Il y eut un froissement d'étoffe, puis le bruit de l'eau qui s'en extirpait, et gouttait abondamment au fond d'un seau.
Falin regardait le plafond d'une hutte de terre, au milieu du quartier marchand du Vortex. Les mouches vrombissaient hors d'atteinte, et lui faisaient perdre patience. La souffrance n'était pas sa seule torture.
L'inaction forcée en était une autre.
Sur la paillasse d'à côté, Rodan grimaçait. La vieille orque à la peau verte venait de lui appliquer un linge humide sur la jambe. À en juger par sa réaction, il n'était pas imbibé que d'eau.
L'Azelok frémit à cette pensée. Une rangée de récipients en céramique bordait la paroi de l'abri, et chacun contenait un onguent odorant d'une couleur différente. Le jaune pâle se disputait au vert sombre. S'ils ne sentaient pas aussi fort, Falin aurait pu se dire qu'il s'agissait de pots de peinture.
Leur aspect n'était pas très rassurant. C'était ici le seul endroit qu'on leur avait indiqué quand ils avaient erré dans les rues à la recherche d'un guérisseur. Les orcs ne les avaient pas abandonnés à leur sort. Mais on trouvait la peur dans leurs yeux quand ils cherchaient du regard d'un bout à l'autre de l'allée, avant de les aider.
L'émissaire serra les poings. Il y avait dans cette ville un groupe armé qui semait la terreur. Et il leur faudrait retrouver leur quartier général pour récupérer Eweya, il en était certain. Cela n'allait pas être facile, avec la loi du silence qui semblait régner ici...
Le contact du vêtement froid avec sa hanche réveilla la douleur qu'il avait oubliée. La surprise lui arracha un cri, la réaction acide de l'onguent un second.
"C'est pour votre bien." asséna l'orque, accompagnée d'un accent guttural prononcé.
Cette petite remontrance à son patient faite, elle retourna à ses préparations. Falin souffla son affliction dans un sifflement étouffé. Il avait du mal à le reconnaître, mais passé le temps du choc, ce produit soulageait bien la douleur. Peut-être que le froid aidait beaucoup, il n'en savait rien. Maintenant, il ne pouvait qu'attendre avec angoisse quelle préparation aléatoire l'aïeule allait déverser sur son nez. Il était cassé, c'était sûr.
L'Azelok serra les dents, souffla encore. Ne pas y penser, ça ne changerait rien. Mais à quoi penser d'autre, ici ?
La cabane de terre était remplie d'orcs gémissants, avec les deux aventuriers chétifs perdus dans leur masse. Les Orcs n'avaient pas pour habitude de manier la magie de la Vie, et visiblement, même leurs guérisseurs s'en remettaient à des méthodes plus traditionnelles.
Il ne savait pas si leur médecine était efficace. Ou combien de temps elle prenait pour agir. Falin n'avait qu'une envie : bondir de son lit et secourir l'elfe. Mais les quelques craquements dans ses côtes exprimèrent leur désaccord.
Un simple contact visuel avec Rodan le dissuada encore plus. Le Nain avait été clair : partir chercher Eweya dans cette état serait du pur suicide. Et cela ne l'aiderait pas. La situation avait beau être frustrante, il était forcé de se résoudre à l'accepter. Mais au moins... Au moins pourrait-il profiter de ce temps pour en savoir plus sur le groupe qui les avait attaqués ?
L'Azelok jaugea de l'œil les blessés qui emplissaient les lits. Celui à sa droite se plaignait d'une blessure à la cheville. La couche devant lui était occupé d'un jeune orc au visage tuméfié. Il remarqua que lui aussi arborait une peau verte.
Il prit une seconde de réflexion. Dans les rues, la population présentait une teinte dans les tons de l'ocre brune dans la grande majorité des cas. Mais ici dans cette hutte, les peaux vertes se faisaient plus présentes. Et la plupart d'entre eux... Ne laissaient pas voir des blessures dues à un accident ou une simple chute. Ils étaient victimes de passage à tabac.
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Nations
FantasyLe monde d'Elunae repose sur un équilibre stable depuis des millénaires. L'ordre et la paix établis sont maintenus par les dirigeants Immortels des Nations. Mais une malédiction menace leur immortalité, et des groupes d'aventuriers vont devoir mener...