Mr. & Mrs. Spike (Tome I)

Mission 29 : Te serrer fort (suite)

— Alors, qu'en dis-tu ? insiste-t-il.

Il n'y tient plus, le suspense est insoutenable. Je sens une tension accablante emplir l'air entre nous, l'alourdir, le charger de petits étincelles qui déflagrent dans l'invisible qui nous entoure, pareilles à de minuscules feux d'artifice. L'atmosphère en devient presque irrespirable.

Bien qu'il tente de s'y infiltrer grâce à son regard perçant, Erik ignore ce qui agite mon esprit. Il ignore ce que ce simple bijou, accompagné d'aussi douces déclarations, déclenche en moi. Moi-même je peine à démêler ce qui m'anime. La mosaïque de mes émotions est si intense qu'elle en devient d'autant plus étouffante. Mes lèvres s'ouvrent sans lui offrir la promesse d'engagement tant désirée. Elles s'ouvrent sur le silence. Et je ne trouve finalement pas de meilleur moyen pour exprimer le trouble qui me submerge que de l'embrasser passionnément.

Je colle ma bouche contre la sienne en priant pour ne jamais m'en détacher. Je fonds sur lui comme si je pouvais trouver entre ses lèvres l'oxygène qui me manque.

Et ça fonctionne. Je me sens aussitôt renaître. Mes poils s'hérissent, mon cœur tambourine.

Erik comprend à mon empressement tous ces sentiments que je lui tais encore. Cependant, j'ai conscience qu'il a besoin de mots. Des mots qu'il pourra analyser, ressasser, fantasmer.

Je m'écarte, à bout de souffle, pour lui répondre enfin :

— J'en dis que maintenant, il me faut te trouver un anneau pour m'assurer qu'aucune femme ne te mettra le grappin dessus.

L'humour... je n'ai pas trouvé mieux. Mes joues n'en finissent plus de rougir éhontément.

Satisfait, mon faux mari passe l'alliance autour de mon annulaire. Je suppose qu'il n'est plus vraiment un "faux" mari, désormais. Je la contemple, les doigts écartés, avant de saisir les pans de sa chemise pour l'attirer dans un nouveau baiser fougueux, qui s'éternise, pour mon plus grand plaisir.

C'est mon bel assassin qui y met fin, amusé.

— Ah, donc tu peux bel et bien être jalouse ! me taquine-t-il.

Je grimace intérieurement.

— Oui, mais pas d'une fille aussi innocente qu'Alicia, prétends-je.

Bon, d'accord, je l'étais un peu lors de la soirée... Cependant, je refuse de l'admettre ouvertement. Surtout après avoir poussé mon amie dans les bras d'Erik pour observer sa réaction. Autant éviter de lui exposer les points sur lesquels il peut frapper fort pour paralyser mon cœur, ainsi que toute la machine que ce traître d'organe alimente.

— De qui, dans ce cas ? Aimée ? me sonde-t-il.

J'écarquille aussitôt les yeux. Un prénom, et la magie de l'instant est brisée.

Alors que j'esquisse un mouvement de recul, il me maintient fermement contre lui. Ses bras imposants m'enferment, avec la certitude de m'empêcher de me défiler.

Tel un animal acculé, je grogne, puisque incapable de fuir.

— Pourquoi son nom t'est venu à l'esprit ? Tu la trouves à ton goût ? l'accusé-je.

Il penche sa tête d'un côté, puis de l'autre.

— Peut-être... Pour le coup, je ne suis pas certain que je dirais non à un plan à trois avec vous deux.

Connard... ai-je envie de lui cracher à la figure.

Je serre brièvement la mâchoire, hésitant sur l'attitude à adopter. Je pourrais m'énerver et me répandre en injures pas très classes. Je pourrais, mais je possède une bien meilleure corde à mon arc.