant le silence est synonyme de mort. Je repère les huttes des différents clans, la hutte de la Mourgüria par ses dimensions, mais surtout, je suis pétrifié d'une terreur incommensurable. Je ne parviens pas à réaliser ce que je vois, ces huttes vides, ce silence pesant. J'erre pendant un moment, jette des coups d'œil. La truffe au sol, Amaruq cherche des traces de vie. Avec lenteur, je sors de ma ceinture la fronde offerte par Nizar et j'y glisse un petit galet, au cas où je sois obligé de me défendre.

Ma magie de sorcier glisse de ma main jusqu'à mon bâton de marche, je suis prêt à affronter un éventuel danger, sans trop savoir quelle forme il peut prendre ; mon cœur bat de plus en plus fort, mon souffle s'accélère.

Je repère la hutte de Mourgür, j'hoquette de stupeur en découvrant le foyer éteint, les objets de taille éparpillé dans la poussière ; pas à pas, j'avance et ouvre le pan de cuir. Une silhouette est allongée sur une fourrure, et une seconde se tient accroupie à ses côtés.

« Esprit, ce n'est pas le bon moment, croasse une voix chevrotante. Va ! Il n'est pas prêt à partir avec toi. »

Amaruq fourre son museau dans mes doigts, attentif à ma réaction.

« Oupà ? dis-je faiblement. Est-ce bien toi ?

— Sigur ? »

Le maître tailleur de pierre se tait, ses yeux fixés sur le loup noir immobile.

« Amaruq, le présenté-je. Il est mon ami-loup, et m'accompagne dans mes voyages. Ne prends pas peur, Oupà.

— Demande-lui de ne pas s'approcher, s'enquit-il apeuré. Un loup peut dévorer un homme ! Va-t'en, esprit ! Tu n'es pas Sigur, tu as prit sa forme pour nous tourmenter d'avoir banni ce jeune homme plein de promesses !

— C'est bien moi, continué-je de la plus douce des manières. Amaruq, va, ceci concerne le Clan, rajouté-je à l'attention de mon doux et fidèle compagnon. Retrouve-moi plus tard, mon ami. »

Je m'accroupis maladroitement, et je fourre mon visage dans son cou. J'hume son parfum fort, caresse son crâne et ses oreilles. Il me mordille le cou, comme souvent, avant de pivoter sur ses coussinets et de s'en aller. Quand je me retourne vers le maître tailleur, il garde des yeux grands ouverts, terrifié j'en suis certain.

J'ai bien conscience qu'un homme parlant à un loup aussi fort et grand qu'Amaruq peut paraître magique, et peut-être est-ce un peu le cas. Je décide de me poser ce genre de questions plus tard, me concentrant sur le visage ridé et froissé d'Oupà. Je range ma fronde, et avance avec lenteur.

« Je ne suis pas un esprit, je suis revenu avec le remède du Mal-qui-Respire... Est-ce Mourgür allongé là ?

— Personne n'a de remède, répond-il en retenant ses larmes de couler, personne ! Tous les sorciers de tous les clans se sont réunis, ils ont tout essayé !

— Où sont-ils tous passé, Oupà ? »

En posant cette question, je sens mon cœur et ma gorge se serrer.

« Ils se reposent tous, ils toussent... je n'ai pas encore été malade, mais cela ne va pas tarder, je le sens ici... » Il tapote sa poitrine, les yeux brillants. « Où es-tu allé, Sigur ?

— Quand j'ai été banni, j'ai passé l'hiver avec Amaruq, mon ami loup, et j'ai ensuite rencontré les Céruléens. Mes visions sont devenues de plus en plus forte, et j'ai pu trouver la lumière qui chatouille les montagnes, jusqu'à la femme-lune, expliqué-je. Ensuite, j'ai trouvé le remède grâce aux dieux, et je suis revenu pour vous aider.

Le Murmure des Pierres (version non améliorée)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant