Chapitre 62 : Au cœur de la Source

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Ni'Pteh secoua son chakram d'une torsion sèche du poignet. Le reste du sang des sorciers et des démons que l'arme avait tranchés net tomba sur le sol humide dans un clapotis sinistre. Impassible, elle le rangea dans son dos d'un geste d'habitude, tandis que Raluka commença à réaliser la dangerosité de sa partenaire.

Les quelques villageois postés dans les tours de guet de fortune et aux pieds des bâtisses modestes du village hésitaient entre le triomphe de l'élimination de leurs ennemis et la crainte de cette nouvelle arrivante.

Un adolescent qui observait la scène, à moitié caché derrière les murs de chez lui, rompit le silence en vomissant son dernier repas. L'odeur des corps mutilés venait de l'atteindre.

"Qui... Qui êtes-vous ?" bredouilla l'un des défenseurs, hésitant de la posture à adopter.

"Je suis l'ambassadrice des In'Helor. Et comme vous venez de le voir, je viens de vous débarrasser d'une menace qui pesait sur votre village. J'apprécie peu l'injustice, et à en juger par votre attitude, vous êtes souvent importunés."

"Détendez-vous." ordonna la voix du meneur du village, celui qui les avaient accueillies. "Elles ne sont pas là pour nous attaquer, ou alors, nous serions déjà tous morts, c'est évident."

L'homme aux iris violacés sauta du toit qu'il occupait et se reçut élégamment, avant d'avancer vers les aventurières.

"Vous nous avez en effet retiré une grande épine du pied. Ceux-là nous rackettaient depuis plusieurs mois déjà, et nous n'avions plus les moyens de payer notre tranquillité. Nous vous sommes redevables. S'il y a quelque chose que vous voulez qu'on fasse pour vous..."

"Des informations suffiraient amplement." répondit Ni'Pteh. "J'aimerais apprendre tout ce qu'il y a à savoir sur la Source. Comment s'y rendre, ce qu'elle représente. Peut-être en savez-vous plus que nous."

Les villageois semblaient s'être détendus avec le retour au calme apparent. Certains ne cessaient de jeter des coups d'œil inquiets à l'arme meurtrière que l'In'Helor avait rangée dans son dos. D'autres s'étaient munis de brouettes et approchaient avec dégoût des restes des corps des assaillants.

L'ambassadrice de la nation du Temps s'approcha de l'homme qui venait à sa rencontre, mais l'attention de Raluka fut détournée par un sanglot discret. L'enfant qu'elle avait aperçu n'était plus visible, caché à sa vue par les murs de la bâtisse, mais elle ressentait sa vive émotion, et en était attristée.

La lapine décida que l'attention du village n'était plus entièrement tournée vers eux, et prit le risque de sautiller légèrement jusqu'à l'adolescent en pleurs. Décidément, elle n'aimait pas quand les enfants pleuraient.

"Là, là, c'est fini." fit-elle d'une voix qu'elle voulait rassurante, accroupie devant le jeune garçon. Il ne devait pas avoir plus de quinze ans, et il mit un certain temps à se calmer assez pour arrêter ses pleurs et regarder Raluka en face.

"J'ai... J'ai peur..." parvint-il à articuler avec difficulté.

"Peur ? Peur de qui ?" questionna l'aventurière. Elle pensait à sa propre terreur, que lui avait inspirée sa coéquipière. Ni'Pteh n'était certainement pas quelqu'un à compter parmi ses ennemis. Mais la réponse du garçon la surprit. Après un regard furtif sur les côtés, il révéla :

"Des autres... Celui qui est mort, celui que votre amie a... A... C'était mon oncle."

Surprise, Raluka plissa ses yeux :

"C'est lui qui... Attaquait ton village ? Comment ça se fait ?"

Le garçonnet esquissa de nouveaux coups d'œil inquiets pour vérifier qu'on ne les écoutait pas.

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