XLIX - Elle

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Je sors de chez le gynécologue le cœur un peu plus apaisé mais rien qu'en pensant à la façon dont je dois annoncer à Spencer que je suis enceinte et que je veux garder le bébé, j'ai envie de me pendre.

Ce dont je suis certaine c'est qu'il ne me forcerait jamais à rien mais il pourrait se soustraire de l'équation croyant que ça me forcerait à avorter. Avec le recul, je me rends compte que l'avortement c'était ma solution la plus facile pour échapper à une réprimande certaine. En plus, ma mère a raison. Je cherche plus à lui faire plaisir à lui qu'à moi-même et je m'oublie ce qui est très très problématique. Il ne peut pas m'en vouloir pour avoir pensé à moi premièrement. C'est vrai que ce bébé nous l'avons conçu à deux mais nos avis vont diverger à coup sûr. Je sais ce qu'il veut et je sais aussi ce que moi je veux et le conflit d'intérêt semble inévitable.

Je reste persuadée que je peux le convaincre de changer d'avis. Après tout un bébé c'est pas si mal, on sera juste un peu plus occupé et on n'aura plus beaucoup de temps pour nous mais je pense que c'est un défi que nous pouvons relever à deux.

J'étais vraiment décidée à en finir aujourd'hui mais je n'ai pas pu m'empêcher de regarder l'écran de l'échographie. C'est vrai qu'il n'est pas encore totalement formé mais c'est déjà un être humain.

Je suis partie sur Internet, j'ai vu un film prénommé le "cri silencieux„ . C'est un long-métrage d'un ancien docteur , Dr Nathanson, spécialisé dans l'avortement qui se reconverti et qui dénonce cette pratique comme étant mauvaise. J'ai poussé mes recherches un peu plus loin et j'ai vu des choses atroces. Je me félicite d'avoir eu le courage de changer d'avis parce qu'avec ce que j'ai vu, je ne pense pas pouvoir fermer les yeux jusqu'à la fin de ma vie si j'étais allée jusqu'au bout. J'aurais infligé une douleur inouïe à un être humain innocent. La canule d'aspiration est décrite comme une arme mortelle qui « démembre, écrase et détruit » ce que Nathanson désigne comme l'enfant. Ce dernier décrit le fœtus humain comme un « enfant en train d'être déchiré, démembré, broyé et détruit par les impitoyables instruments en acier de l'avorteur ». Il note comment le rythme cardiaque du fœtus accélère et comment il semble ouvrir sa bouche dans un « cri silencieux ».

Je referme immédiatement l'ordinateur effrayée par tout ce que je viens de découvrir. Je n'ai pas envie de discuter avec ma mère et de l'entendre me donner des conseils sur ce qu'il faut faire et ne pas faire pendant la grossesse alors je me contente juste de lui envoyer un message bref et précis.

Je l'ai gardé.

Je ne sais pas si elle va le lire parce qu'elle et les nouvelles technologies ça fait deux mais si elle parvient à le lire tant mieux. Mon téléphone vibre. Depuis quand ma mère répond aussi vite aux messages. Mon visage devient tout à coup rigide en voyant que c'était Jane.

J'ai trouvé une solution pour
la bourse. Rdv au resto du
Four seasons à 20h.
Jane.

J'étouffe un cri de joie en lisant le message. Si quelqu'un m'avait dit que j'allais être aussi contente un jour devant un message provenant de Jane, je lui aurais foutu une double claque.

Vu la manière dont Spencer s'est braqué quand je lui ai parlé de rester à New-York, j'ai cru qu'il n'allait jamais pouvoir intercéder pour moi. Cela démontre encore à quel point je manque de confiance en lui. Si j'avais été une bonne petite copine , j'aurais cru jusqu'au bout qu'il aurait fait n'importe quoi pour moi mais au lieu de ça, je l'imaginais déjà essayant de trouver tous les scénarios farfelus pour me faire venir avec lui en Californie. J'ai eu tort. Tout ce qu'il me reste à faire c'est trouver le moyen adéquat de lui dire pour la petite boulette dans mon utérus et affronter la tempête qui s'en suivra .

The black lady IIOù les histoires vivent. Découvrez maintenant