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- Mais ça ne va pas ! C'était notre seul élément pour contrer l'ennui !

- Si tu t'ennuies déjà tu ferais mieux de te casser de là putain.

- Mais attends, ça fait combien de temps que t'es là au juste ?

- Cinq mois.

- Et comment est-ce que tu fais pour survire ??

- Tu m'soules avec tes questions !

Je souffle.

- Il y a un grenier ici ? je demande.

Il hausse les épaules en me fusillant du regard. C'est bon, j'ai compris que tu ne me portais pas dans ton cœur.

- Ça fait cinq mois que t'es là et tu ne sais même pas si il y a un grenier ?? Bon, je vais aller voir. Je trouverai peut-être une vieille radio. Mais au faite, elle appartenait à qui cette maison pour être encore meublée ?

- Une vieille qu'est morte. Personne est venu réclamer son cadavre.

Je fronce les sourcils.

- Et il est devenu quoi son cadavre au juste ?

- Dans la rivière pas loin.

J'entrouvre la bouche, mais ne dis rien. Ok, c'est dégueulasse. Je me contente donc de monter à l'étage, qui mène directement à la simple chambre avec un matelas miteux, et cherche une ouverture dans le plafond. Je ne tarde pas à en trouver une. Ok, il me faut une chaise, mes talons ne suffiront pas. Je redescends donc et en prends une puis remonte, sous le regard inquisiteur du tueur avec qui je partage désormais la maison. Je positionne la chaise juste en dessous de l'ouverture et force dessus. À mon grand étonnement, une sorte d'échelle descend, me permettant de monter facilement. Je l'empreinte et me retrouve donc en haut. J'aperçois une fenêtre, protégée par un rideau. Je m'en approche en faisant attention à ne pas trébucher à cause de la semi-obscurité de la pièce et une fois que j'y suis, l'ouvre. La lumière illumine l'endroit et je m'aperçois tout de suite qu'il y a pleins de cartons partout. Mais une chose retient surtout mon attention... au plein milieu de la pièce traîne un vieux tourne-disque avec un vinyle emballé posé dessus. Ravie, je me mets à chercher s'il y en a d'autres mais je me rends rapidement compte que l'on va devoir écouter la même musique en boucle. Je m'en empare et regarde de quelle chanson il s'agit : « Can't help falling in love » d'Elvis Presley. Je connais cet artiste, mais pas ses musiques. Pourvu que le tourne disque marche ! Je déballe le vinyle, et le positionne correctement. Il ne reste plus qu'à voir si la chanson commence ou non. Après plusieurs secondes qui me semblent passer pendant une éternité, les premières notes de la mélodie retentissent. C'est une belle chanson. Je m'empare du tourne disque et commence à avancer, bien déterminée à le ramener en bas, sauf que je me rends rapidement compte que je ne peux pas le faire toute seule. En plus mes faux ongles râpent contre les bords.

- Euh... Nex ? j'appelle.

Aucune réponse.

- Colocataire sexy aux légères tendances meurtrières ? je tente.

- Qu'est-ce que tu veux ?? lance Nex en apparaissant dans l'embrasure, me faisant sursauter.

Le tourne disque me glisse des mains et il part s'écraser sur le sol de la chambre.

- Tu peux pas faire comme tout le monde et t'annoncer avec un raclement de gorge ?? je fais en descendant l'échelle.

J'atterris sur la chaise et referme le grenier. Le tueur en face de moi me dévisage de haut en bas, les bras croisés sur sa poitrine.

- Bah quoi ? je demande.

- C'est quoi cette musique merdique ??

- La seule musique qu'il y ait ici, puisque tu as trouvé judicieux d'exploser le post de télévision.

- Fais gaffe avec ton ton supérieur.

- J'y peux rien je suis formatée comme ça.

- Formatée à parler comme une salope ?

- Toi aussi tu devrais surveiller ton langage.

Il fait un pas vers moi et je recule. Un sourire satisfait prend place sur ses lèvres.

- Quand je m'avance tu recules et tu penses me faire peur avec tes menaces de bourgeoise ?

- Mes menaces de bourgeoise ? Tu délires mon garçon.

- Ah parce que c'est pas des boucles d'oreilles Dior que t'as aux oreilles ??

Je fronce les sourcils. Comment sait-il ça ?

- Et appelle-moi mon garçon encore une fois et je t'enferme dans ce putain de grenier avec ta musique de merde.

- Comment tu sais que ce sont des Dior ? je questionne.

- J'ai de la pratique dans le vol de bijoux, t'es conne ou quoi ?

- Non je ne suis pas conne mon garçon.

Je ramasse vite le tourne disque et descends les escaliers rapidement pour ne pas qu'il mette la main sur moi. Je l'entends gueuler un « salope », tss quel gentil colocataire, il est très accueillant je trouve. Je ne peux pas me plaindre, c'est quoi qui vient squatter, pas l'inverse. Il descend à son tour et paraît énervé.

- On se fait à manger ? je demande.

Il me regarde de haut en bas en passant une main agacée dans ses cheveux.

- J'me fais ma bouffe, tu t'fais la tienne. Pense pas qu'on va commencer à cuisiner ensemble.

Je m'approche du vieux comptoir à côté duquel il est, m'assois et m'y accoude.

- Alors dis-moi, je suis curieuse, qu'est-ce que ça mange un tueur en série ?

Je l'entends souffler bruyamment et j'ai à peine le temps de comprendre ce qu'il se passe que j'évite de justesse un bol en verre qui vient lamentablement s'écraser derrière moi.

- Mais ça va pas ! je lance. T'aurais pu me blesser !

- Ouais, c'était le but recherché. Putain je sens que j'vais pas tenir longtemps avec toi.

Ah ça, je l'avais bien remarqué, et c'est d'ailleurs ce qui devrait commencer à m'inquiéter.

N & JOù les histoires vivent. Découvrez maintenant