Chapitre 63 : A l'encontre de l'Helor

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Ni'Pteh était entrée dans sa vingtième année. Elle avait troqué le blanc de sa tenue d'apprentie pour le vert pale de la robe des prêtresses d'In. Au fil des ans, sa relation avec son dieu s'était épanouie. Elle en retirait un grand bonheur, même si elle avait compris à présent que ça ne devait pas être son objectif.

Ni'Pteh dévouait sa vie à In, parce qu'il devait en être ainsi. Toutes les choses étaient à leur place assignée. Comme elles devaient l'être.

Son parcours serait parfois parsemé de frustrations, et il devait en être ainsi. Sa nouvelle voie était de s'assurer que la volonté de son dieu serait respectée, et que tout ce qui devait arriver arrive selon elle. Puisqu'aller à l'encontre de l'Helor ne pouvait résulter que dans des catastrophes. 

Ce n'était pas une partie de plaisir. Nombreux étaient les adversaires de la volonté divine. Et certains s'y opposaient même par simple jeu. Les Azeloks. Ils étaient appréciés par la plupart des autres peuples pour leur légèreté, sans qu'ils ne parviennent à comprendre que c'était cette même légèreté qui les mettaient tous en danger.

Les Azeloks ne cessaient de modifier le cours du temps, le tordre, manipuler la causalité comme s'il s'agissait d'un jouet pour enfant. Leur magie impie s'opposait toujours à l'Helor, même si elle n'était pas toujours couronnée de succès. Mais quand leurs petits tours de passe-passe fonctionnaient, l'Helor était toujours piétinée. Un sacrilège à l'échelle de tout un peuple. Et les nombreux recours légaux déposés auprès des Archimages pour faire interdire leur magie sans foi ni loi n'avaient rien donné !

Comme si les humains considéraient que leur magie était équivalente au devoir sacré des In'Helor ! C'était à rendre fou !

Il était de leur devoir de corriger cette aberration.

Ni'Pteh s'agenouilla, et profita du silence ambiant. Quatre autres prêtresses l'accompagnaient dans sa prière. Ensemble, elles s'ouvraient à l'Helor, prêtes à recevoir la volonté divine. C'était un processus difficile à décrire. Comme si son esprit était guidé à travers le courant d'une rivière, la prêtresse ressentait la direction du flux du temps.

Son dieu lui donnait des impressions, des sensations, des visions parfois, des informations et par-dessus tout, une volonté. Il fallait que les événements qu'elle ressentait par la prière adviennent. L'ordre du monde en dépendait.

La prière du jour donnait une vision simple et claire. Les impies seraient châtiés pour leurs infâmies. In recevrait leur force, aux dépends du chaos qu'ils aimaient à provoquer.

Avec un sourire, Ni'Pteh se releva, et ouvrit les yeux. Un froissement d'étoffe discret accompagna le mouvement de ses consœurs. Toutes étaient satisfaites. Le doute n'était pas permis : le rituel allait réussir.

Rassurée, Ni'Pteh déambula dans le temple, croisant de nombreuses consœurs. Les prêtresses avaient pu s'installer au nord du territoire de la Nation de la Lumière. Le vieux temple de pierres blanches y était toléré ici : la Nation du Temps ne revendiquait pas de territoires en tant que tels, mais occupait plutôt ceux des autres nations, au prix du respect des cultures et des populations locales.

Ce point était contesté, régulièrement, mais les arbitres de la Nation de la Magie préféraient éviter les conflits à tout prix, et jusqu'ici, ils n'avaient pas eu à se plaindre d'un mauvais accueil. Il faut dire que les paysans des landes environnantes ne s'approchaient pas souvent de cet étrange édifice. Les troubles venaient plutôt des autres peuples temporels.

Elle bifurqua, au détour de sa pensée. Les briques blanches aux motifs réguliers l'aidaient à organiser son esprit. Avec un crissement de dents, elle salua la prêtresse supérieure qui venait à sa rencontre. Dans son châle d'un rose pastel qui se réverbérait sur les parois, elle était difficile à rater.

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