28 - We Are

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[Song reference: We Are by Justin Bieber & Nas]

« Va falloir compenser ce que tu m'as fait louper... »

Ce goût de rhum – toujours mélangé à celui de la cigarette qu'elle avait appris à apprécier, par habitude sans doute –, cette saveur caramélisée et épicée, sucrée mais désagréablement piquante, elle se déposait sur ses lèvres, imprégnait sa langue à elle maintenant. Maxine ne sentait plus que ça. Mais bien plus dérangeant encore, était la signification même de ce goût.

-       Billy, hoqueta-t-elle en le repoussant légèrement.

-       Quoi ? maugréa-t-il, alors toujours occupé à caresser le cou de la rouquine du bout des lèvres.

Par réflexe, elle ferma les yeux. Oublia un instant la source de ses préoccupations. Elle en avait tellement rêvé. Elle s'était tellement de fois imaginé cette scène dans la tête. La vie ne pouvait pas lui demander de faire autre chose que d'en profiter. Il embrassa sa peau et elle retrouva ses esprits, l'écartant à nouveau de ses deux bras dont les muscles étaient déjà complètement relâchés, comme ankylosés.

-       T'as bu... parvint-elle tout de même à prononcer.

-       Ouais..., lâcha-t-il simplement. Et alors ? continua-t-il, face à son silence.

-       Arrête... je... tu serais pas là si t'étais dans ton état normal, alors–

-       Si, la coupa-t-il.

-       Non, tu–

-       Ça change que dalle. Tu sais très bien, l'interrompit-il une nouvelle fois.

Démunie, elle s'éloigna de quelques pas. Oh, elle détestait ces situations dans lesquelles il la mettait : quoi de plus insultant que d'être désirée uniquement lorsque l'autre se trouve dans un quelconque état second, mais quoi de plus délicieux que le simple fait d'être, enfin, avec lui ; lui, la personne la plus instable, dont la vie était une constante oscillation entre pénible réalité et supportable ivresse. Franchement, ressentait-il encore les choses comme tout un chacun ? Son corps était-il encore sensible à toute absorption, toutes substances confondues ? Était-il (son corps ou lui, elle ne savait même plus) capable de sensations ?

Elle releva les yeux. Maintenant qu'elle le regardait, avec intention, avec toute l'attention du monde, elle ne pouvait que faire face à ce constat d'une vérité déchirante : état d'ébriété ou non, il était, là, devant elle, exactement le même. Ce même garçon aux cheveux blonds, à l'allure fière, au dos droit, aux épaules carrées, à la bouche taquine, aux yeux inconstants. Des yeux qui – peut-être était-ce là que résidait la différence, et encore – dégageaient une lueur chaude, prête à venir prendre possession de son corps, à le mettre en feu comme il le faisait déjà dès qu'il la touchait par inadvertance ou non. Exactement le même.

-       Tu sais très bien, reprit-il en s'avançant vers elle, que t'es la seule personne capable de me retourner le cerveau...

Il était à sa hauteur, la surplombant avec une force à la fois bienveillante et imposante.

-       Capable de me mettre dans ces états de merde... maugréa-t-il en se penchant vers elle.

Il soupira.

-       Ça... souffla-t-il avant de glisser son visage dans son cou, prenant une longue inspiration à mesure qu'il remontait vers le creux de son oreille. Cette odeur... ton odeur.

Il colla son front contre celui de la rouquine, caressant son nez avec le sien, s'amusant à frôler ses lèvres de sa bouche, jamais sans arrêter de parler.

CONTAMINATEDOù les histoires vivent. Découvrez maintenant