Mission 13 : Me faire pardonner

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Dès mon premier pas, mon regard se pose sur l'intérieur lumineux de Scott, peint dans des tons chaleureux. J'ai envie de pousser un cri de joie lorsque je remarque qu'il n'y a pas de bar. À la place, une cuisine fermée que je devine à travers une porte ouverte sur ma gauche.

Si je reprochais à la demeure louée par l'agence d'être sans vie, il est évident qu'on ne peut pas en dire autant de celle-ci. Elle respire l'intimité, le confort et la sobriété, pareille à un cocon.

Je pourrais avoir envie d'y rester...

Lentement, je m'approche des cadres. J'admire les photos avec un sourire triste, que j'espère discret. Aimée et Scott ont l'air tellement heureux, bien entourés. Pourquoi devrais-je briser ce qu'ils partagent, sous prétexte qu'une agence puissante désire la mort de mon voisin ?

Je doute de plus en plus d'y parvenir, mais le petit démon sur mon épaule, qui incarne tout l'égoïsme dont je peux faire preuve, me susurre que si cette mission est un succès, je pourrai peut-être négocier une démission en douceur. Ne serait-ce pas préférable à une fuite, au cours de laquelle je serais pourchassée par des assassins professionnels ?

Le seul moyen de m'éviter une balle dans la tête de la part d'Erik est de réussir cette mission.

Raffermie dans ma détermination, je me retourne vers Scott avec une attitude nerveuse. Il est temps de reprendre le masque que je me suis forgé.

— Vous êtes sûr que je ne vous dérange pas ?

Inconsciemment, il remonte son pantalon et plaque les mains sur les hanches. Je fais mine de ne pas remarquer la lueur de honte qui brille dans ses yeux, autant qu'il prétend ignorer les mouvements nerveux de mes doigts.

— Pas du tout ! s'exclame-t-il avec un sourire, qui s'apparente plutôt à une grimace. Vous désirez quelque chose à boire ?

— Non, merci. Je ne compte pas m'éterniser.

Avant de tourner la tête, je constate sa surprise. Je n'ai aucun intérêt à me montrer gentille et sympathique. Au contraire. Parfois, il faut savoir frustrer un homme et froisser son ego pour qu'il nous mange dans la main.

Alors qu'il disparaît dans la cuisine, je décide de rebondir pour rompre le silence qui s'installe. Il a, selon toute vraisemblance, peu apprécié mon ton.

— Aimée n'est pas là ?

— Elle travaille, réplique-t-il, au loin.

On dirait que le sujet l'ennuie.

— Oh, d'accord...

Comme si je ne le savais pas...

Très vite, il revient avec du thé glacé. Il dépose le plateau qu'il tient entre les mains sur la table basse et m'invite à m'asseoir sur le canapé. Au moment où je tire ma jupe afin de veiller à ce qu'elle n'en dévoile pas trop, j'ai l'impression de sentir son regard sur mes jambes nues.

Cela dit, je n'en fais rien. Pendant qu'il nous sert  - malgré mon refus -, je garde les yeux baissés et les mains pressées entre mes cuisses.

— Je tenais à m'excuser pour mon comportement de samedi, commencé-je. Je n'aurais dû...

— Vous venger sur moi du comportement que vous subissez au quotidien ?

Je relève la tête vers lui, ébahie.

Eh bien, dis donc, il ne pratique pas la langue de bois !

Bien évidemment, mes excuses n'ont rien de sincère. Je ne regrette pas un seul instant mon emportement, puisqu'il m'aura permis d'être ici aujourd'hui, et de marquer son esprit. Mais au moins faut-il qu'elles le paraissent.

Mr. & Mrs. Spike (Tome I)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant