Mr. & Mrs. Spike (Tome I)

Mission 22 : Profiter du beau temps avec toi

Dimanche est arrivé, le troisième depuis le début de notre mission.

Par chance, le temps est resplendissant. Il me tarde de profiter de cette journée de mai sur un transat, munie d'un livre et d'une boisson glacée.

Pour l'instant, je savoure les caresses brûlantes des rayons du soleil sur le canapé extérieur tandis qu'Erik prépare le barbecue.

Plus j'y songe, plus je me dis que cette vie pourrait me plaire. Une existence simple, remplie de petites réunions entre amis et de moments privilégiés avec mon mari. Que demander de plus ?

Ah, je sais ! Du danger, de l'excitation, des rebondissements... voilà ce qui manque.

C'est ce qui me manquait déjà à l'âge de seize ans, quand j'ai commencé à aiguiser mes armes pour profiter des hommes.

Je rêve d'une vie trépidante depuis toujours, si bien que je doute d'être pleinement satisfaite par un quotidien aussi calme. Ne m'ennuierais-je pas, même après toutes les épreuves horribles que j'ai dû traverser et qui méritent repos ?

En tout cas, avec Erik, il est certain qu'on ne s'ennuie jamais. Il ne fait rien comme les autres. La preuve est qu'il hésite à allumer son barbecue avec un litre d'essence et une allumette. Ou avec une bombe artisanale. Je ne sais pas trop...

Personnellement, je m'en amuse. Plus il peste contre l'engin récalcitrant, plus mon sourire s'élargit.

Même s'il demeure une certaine distance dans nos échanges, ils sont apaisés. Plus de tension ou de rancœur. J'en viens à me sentir en sécurité, y compris dans les moments où son agacement est visible. Car j'ai conscience que dorénavant, il me protège, de lui-même comme des autres.

Au milieu de ce spectacle hilarant, la sonnette retentit.

Tiens... qui ça peut bien être ?

Je m'empresse de traverser la maison pour ouvrir la porte. Un instant, je redoute de recevoir un énième dessert de la part de Colette. Les deux derniers s'empilent déjà dans le frigo.

À défaut d'avoir pitié de mon âme, ayez pitié de mon corps, s'il vous plaît...

Mais derrière la porte, c'est Alicia que je découvre, en short et lunettes de soleil.

Sa mine penaude m'alerte immédiatement. Toutefois, pas le temps de la questionner qu'elle remonte la monture sur ses cheveux blonds et prend la parole :

— Je vous dérange ?

— Pas du tout. Entre !

Les sourcils froncés, je tends le bras pour l'inviter à passer la porte. Après un bref instant d'hésitation, elle accepte.

Au moment où elle se poste près du bar en se mordant nerveusement la lèvre, Erik nous rejoint. Il paraît tout aussi intrigué par son expression que je le suis.

Aurait-elle remarqué quelque chose au cours de notre soirée au club ? Aurait-elle des soupçons à propos de notre couple ? Pire, aurait-elle surpris les éclats de voix du bel assassin, hier soir ?

Tout en se tordant les doigts, elle finit par nous exposer la raison de sa présence.

— Si je suis venue, c'est parce que je tenais à m'excuser pour mon comportement de vendredi soir. Amanda, je n'aurais jamais dû essayer de séduire ton mari. Je me rends compte maintenant à quel point c'était déplacé !

Oh...

Indifférent à son sursaut de culpabilité, Erik lève les yeux au ciel.

Tout comme moi, il a certainement dû imaginer le pire en la voyant débarquer avec des traits marqués par l'appréhension. À présent, il a l'air de penser que son repentir est inutile. Comme si ça l'agaçait qu'elle puisse nous déranger pour s'excuser alors que monsieur s'amusait si bien avec son engin de malheur.