LXIV - Elle

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J'ai reçu ce texto dans la nuit et l'ai découvert au petit matin :

Je passe vous prendre à 9 heures.
On rentre à Bel air pour le week-end. Non négociable.

Je pensais qu'il aurait besoin d'air, d'espace, de temps. Mais il semble plutôt vouloir rattraper le temps perdu et s'investir auprès de sa fille : je n'aurais pas pu demander mieux. Et je n'aurais jamais imaginé que Spencer fasse tant d'efforts pour être un bon père ou du moins pour le devenir. Peut-être que je m'étais trompée, que je l'avais sous-estimé. Ou peut-être qu'il a vraiment changé et qu'il veut vraiment s'investir dans la vie de sa fille.

Alors je lutte contre mon instinct, je ne cherche pas à me rebeller, ni à compliquer la situation : je rassemble quelques affaires pendant que Hope prend son petit déjeuner et j'attends que le garçon rebelle vienne nous trouver.

La petite se jette dans les bras du grand à l'instant où il apparaît puis elle hurle pour être reposée, s'inquiète de ne pas avoir ses jouets et fonce en direction de sa petite chambre à quatre pattes. Je trouve le père et la fille étonnamment complices, à l'aise. Spencer me confie qu'il est passé voir Hope tous les jours à la garderie, souvent à l'heure du déjeuner.

Cette semaine, avec la charge de travail que j' avais et Sandrine en déplacement à Venise, j'ai dû inscrire Hope à une garderie. Le cabinet a rédigé pas mal de contrats pour les acteurs qui seront retenus à l'issu de l'audition d'il y a quelques jours et j'étais la seule juriste de disponible. Je ne sais pas si Spencer a eu le rôle mais on le saura bien assez tôt.

– Pour que personne ne te croise..., pensé-je à voix haute. Enfin je veux parler de mon entourage. Tu ne veux pas qu'on te voit avec elle.

– Non. Pour ne pas te croiser, toi, rétorque-t-il en calant l'un de mes sacs sur son épaule. Je suis le père de Hope et je ne compte pas le cacher.

– Désolée, j'ai cru que...

– Que je n'étais qu'un connard de plus qui ne voudrait pas assumer ?

– Je ne sais pas...

Notre petite brune revient, son trésor dans les mains, Spencer la soulève à nouveau du sol et me fait signe qu'il est temps d'y aller. La berline chargée, notre trio quitte Homlby hills pour retourner dans le petit monde sélect des bénis de la vie.

Hope piaille une bonne heure, à l'arrière, puis finit par s'endormir. Spencer ouvre un peu plus sa fenêtre, baisse le son de la radio et fixe obstinément la route derrière ses lunettes de soleil. Mes yeux à moi se perdent sur son beau profil, puis sur son bras tendu dont la manche relevée étalés ses  tatouages noirs. Puis comme s'il s'est rendu compte que les paparazzis existaient, il remonte rapidement les vitres sans quitter la route des yeux./1

– On va réussir à cohabiter les week-ends, résonne soudain sa voix profonde. Je ne dormirai pas toujours à la maison, mais je veux profiter de la petite, passer du temps avec elle, l'emmener voir ma famille,les voitures si elle le veut. Je veux la voir grandir, avoir un rôle, une place dans sa vie, tu comprends ?

– Autant que tu voudras, acquiescé-je.

– Il n'y aura aucun quiproquo, aucune ambiguïté entre toi et moi.

– Je sais.

– Je ne vais pas foutre ma vie en l'air pour toi, petite fugueuse continue le pilote.

– Alors, commence par ne pas m'appeler comme ça..., murmuré-je, la gorge serrée.

The black lady IIOù les histoires vivent. Découvrez maintenant