LXXX - Collin / Elle

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Collin

Depuis la fois dernière où j'ai déposé Naya chez le père de sa fille et qu'on s'est bécoté dans la voiture. Je ne l'ai  plus revue. On a discuté brièvement par message où elle m'a appris qu'elle n'était pas vraiment dans son assiette parce qu'une de ses amies l'avait trahie . Je sais qu'elle est en constante angoisse à cause des médias qui s'affolent sur sa vie alors je ne voudrais pas lui ajouter plus de problèmes. J'étais décidé de rester dans mon coin jusqu'à ce qu'un nouveau contrat avec Hastings&Co atterrisse sur mon bureau mardi matin. Hastings essaye toujours de me rattacher à sa cause et pour cela il me propose une entrevue avec son bureau ici pour me présenter les différents avantages qui en découleraient. Je voulais rejeter l'offre mais j'ai lu qu'il y aurait une réunion de son conseil avec le mien pour discuter affaires. Naya n'est jamais venue dans mon bureau alors c'est l'occasion de l'y attirer.

Au dernier moment le lieu change à cause d'une fuite de gaz. Pour des raisons de sécurité, mon conseil d'administration a décidé que ça serait mieux d'aller discuter avec l'ennemi dans sa tanière. Le lieu ne m'est pas inconnu. Je ne voulais pas assister aux négociations alors j'ai dépêché mon assistant et quelques collaborateurs qui me feront le compte rendu. Moi pendant ce temps, je vais observer Naya en pleine réunion. Elle me fascine. Je m'autorise à aller m'asseoir dans une sorte de salon d'attente en open space. Le parfait poste d'observation.

Dans ce gros fauteuil, carré mais confortable, j'ai une vue panoramique sur le bocal en verre qui sert de salle de réunion et les différents bureaux de l'étage. À travers les baies vitrées, je peux garder un œil sur Naya, jambes croisées, air concentré. Elle est assez déroutante dans son costume masculin, cravate comprise. Étrangement hyper féminine à la Natalie Portman , elle a une classe folle, ce soir, et je ne suis pas mécontent que le père de sa fille ait raté ce spectacle. Il ne sait pas ce qu'il a laissé cet imbecile.

Pas si concentrée que ça, vu le regard qu'elle vient de me lancer en sortant de sa bulle. Je lui réponds par un petit signe de tête, genre « je suis là, je vous espionne », mais je ne suis pas certain que c'était la question que me posaient ses yeux. J'intime à mon érection de se calmer et me cale au fond du fauteuil. Pro. Mon corps a souvent envie d'elle mais mon esprit sait que c'est une mauvaise idée. Je ne peux pas faire correctement mon job si j'ai une liaison avec ma collaboratrice. Et je ne suis pas du genre à mélanger boulot et perso. Mais ce serait quand même plus simple si je n'avais pas l'impression de la troubler. Sa belle bouche et ses yeux marrons ont parfois l'air de me vouloir.

Quand c'est juste une pulsion physique, je sais gérer. Je suis un gourmand, pour les femmes comme pour le reste. Et je fais avec. C'est avec mes élans de tendresse que j'ai plus de mal. Et depuis que j'ai compris que Naya Kane-Porter n'était pas la petite fille gâtée que je croyais, qu'elle avait vécu des trucs pas faciles avec la famille de son ex copain, le pauvre type qui lui servait de petit-ami, une grossesse inattendue, les responsabilités à assumer très jeune... Je me sens un peu plus proche d'elle. Je connais tout ça par cœur. Et ça me donne de foutus réflexes, des gestes de protection, d'apaisement, d'affection.

Un brouhaha de portes et de chaises coupe brutalement mon analyse. La réunion prend fin, les intervenants quittent le bocal, certains se disent au revoir, à demain, les bureaux s'éteignent et l'étage se vide. Naya passe devant moi sans un regard. Tant mieux. Je me lève, je la suis. Elle marche un peu plus vite, je n'ai qu'à allonger le pas pour la rattraper. J'ai envie de la faire chier. Elle n'a pas l'air d'humeur. Alors je lui ouvre la porte de son bureau, galant. Elle me claque la porte au nez, chiante. Bandante.

Je m'adosse au mur d'en face et, sans percevoir les mots, j'entends ses échanges en une langue qui m'est inconnue. Sans doute une visio à plusieurs. Le décalage horaire explique sans doute ce rendez-vous nocturne. Je crois qu'elle bosse trop. Je suis pareil. Foutus gosses construits tout seuls qui deviennent des adultes acharnés.

The black lady IIOù les histoires vivent. Découvrez maintenant