N & J

⑨

Je. Viens. De. Tuer. Quelqu'un.

Cette phrase tourne en boucle dans ma tête depuis pas mal de temps déjà depuis que Nex est parti "faire disparaître" le cadavre. Merde, même si ce mec n'était pas un saint, il ne méritait pas de mourir non plus ! La porte s'ouvre soudain sur mon colocataire et celui-ci fronce les sourcils en me voyant faire les 100 pas.

- Tu penses que je devrais me rendre ?? je le questionne.

- Mais t'es conne ou quoi ? Pourquoi faire ?? Tu serais prête à prendre perpèt' juste pour soulager ta conscience ??

Je fais la moue.

- C'était peut-être un criminel lui aussi mais... mais de là à mourir !

Nex souffle un coup et s'assoit sur une des chaises qui entoure la table.

- Tu me donnes mal au crâne putain. Et si je te disais que ce mec était un espèce de pervers accro au sexe et qu'il avait déjà violé plusieurs meufs, t'arrêterais de me casser les couilles ??

J'ai un mouvement de recule.

- C'est vrai ?

- Ouais.

Je comprends que je l'agace à pleurnicher, lui a déjà tué tellement de gens...

- Comment... comment tu t'es senti après ton premier meurtre ?

Il me lance un regard. Je vois bien qu'il hésite à me répondre, mais il finit tout de même par le faire.

- Je me suis enfermé dans ma bulle pendant plus de deux mois.

- Comment tu as fait pour sortir la tête de l'eau ?

Oh mon dieu, mauvais jeu de mot avec le lac dans lequel a fini Jessy.

- J'ai tué à nouveau.

Bon, je ne m'attendais pas à cette réponse. Ça a le mérite d'être clair.

- Quel âge avais-tu lors de ton premier meurtre ?

- 14 ans.

- 14 ?? Mais pourquoi est-ce que tu l'as fait ? J'imagine que tu as été forcé ?

- Assez de questions pour aujourd'hui, dit-il. Je n'ai pas pour habitude de raconter ma vie à des parfaites inconnues. Et puis en général ce n'est pas ce qui les intéresse de moi.

- Pff, sale obsédé. Et puis je te signale que tu t'es débarrassé d'un corps pour moi alors de là à me traiter de parfaite inconnue, bon.

- Peu importe. T'as pas besoin d'en savoir plus.

J'ai besoin d'oublier tout ce qu'il s'est passé aujourd'hui. Même si Jessy était un connard le fait d'avoir tué quelqu'un me rend mal.

- On a pas d'alcool ici ? je demande soudain.

- Pourquoi, tes fêtes entre lycéens bourgeois te manquent ?

Oh non, pas le moins du monde.

- J'ai envie d'oublier et de me sentir un peu mieux.

**

En début de soirée, je suis avachie sur le canapé avec pour seule pensée le meurtre que j'ai commis ce matin.

- Rho c'est bon faut t'en remettre sérieux, lance la ravissante voix de mon colocataire.

- Excuse-moi si tuer est une chose récurrente dans ton agenda perso, mais ce n'est pas mon cas, je fais en redressant la tête.

Il a déjà arrêté de m'écouter alors je prends ma tête dans mes mains en grommelant. Quand je lui ai demandé s'il y avait de l'alcool ici plus tôt, il ne m'a pas répondu et s'est contenté de dire que ma voix lui donnait mal au crâne. Je m'apprête à lui redemander quand soudain je me reçois quelque chose de dur dessus.

- Ah ! Mais ça va pas ! je lance en massant mon épaule qui je le sens, sera couverte d'un bleu demain matin.

- Tu voulais de l'alcool, le voilà. Si seulement ça peut te faire fermer ta gueule.

Je souffle mais ne dis rien. Au moins j'ai à boire. Je m'en empare mais une idée me vient soudain.

- Tu sais... c'est triste de boire seule... tu ne veux pas te joindre à moi ?

Cette fois-ci, je n'ai pas besoin d'insister. Il vient s'installer à côté de moi et m'arrache la bouteille des mains, qui est une bouteille de vodka, d'ailleurs.

- C'est bizarre, d'habitude je la prends en shot.

- Parce que la situation dans laquelle t'es te paraît habituelle ?

Mais c'est qu'il m'énerve avec ses remarques. Je lui arrache la bouteille des mains comme il l'a fait précédemment et contrairement à ce que je pensais, il ne m'étrangle pas. Je l'ouvre et bois plusieurs gorgées d'affilée comme si j'étais assoiffée. J'espère que boire va m'aider à me changer les idées, car là, j'en ai bien besoin.