Chapitre 13 : Le plan

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Le démon suivit des yeux Kazhiik, et restait en retrait afin de contempler un instant la rue dans son ensemble. Elle était conçue en pente, et des tours de surveillance ponctuaient régulièrement les allées, dominant de leur hauteur l'entièreté de l'espace.

Ritak examina les alentours des étals de l'humble marché de la ville basse, et ne parvint pas à y déceler la trace du moindre brigand ou mendiant. S'ils avaient existé un jour, ils avaient sûrement disparu suite à la rigueur implacable que les Paladins imposaient. Il aurait même juré apercevoir la pointe brillante d'une flèche à travers le créneau de l'une des tours.

Peut être que le Zaar s'amusait ici, mais Ritak, lui, se sentait de plus en plus oppressé. Et ce n'était pas seulement à cause des paladins. Les gens ordinaires aussi, le pointaient du doigt, ricanaient même devant sa peau pourpre et son aspect monstrueux à leurs yeux. Alors que les paysans au-dehors le craignaient et le haïssaient, ici il se sentait moqué, tourné en dérision.

Aucune de ces deux perceptions ne lui plaisait vraiment.


"On ne devrait pas le laisser seul devant." déclara lentement Arktus, le mort-vivant à ses côtés.
Ritak sursauta : il ne parlait pas souvent, et avait tendance à se faire oublier. Et son côté taciturne ne s'arrangeait pas en plein cœur de la Nation de Lumière.
"Tu as raison." répondit alors le démon, "Il faut quelqu'un pour l'empêcher de devenir fou au milieu de tout ce sang à déguster."


Ils remontèrent alors rapidement le chemin qui se courba en une boucle, et continuait son ascension vers le Bastion proprement dit. Ritak leva les yeux : les lacets ascendants semblaient se poursuivre encore un moment avant qu'ils ne parviennent à destination finale.

Après avoir grimpé deux lacets en tête d'épingle, le trio d'aventuriers put découvrir les casernes de la capitale humaine. Réputées pour former les meilleures forces militaires de toute leur espèce, elles résonnaient des cris de souffrance et de détermination des recrues qui donnaient de leurs corps pour apprendre l'art de la guerre.

Encore quelques niveaux franchis, et Ritak put découvrir le quartier des artisans de la ville. Alors que l'air s'embaumait de l'odeur des pains fraîchement sortis des fours, il put apprécier également les expositions des tisserands, prompts à montrer leurs étoffes aux milles couleurs, tandis que les forgerons martelaient leur fer, comme s'ils voulaient faire battre en rythme le cœur de la capitale. La ville était vivante, active. Les badauds s'activaient, rentraient et sortaient des échoppes comme dans une fourmilière. Plus ils montaient et s'approchaient du Bastion proprement dit, plus les vêtements se faisaient fastes et luxueux.

Bientôt, il ne leur manquait plus que quelques lacets de rues à grimper, et la population qui s'y trouvait était à l'évidence... Singulière.

Des nobles proches de la cour, ou de très riches particuliers, à en juger par la manière dont ils s'habillaient. Là encore, quand les humains leur accordaient un regard, celui-ci était très souvent d'une froideur cassante. Ceux-là les regardaient de haut, avec une approche altière et hautaine. Contrairement aux autres, ils devaient être informés de leur mission diplomatique et ne les méprisaient pas que pour leur apparence physique. La connaissance n'y faisait rien : ils restaient méprisés.

Ritak décida finalement d'ignorer ces regards, et de se préparer. Ils devaient tout les trois être coordonnés à partir de ce moment.

Suivi de près par Arktus, il rattrapa rapidement le Zaar, excité par son objectif, maintenant en vue.

La citadelle principale leur faisait face, et c'était sans doute l'ouvrage le plus impressionnant de toute la cité. La pierre taillée s'enfonçait profondément dans la montagne, comme repliée sur elle-même pour renforcer sa position défensive. Seules de fines meurtrières présentaient une ouverture dans la masse compacte et imposante de roche ainsi rassemblée par la main de l'homme. Elles projetaient de vifs rayons de lumière dorés sur le sol dans l'angle des ouvertures affûtées pratiquées dans le roc.

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